Ukraine – Russie (mais pas que…) 14

  • Gal Kirn : « Contre la guerre en Ukraine et le nouvel impérialisme : une lettre de solidarité avec les opprimé·e·s »
  • Andrea Ferrario : « Ni avec la Russie, ni avec l’OTAN » et « pas d’armes pour l’Ukraine » : deux slogans erronés et contre-productifs
  • Patrick Silberstein : Ukraine : « L’armée russe est un tigre de papier et le papier est maintenant en feu »
  • Sotsyalnyï Roukh : L’heure est à la solidarité internationale contre la guerre  (article antérieur à l’invasion de l’Ukraine par les troupes armées russes)
  • Tess McClure, Peter Beaumont et Luke Harding : Les forces russes se rapprochent de la capitale ukrainienne, après 16 jours de guerre
  • Une blague circulant à Moscou
  • L’Université Lomonossov de Moscou : Contre La Guerre
  • Illia Ponomarenko : La Russie concentre sa puissance militaire pour l’assaut de Kiev
  • Liens avec d’autres textes
  • Contre les mensonges de Poutine et de ses soutiens : Que s’est-il passé sur Maïdan ?

Appel places de France

Publication Twitter - Visuel 17 mars


« Contre la guerre en Ukraine et le nouvel impérialisme : une lettre de solidarité avec les opprimé·e·s »

Après un long hiver de pandémie de Covid-19, les premiers aperçus d’un printemps qui vient offrent une vision de nouveaux bains de sang. Nous avons maintenant assisté à plus d’une semaine d’invasion et de guerre russe en Ukraine, un laps de temps qui sera considéré comme une rupture indéniable dans les relations internationales. Les choses évoluent à un rythme incroyablement rapide sur le terrain, dans le cyberespace et dans l’espace international.

Bien que l’invasion imminente de l’Ukraine ait été annoncée par l’OTAN et le gouvernement des Etats-Unis depuis plusieurs mois, elle a pris – comme toute guerre – beaucoup de gens par surprise. Certains disent même que c’est la première fois après 1945 que l’Europe connaît une guerre, si l’on fait abstraction des guerres à Chypre [1974] et en ex-Yougoslavie.

En plaçant les choses dans une perspective plus large, nous pourrions qualifier cette semaine de retour au paradigme impérialiste de la guerre froide et chaude du passé, où seules quelques superpuissances décident de l’avenir de nations et de peuples plus petits, un paradigme évident non seulement dans la guerre froide mais aussi dans la période de concurrence mondiale entre les grands empires européens avant la Première Guerre mondiale. D’autres échos du passé semblent également nous interpeller. Poutine, par exemple, est souvent dépeint comme un nouvel Hitler et lui-même qualifie le gouvernement ukrainien de « nazi ». Bien que ces deux caractérisations soient fausses, elles démontrent l’analogie croissante avec 1939 et le début de la Seconde Guerre mondiale. Une meilleure analogie historique est plutôt 1914 et le début de la Première Guerre mondiale, qui serait encore plus appropriée si la guerre déborde des frontières de l’Ukraine. Mais même si la guerre reste contenue au niveau régional, elle pourrait rappeler les conflits de l’après-1991 en ex-Yougoslavie et la série de guerres menées par l’appareil politico-militaire russe dans le contexte post-soviétique, au cours des deux dernières décennies, qui incarne les idées néofascistes d’Alexandre Douguine [théoricien influent de l’eurasisme, soit un ensemble formé entre autres par les peuples slaves ; il oppose la « culture russe » à la démocratie et y compris aux sciences, et se place sous l’autorité du patriarche de Moscou; son influence sur Poutine est souvent affirmée] comme l’espace civilisationnel d’un russkiy Mir [grande Russie]. L’image historique qui est peut-être enfin en train de mourir est celle de la Russie en tant que nation «libératrice»/«héroïque», non seulement en Europe, mais aussi dans certaines parties du grand Sud.

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Dès lors que nous insistons sur une analyse critique et matérialiste, nous ne pouvons que nous opposer au trope souvent répété dans les médias qui psychologise l’histoire et pathologise une personnalité (ici, Poutine). Il convient de noter que l’appareil idéologique de Poutine, du moins en matière de politique étrangère, a été très investi dans une orientation anti-impérialiste de moins en moins convaincante d’opposition à la domination mondiale des Etats-Unis. La Syrie a été le premier affrontement majeur entre les grandes superpuissances – une guerre par procuration – bien qu’elles soient par ailleurs unies dans une lutte commune contre Daech. Cette position « anti-impérialiste » actuelle de la Russie s’appuie sur une idéologie ancienne et controversée, qui remonte à l’Union soviétique pendant la Seconde Guerre mondiale et qui a été reprise en partie par des luttes anticoloniales. L’Union soviétique a pu se promouvoir – sur la base d’une lutte réelle et sanglante contre le fascisme – comme le symbole de la lutte antifasciste internationale. Cet héritage était une pierre angulaire de la mémoire officielle de l’Europe d’après-guerre. L’antifascisme a toutefois été remplacé par l’idéologie de l’antitotalitarisme et par la politique mémorielle spécifique de l’Union européenne. L’antitotalitarisme repose principalement sur les (nouveaux) nationalismes et l’anticommunisme, où la Russie (l’« ancienne Union soviétique ») est devenue l’ennemi principal, tandis que le passé du fascisme a été réduit au souvenir de l’Holocauste. Cette évolution mémorielle continue d’inspirer les positions anti-russes aujourd’hui en Occident.

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Avec la guerre contre l’Ukraine, le paravent idéologique de la Russie, qui se présente comme l’héritière des luttes anti-impérialistes et antifascistes (les références à ce sujet dans la région de Donetsk ne sont pas une coïncidence), s’est finalement flétri (espérons-le, également pour ceux qui, à gauche, ont trop longtemps donné des traits relevant d’un roman aux figures « anti-occidentales » ou « anti-américaines »). Soyons clairs : Poutine n’offre aucune promesse, ni même l’image d’un « monde meilleur », mais seulement un monde dominé par des intérêts oligarchiques ou, comme certains l’ont dit à juste titre, un monde de capitalisme du KGB. Un monde qui, en Russie, a déjà écrasé sans aucun doute l’antifascisme, la gauche et toute opposition démocratique, et qui, si on le lui permettait, ferait de même en dehors de la Russie. L’une des tâches de la nouvelle gauche est de se débarrasser du romantisme de l’ancienne gauche à l’égard des dirigeants autoritaires qui se sont opposés à l’hégémonie des Etats-Unis, ce que l’on a appelé « l’anti-impérialisme des idiots» , et qui s’est finalement essoufflé.

Où pouvons-nous et devons-nous trouver des lueurs d’espoir aujourd’hui ? Comme le suggère le titre de cet article, nos espoirs devraient reposer sur les opprimé·e·s en Ukraine, en Russie et au-delà. Ce sont eux et elles qui ont la volonté et l’espoir de s’opposer aux guerres en Russie et ailleurs, ceux et celles qui se battent pour leur vie en Ukraine aujourd’hui, ceux et celles qui se défendent, ceux et celles qui se portent volontaires pour organiser des réseaux de solidarité avec tous ceux et celles qui fuient les zones de guerre, et à tous ceux et celles qui, malgré la militarisation de l’ethnicité par la guerre, restent profondément engagés dans le projet de changement social et de paix.

Pourtant, en formulant ces espoirs, nous devons être clairs sur qui a commencé cette guerre particulière. Je voudrais faire valoir que cette position critique de gauche n’a pas besoin d’être absorbée par le consensus libéral-conservateur dominant d’une nouvelle Europe qui fait géopolitiquement le jeu de l’hégémonie des Etats-Unis. La gauche doit réfléchir à l’héritage du mouvement anti-guerre et à ses horizons futurs dans un monde de plus en plus marqué par des catastrophes environnementales et sociales imminentes. Un tel climat mobilise par défaut autour de la peur et de l’anxiété. La peur, l’anxiété et le désespoir ne sont pas une réponse naturelle ou un moteur primaire de la nature humaine, mais sont plutôt symptomatiques d’un tissu social fortement déstabilisé après des décennies de réformes néolibérales et deux ans de pandémie.

Ce désespoir croissant offre un horizon dystopique, une voie claire et courte vers la guerre. Aujourd’hui, il semble de plus en plus que même une guerre mondiale massive soit une réponse normale à (n’importe quel) conflit pour beaucoup dans le monde. Les trompettes de la guerre sonnent fort dans les annonces récentes des membres de l’OTAN et de l’Union européenne visant à remilitariser l’Europe. L’actuel gouvernement allemand a ouvert la voie à cet égard, en proposant le budget militaire le plus ambitieux à ce jour, soit 100 milliards d’euros en 2022 (trois fois plus que le budget russe). Cette injection de liquidités dans l’industrie d’armement et l’armée va transformer l’Allemagne en une force d’attaque militaire dans les années à venir. Et plus d’armes et d’appels à l’armement font sauter de nombreux bouchons de champagne dans les industries pétrolières et militaires, effaçant le sens commun qui voulait que la militarisation n’ait jamais – et ne puisse jamais – apporter une plus grande stabilité ou prévenir la guerre.

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Comment alors répondre aux guerres oligarchiques et géopolitiques d’aujourd’hui et de demain ? La réponse à court terme est que les forces russes doivent immédiatement arrêter cette guerre et que toutes les soi-disant superpuissances doivent s’asseoir à une table et discuter de l’avenir de l’Ukraine. En attendant, et dans le cadre d’une réponse à plus long terme, il est de plus en plus nécessaire de développer une position pour un avenir démilitarisé, qui ne fasse pas référence à des approches de race et de nation, mais qui soit plutôt l’expression consciente de classe et anti-impérialiste, et une fois de plus non-alignée. On ne devrait certainement pas applaudir le militarisme croissant des dirigeants du monde entier, en particulier de l’UE, mais plutôt applaudir la démilitarisation et la fin de la course aux armements. Pour penser à la fin de cette guerre et des guerres futures, il faut repenser théoriquement et politiquement le paradigme de la paix. Si, comme l’a écrit une fois Etienne Balibar, toute la philosophie politique occidentale a été profondément ancrée dans la guerre, il est temps de la réorienter vers le paradigme de la paix. Les mesures concrètes immédiates qui peuvent être prises maintenant sont de promouvoir une politique de neutralité active qui va au-delà des blocs militaires et des superpuissances, et de repenser l’héritage du mouvement des non-alignés et des luttes anti-impérialistes.

Je voudrais conclure en mettant en relief deux éléments alarmants qui sont en train de militariser la situation par le biais l’imposition de politiques ouvertement racialisées et nationalistes, et qui représentent un danger croissant pour la réalité européenne. Ils présentent deux tendances inquiétantes qui évoquent un double standard de moralisation donnant la priorité à l’espace civilisationnel occidental « blanc » et répétant que certaines vies comptent plus que d’autres.

Tout d’abord, il est tragique de constater que l’Union européenne accepte tout simplement et soudainement les réfugié·e·s. Des politiciens ouvertement conservateurs considèrent ce changement comme « naturel », affirmant que ces réfugiés actuels en provenance d’Ukraine viennent du même espace « culturel » / « civilisationnel ». Ils continuent à traiter très différemment tous ceux qui viennent d’ailleurs, les accueillant avec des garde-côtes armés, des fils barbelés, des matraques, et la torture aux frontières de Schengen.

Il convient également de noter qu’avant 2022, lors des guerres auxquelles certains gouvernements européens ont ouvertement participé (notamment en Afghanistan), le climat était ouvertement anti-réfugiés et anti-migrants. Ceux qui venaient dans la sacrée Union européenne étaient jugés suspects, une menace potentielle pour notre culture, par certains ils étaient même considérés comme des extrémistes et des terroristes musulmans. L’ensemble des politiques et de la rhétorique anti-immigrés et anti-réfugiés ont fait de l’UE un espace beaucoup plus à droite et conservateur, permettant aux Orban et aux Jansa [Janez Jansa, président de Slovénie] d’Europe de devenir instantanément pro-réfugiés, d’ouvrir leurs frontières et de financer des infrastructures déchirées par la guerre lorsque les réfugiés viennent d’Europe.

Il va sans dire que la solidarité ne peut pas être réservée à un seul « type » de réfugiés, qui convient mieux à notre propre différenciation civilisationnelle « Blut und Boden ». Ainsi, pour la gauche, tant sur le terrain que dans les parlements, il est temps de faire pression en faveur d’une approche plus accueillante pour les réfugiés et les migrants, d’apporter la même aide à ceux du Yémen, de la Somalie, de l’Afghanistan et de la Syrie qu’à ceux de l’Ukraine, et de déployer les mêmes efforts pour mettre fin aux guerres dans ces pays.

Ensuite, les sanctions ont cette fois été mises en œuvre de manière accélérée, en ciblant l’industrie et même certains oligarques en Russie. Cependant, nous sommes entrés dans une ère de censure ouverte et de cancel culture d’annulation 2.0 qui vise à nettoyer/purifier tout espace de ses liens avec l’ennemi ou de son héritage. Mais la façon dont cet ennemi est défini est une question importante. Ce n’est un secret pour personne que des sanctions supplémentaires et intensifiées visant à exclure quiconque sur la base de son passeport auront un effet négatif. Elles donneront peut-être une impulsion durable à la militarisation et à la déstabilisation de nos sociétés. Plutôt que d’arrêter la guerre, ces « annulations » et sanctions renforcent actuellement la main autoritaire de Poutine, lui prêtant main-forte dans l’unification et l’auto-victimisation de la « Russie ». Elles affectent négativement beaucoup de ceux qui étaient auparavant silencieusement ou ouvertement critiques à son égard. Où tracer la ligne entre ceux qui sont « pour nous » et « contre nous » (certains espaces culturels ont même supprimé de leur répertoire des pièces de théâtre et des concerts d’artistes russes, tels que Tchaïkovski et Dostoïevski). C’est la logique racialisée de l’ami/ennemi telle qu’élaborée par le penseur nazi Carl Schmitt.

Sommes-nous prêts à imposer de telles normes, mais entachées d’une dimension de classe, à TOUS les oligarques et aussi à TOUS les dirigeants du « monde libre » – leurs partisans, et leurs guerres et occupations aussi, pratiquant de la sorte une approche de classe et les positions anti-impérialistes ? La liste de leurs crimes de guerre est continue et sans fin. Le moment est venu de décider si nous imposons une éthique égale (je suggère qu’elle soit ensuite précisée par la phrase ci-dessus), ou si nous en suivons simplement une [éthique] qui soit en accord avec tel ou tel hegemon / puissance impériale ? Dans le dernier cas, la reproduction des guerres futures est garantie, dans le premier, nous avons une chance d’articuler une vision d’un monde qui se fonde sur un horizon de démilitarisation.

Tout le monde a droit à l’indignation morale, il est normal de ressentir de la colère, de l’anxiété, de la peur, voire du désespoir face à cette guerre horrible menée par les autorités russes et aux effets qu’elle pourrait entraîner. Dans le même temps, la gauche critique ne doit pas s’aligner sur les efforts faciles visant à unifier l’Europe sur la base d’un consensus moral et racial libéral-conservateur. La guerre hégémonise le plus souvent le discours idéologique et le fait pencher vers la droite. Il ne sert à rien de laisser le terrain à la consolidation d’un strict cadre national/racialisé. Nous devons participer à la solidarité avec les opprimé·e·s, organiser des campagnes anti-guerre et trouver des moyens de nous soutenir mutuellement au-delà des drapeaux nationaux. S’organiser réellement pour une paix future signifie relier la démilitarisation aux questions d’écologie et de justice sociale.

Gal Kirn (Ljubljana, Slovénie)

Gal Kirn est chercheur associé à l’Université de Ljubljana, en Slovénie, où il dirige un projet de recherche sur la transition post-yougoslave. Il fait également partie du groupe de recherche international Résistances partisanes (Université de Grenoble), et est membre d’un parti de gauche (Levica) en Slovénie.

Article publié sur le site Left East, le 10 mars 2022 ; traduction rédaction A l’Encontre

http://alencontre.org/europe/russie/russie-ukraine-contre-la-guerre-en-ukraine-et-le-nouvel-imperialisme-une-lettre-de-solidarite-avec-les-opprime·e·s.html

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« Ni avec la Russie, ni avec l’OTAN » et « pas d’armes pour l’Ukraine » : deux slogans erronés et contre-productifs

Dans ses prises de position sur la guerre en cours, la gauche italienne et la majeure partie de la gauche internationale s’est pour l’essentiel limitée à ces deux mots-d’ordre. Si le second dénie aux Ukrainiens sous les bombes la solidarité la plus urgente, le premier est basé sur une argumentation réticente et privée de substance, comme entreprend de l’exposer le présent article. Par ces deux prises de position, entre autres choses, la gauche mine les bases d’une possible lutte efficace contre l’OTAN elle-même, et en général contre le capitalisme occidental.

Deux semaines après le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la gauche italienne a donc muri ces deux positions qui dans l’ensemble dominent complètement les analyses, déclarations et slogans (le terme générique « gauche » exclut ici le PD et ses satellites, ainsi que les staliniens et parastaliniens, il inclut les anarchistes). Ces deux positions sont, en substance : « Non aux fournitures d’armes à l’Ukraine », « Ni avec la Russie, ni avec l’OTAN ». Toutes deux sont profondément erronées et ont des effets délétères pour les groupes qui les soutiennent, et pour la résistance ukrainienne. Le premier est réfutable par quelques simples constatations, le second, de nature profondément ambiguë au-delà de sa simple formulation, nécessite une analyse plus complexe. Au plan international, contrairement à l’Italie, il y a des positions diverses, bien que dans l’ensemble minoritaires. En Ukraine et en Russie, de de telles positions sont pratiquement inexistantes.

« Non aux fournitures d’armes à l’Ukraine. »

Au moment où une superpuissance militaire et nucléaire agresse délibérément par les armes un pays infiniment plus faible militairement, assiégeant les centres urbains soumis aux bombardements destructifs, ce slogan sonne tout simplement comme absurde. Absurdité renforcée par le fait que l’héroïque opposition ukrainienne, militaire et civile, s’avère avoir pour effet d’alimenter une résistance qui, dans le contexte mondial sur lequel on reviendra, est aussi une résistance en notre nom. Elle ne peut exister sans armes défensives, qui sont en train d’être détruites progressivement : systèmes antichars et antiaériens portables à courte portée, munitions, dispositifs de reconnaissance, et, de plus, avions capables de fournir un contrepoids minimum à la supériorité aérienne russe totalement écrasante. Qui adhère à la position « pas de fournitures d’armes » ne dit pas quelles en sont les résultats concrets. Deux possibilités. Soit une destruction quasi-totale de l’Ukraine et son occupation par la Russie, soit une solution diplomatique qui s’imposera, avec l’Ukraine à court d’armes, au moment qui conviendra à la Russie et le pays à moitié détruit (ce qui est déjà amplement le cas dans les régions vitales), le livrant à Poutine. Ce type de solution diplomatique, qui peut être mis au point entièrement à Moscou, requerra l’intervention de tiers pour être sanctionnée, compromettant encore davantage la survie ultérieure des Ukrainiens : des États mus par leurs intérêts, ou des organisations internationales qu’ils contrôlent, manœuvrant conflictuellement à l’interne pour les promouvoir. Pour des raisons évidentes cette position creuse un fossé profond et avec le peuple ukrainien bombardé luttant pour sa survie, et avec ceux qui en Russie luttent contre le chauvinisme et le militarisme dans l’espoir de leur défaite. Voila qui fait peser une hypothèque énorme sur les futures luttes de solidarité pour la paix, impliquant nécessairement une victoire totale ou généralisée de Poutine, annonciatrice de nouvelles guerres, au vu de son projet de recréer un empire centré sur la Russie aux dépens des autres peuples. Pour toutes ces raisons concrètes, non seulement cette position est erronée, mais elle doit être inversée. Si le gouvernement italien n’avait pas décidé de le faire, la gauche aurait dû mobiliser pour exiger la fourniture immédiate d’armes, et a perdu l’occasion de le faire tout de suite, de sa propre initiative, quand le gouvernement Draghi hésitait, vu les liens économiques importants entre le capitalisme italien et le capitalisme russe. L’unique finalité réelle que l’on peut discerner dans cette position est de tenir ensemble une gauche italienne affaiblie et largement privée de liens actifs avec la société. Par un slogan de saveur génériquement pacifiste, mais en réalité de contenu contraire, il est plus facile de marcher sans se remettre en question, en s’abstenant du nécessaire travail de confrontation avec le réel et en garantissant la permanence sur scène des divers mini-leaders et premières dames d’une gauche déjà plusieurs fois déconfite.

« Ni avec la Russie, ni avec l’Otan. »

Ce slogan programmatique sonne à première vue comme le summum de la position équilibrée, capable de satisfaire un large éventail de positions ; quoi de mieux pour avoir l’âme en paix que le calme de qui observe de loin, se frayant son chemin aujourd’hui comme hier, avec la conviction de ne pas être partial et d’éviter toute discussion potentiellement déstabilisante pour le statu quo à gauche ? Car enfin, qui n’est pas contre l’OTAN ? Même l’auteur de ces lignes en est ! Voila pourquoi nous entendons expliquer précisément pourquoi ce slogan est complètement erroné et contreproductif. Nous nous appuyons pour ce faire sur l’argument de base censé fonder ce slogan. On peut le résumer ainsi : « La Russie a été poussée à agir par l’extension de l’OTAN à l’Est ». Ceci est décliné de diverses manières : tels disent que la réaction de la Russie est disproportionnée, tels ne le disent pas ou l’omettent, tels mettent plus l’accent sur les aspects géopolitico-militaires, tels sur les aspects politico-sociaux, etc. Enfin, nombreux assaisonnent le tout de l’assertion que l’OTAN soutient ou alimente une vague « nazie-fasciste » en Ukraine, qui menace potentiellement la Russie. Voyons précisément en quoi ceci est erroné, consiste en un déni des faits, sur lesquels tout débat réellement utile doit s’appuyer.

« La Russie a agi (avec exagération) (aussi) parce que m’OTAN/les EU l’ont menacée en se projetant vers l’Est. » : mais un constat chronologique s’impose, la Russie a agi en février 2022, préparant son opération depuis le printemps 2021 (début du déploiement des troupes aux abords de l’Ukraine), et « théorisant » son action imminente en juillet dernier avec un long article programmatique de Poutine. En décembre 2021 ses intentions agressives, avec un nouveau rassemblement de troupes aux frontières, sont devenues encore plus évidentes et en conséquence les États-Unis ont lancé une alerte. Or on n’a vu aucune, proprement aucune, action de l’OTAN et/ou des États-Unis, durant ce délai de près d’un an, ou dans les années récentes, susceptible de constituer une menace pour la Russie. Ainsi, en juin 2021, le sommet Biden-Poutine s’est conclut à l’enseigne de la convivialité. Ainsi, à la veille de la guerre, Biden a clairement déclaré qu’une intervention limitée de Moscou en Ukraine serait tolérée. La vraie question logique qui s’impose est : pourquoi le Kremlin a-t-il agi maintenant et si massivement en l’absence de toute menace de l’OTAN ? Ceux qui soutiennent le slogan « Ni Russie ni OTAN » n’en disent pas un mot. Énorme point d’interrogation sans réponse. Mais ils nous disent que la Russie subissait une menace globale ces dernières années. Voyons cela.

L’élargissement de l’OTAN à l’Est est un processus engagé en 1997, concrétisé en 1999 avec l’adhésion des pays prévus tels que la Pologne, la République tchèque et la Hongrie, et s’est terminé dans son contenu principal par l’entrée des pays baltes, de la Slovaquie, la Bulgarie, la Roumanie et la Slovénie. Après quoi, seuls quelques processus secondaires d’adhésion ont été menés à leur terme en 2009 (Albanie et Croatie) et en 2020 (Macédoine du Nord). En pratique, un processus qui a été conclu dans sa substance il y a 18 ans. En 2008, la porte a été théoriquement ouverte à un processus analogue pour la Géorgie et l’Ukraine, mais la chose a été prestement retirée avec la guerre d’agression de la Russie contre la Géorgie. L’Ukraine a maintenu officiellement sa demande d’adhésion, principalement pour des raisons de politique intérieure, mais l’OTAN n’a aucune intention de la satisfaire et n’a jamais fait aucun pas en ce sens. Depuis on n’a eu aucune menace de type militaire ou sécuritaire, même indirecte, de la part de l’OTAN ou de l’Occident en général envers la Russie. Poutine n’a cessé de consolider son régime en toute quiétude, aux niveaux interne, militaire et internationaux. Il a conduit intensivement et de manière profitable des accords commerciaux avec pratiquement tous les pays de l’OTAN, au premier rang desquels l’Italie (des géants étatiques Eni et Enel, jusqu’aux financiers Generali et Unicredit, en passant par de nombreuses autres sociétés), et les États-Unis, d’Exxon à … Donald Trump. Sans ces rapports d’affaire amicaux et pluridécennaux avec les capitalistes (d’État ou liés étroitement aux États), jamais Poutine n’aurait pu accumuler les moyens de déclencher et de mener une guerre comme celle en cours.

Mais ce n’est pas tout. En 2014 la Russie a annexé militairement la Crimée, du point de vue des relations entre grandes puissances un acte gravissime et sans précédent, puis elle a mené une opération sous faux drapeau détachant la moitié du Donbass de l’Ukraine, le plaçant sous son contrôle. Même devant cela la réaction de l’OTAN a été nulle en termes réels : sanctions limitées, totalement risibles et sans impact.

Surfant sur la vague d’une économie soutenue par des relations lucratives d’affaires avec les pays européens et l’OTAN, et sur l’absence de réactions à l’intervention militaire en Ukraine de 2014, la Russie est intervenue peu après de manière dévastatrice en Syrie, s’insérant de force dans l’aire militaire et diplomatique qui était depuis des décennies de la « compétence » exclusive des pays de l’OTAN. Là encore, aucune réaction de celle-ci. Puis en 2021, elle a joué le rôle clef dans l’étouffement des mobilisations de masses en Biélorussie, ramenant entièrement sous son contrôle le président Loukatchenko qui avait timidement tenté d’exercer une partielle autonomie d’action avec de petites ouvertures vers l’Europe occidentale. Poutine l’a replacé sous son contrôle et il peut utiliser maintenant ce pays comme tremplin militaire. Aucune réaction des pays de l’OTAN là non plus, pas plus que lors de l’intervention militaire pour étouffer le soulèvement au Kazakhstan en janvier de cette année, ramenant ce pays sous son contrôle militaire et géopolitique total. Et comme si ça ne suffisait pas, les derniers développements ont vu les pays de l’OTAN fort timides à la veille immédiate de la guerre, cela encore dans les premiers jours de l’agression : l’on peut supposer que si la guerre de Poutine avait triomphé comme « guerre éclair » ils seraient restés divisés et sans ripostes véritables. Encore à présent ils excluent une « No Fly Zone », mais là, nous passons déjà à l’étape de l’après-entrée en guerre.

A tout cela s’ajoute une dernière observation générale. L’élargissement de l’OTAN à plus d’une douzaine de petits pays, pour la plupart pauvres, d’Europe orientale, avec d’autres facteurs, comme le désengagement notable de ses forces principales, est allé de pair avec la réduction sensible du rôle mondial des États-Unis depuis 2007, de sa cohésion et de son efficacité.

Bref : au vu des faits, la théorie de l’OTAN qui menace la Russie et est donc coresponsable de cette guerre a la solidité du brouillard d’un jour d’automne. On serait plus près de la vérité en disant que dans la dernière décennie, les pays de l’OTAN ont déroulé un tapis rouge à Poutine, qui a pu choisir le moment de son agression.

« L’OTAN a menacé la Russie de facto en fournissant des armes à Kiev. » Les EU ont fourni à l’Ukraine durant les 10 dernières années une moyenne de 250 millions de dollars d’armements par an, chiffre qui comporte aussi les dernières subventions plus élevées lors de la montée de la menace aux frontières. Quand les partisans de l’équilibre « ni Russie ni OTAN » citent rapidement ce chiffre, ils oublient toujours un point clef : il ne s’agissait que d’armes destinées à organiser la défense, des casques et lits de camps, aux canons antichars et antiaérien de petite portée. En réalité, ces armes s’avèrent insuffisantes à présent sur le terrain.

« L’OTAN s’est étendue à l’Est, encerclant la Russie ». Nous sommes revenus ci-dessus sur le calendrier et les modalités de l’élargissement. Mais il est un autre aspect fondamental qu’une gauche qui biaise pour préserver sa quiétude évite d’affronter. Non seulement l’élargissement à l’Est de l’OTAN (qui n’est pas un encerclement, il suffit de regarder une carte), a eu lieu dans un territoire dégagé par l’implosion de la Russie suite à l’effondrement lamentable du système stalinien dont personne ne voulait plus, mais cet élargissement a été largement bien accueilli par la majorité des populations des pays de l’Est européen, dont l’expérience historique de plusieurs décennies de domination russe sous le couvert soviétique a été celle d’une oppression très pesante sur tous les plans, démocratique, national, syndical, culturel et de genre. Les chars russes sont intervenus cruellement contre les travailleurs et les partisans de la démocratie en 53 à Berlin, 56 à Budapest, 68 en Tchécoslovaquie, ont évité l’intervention directe en Pologne mais ont recouru à des intermédiaires pour réprimer les deux plus grands mouvements ouvriers depuis la seconde guerre mondiale, en 56 et en 80. Ces dernières années Poutine a œuvré à recréer ce modèle dans une version mise à jour, mais dans des grandes lignes largement similaires. Les parallèles entre ses deux interventions contre l’Ukraine (anti-Maidan en 2014 et à présent pour subjuguer un peuple voisin qui veut s’émanciper de son empire), et celles de l’époque soviétique, comme ceux entre son intervention en Syrie et celle de Brejnev en Afghanistan, sont évidents, toutes choses égales par ailleurs. Aujourd’hui, il a franchi en une semaine un saut qualitatif meurtrier menaçant l’Ukraine, les pays les plus proches, et aussi le monde entier d’un holocauste nucléaire, tant par des paroles et des actes explicites que par les assauts militaires insensés de centrales nucléaires. C’est finalement la Russie qui a créé les conditions de base d’un élargissement de l’OTAN avant qui que ce soit d’autre …

Au-delà même des aspects militaires et nucléaires, en Europe orientale, personne n’a envie de basculer du panel UE/OTAN à une étreinte russe faite d’oligarques prospérant sur une économie de rapine, incapable de progresser, imbibée de vols à main armée, d’un niveau de répression antisyndicale sans équivalent à l’ouest, de l’étouffement des libertés démocratiques, le tout aggravé des plus sinistres politiques patriarcales et homophobes. Ne pas en tenir compte, c’est la politique de l’autruche et l’inefficacité. En tenir compte ne veut pas dire qu’on soutient l’OTAN, au contraire c’est poser des bases plus solides pour créer une solidarité authentique par en bas avec les peuples d’Europe de l’Est, telle qu’elle soit effectivement capable de renverser les blocs et le militarisme. C’est là en réalité le seul moyen de lutter pleinement contre l’OTAN, pour laquelle il n’y a naturellement aucune place dans une perspective révolutionnaire. Comment serait-il possible d’instaurer cette solidarité avec un slogan aussi lointain de toute réalité dans un moment de guerre tragique, et aussi hypocrite car prononcé par des militants qui parlent depuis le confort de leurs droits garantis, loin des bombes ? Comment dialoguer sur une telle base avec la masse des travailleuses et des travailleurs ukrainiens émigrés à l’Ouest, et, à présent, avec les millions de réfugiés ? Ce n’est pas par hasard qu’aucun groupe ou militant ukrainien ou russe de quelque importance, y compris ceux qui se sont dans le passé engagés contre l’OTAN, n’a lancé un tel slogan maintenant. Mais pour une majorité de militants de gauche italiens, ce qui les intéresse n’est que de s’entretenir avec eux-mêmes. Concluons ce point avec ces mots simples mais efficaces d’Oksana Dutchak, militante féministe et socialiste ukrainienne, tirés d’une interview sur le site LeftEast :

« Est-il possible de construire une opposition contre cette guerre sans tomber dans l’alternative ou l’OTAN ou la Russie ? est-il possible de construire une initiative transnationale des femmes, des migrants et des travailleurs, qui échappe à la logique nationaliste et à la perspective géopolitique ?

J’ai eu des discussions avec des personnes de gauche d’autres pays et je suis parfois stupéfaite de voir à quel point ils ont peur de trop peu blâmer l’OTAN, cherchant toujours à ajouter à chaque phrase que « l’OTAN aussi est coupable ». Certes, l’OTAN est à blâmer jusqu’à un certain moment temporel, mais quand les bombes commencent à tomber du ciel, seule la Russie peut être blâmée pour les bombardements. Vu d’ici sur le terrain, la situation se présente autrement parce que nous voyons comment se comporte le pouvoir russe. Il n’est pas disposé à renoncer à ses plans. Nous ne pouvons vraiment pas dire « gardons la Russie et l’OTAN loin d’ici », parce que seule la Russie a envahi l’Ukraine. Parce que ce n’est pas l’OTAN qui bombarde les villes, c’est assez évident.

Nous ne pouvons pas dire : nous ne prenons pas partie. Vous ne pouvez éviter de prendre parti, surtout si vous êtes ici. Je ne conseille à personne de gauche des pays d’Europe de l’Ouest ou de l’Est de venir nous dire qu’il ne faut pas prendre parti. Ne pas prendre parti c’est se laver les mains. (…)

Certaines personnes de gauche disent que la voie de sortie est de négocier et de s’entendre sur la neutralité de l’Ukraine. Il m’est difficile de me contenir à ce sujet. Cette position pue le colonialisme : dénier à un pays sa souveraineté. C’est au peuple de décider ce qu’il veut et pour cela il ne doit plus y avoir de guerre. Comme je l’ai dit, cette guerre a imposé des décisions à beaucoup d’ukrainiens. Il y a ceux qui racontent qu’on peut toujours choisir. La grande majorité des ukrainiens n’a aucune possibilité de choix au moment présent.

Nous nous ne renions pas notre capacité à choisir et à agir. Ce sont certaines personnes de gauche – de la gauche occidentale – qui nous dénient cette capacité, qui nous racontent ce que les Ukrainiens devraient faire (…). »

« Les États-Unis ont alimenté le fascisme ukrainien, soutenant un bataillon. » (1) Il est vrai qu’après les évènements de Crimée et du Donbass en 2014, les États-Unis ont supervisé un bataillon ukrainien dans lequel il y avait une forte présence de fascistes, et ceci doit être clairement dénoncé. Mais il est hypocrite et grotesque aujourd’hui de s’arrêter là sans continuer le propos. Car la suite est que la Russie a employé de manière massive et cruelle les nazifascistes et les racistes pour son « golpe » dans le Donbass en 2014, les mettant à la tête des opérations puis des républiques fantoches. A quoi il faut ajouter que Poutine depuis longtemps est un ultra-réactionnaire qui se sert de fascistes en Russie, y compris pour tuer des militants. Et qu’il est une référence et souvent le financier des fascistes européens. Il finance le Front national de Marine Le Pen, noue des liens étroits avec la Lega et des liens directs et indirects avec Forza Nuova et Casapound. La disproportion entre ces faits sur le « front russe » et ce fait isolé sur le front « américain » témoigne de la mauvaise foi de ceux qui font de tels « constats » à usage instrumental.

« Poutine lui-même dénonce de longue date la menace de l’OTAN sur la Russie ». C’est en partie vrai. Mais devons-nous donner foi sans critique aux paroles de l’assassin de service ? Certes, Poutine a toujours tenu l’OTAN pour un obstacle à ses visées impériales et capitalistes, mais il se moque de la paix, il fait partie des plus grands fauteurs de guerre de l’époque que nous vivons. En outre il a toujours dans ses discours eu d’autres priorités, l’OTAN et en général l’Occident n’y étant que des embellissements accessoires. Dans son long article de juillet 2021 qui a posé les « bases théoriques » pour la guerre actuelle, Poutine s’appuie essentiellement sur le droit ancestral de la Russie sur l’Ukraine et la Biélorussie, il s’appesantit sur le « peuple trinitaire » (sic) des Grands-Russes, des Petits-Russes et des Russes-blancs, il prône le retour à un empire à mi-chemin du tsarisme et du stalinisme. Il s’étale sur ces sujets sans limites, et consacre beaucoup, beaucoup plus de place à des questions telles que le Grand-Duché de Lituanie ou la chrétienté orthodoxe au XVII° siècle, qu’à une OTAN évoquée comme en passant. Idem pour ses marionnettes nazifascistes du Donbass, qui ont toujours parlé principalement de la « Novorossia », projet chauvin d’annexion de toute l’Ukraine, arborant le drapeau sudiste raciste américain. Idem de ses derniers discours, qui portent sur bien autre chose que sur la prétendue menace de l’OTAN, citée incidemment et régulièrement en dernier lieu à des fins manifestes de propagande. D’ailleurs, si sa motivation avait été de faire reculer concrètement l’OTAN, il n’aurait pas posé un ultimatum dont il était le premier à savoir qu’il ne serait jamais accepté par son homologue américain, ni n’aurait déclenché une guerre de cette ampleur, dont le premier effet est de faire retrouver à l’OTAN et à l’Occident plus généralement, une unité qui s’étiolait. Voila un résultat dont il ne pouvait pas ne pas tenir compte, et s’il ne l’a pas fait, c’est qu’il est juste un imbécile.

Conclusion

Une bonne partie de la gauche qui soutient les slogans traités ici se réfère toujours à Marx. Mais l’approche qu’elle adopte est à l’opposé de l’approche fondamentale de Marx, lequel a clairement pris parti dans le monde dans lequel il vivait, sans faux équilibrismes, affrontant de plein pied chaque développement de la réalité et adoptant des positions dépourvues de préjugés, au meilleur sens du terme : sans jugements préconçus, mettant toujours au centre les intérêts propres des travailleurs à un moment donné, et donc aussi leurs perspectives d’avenir. Voila ce qui manque aujourd’hui, on s’agrippe à de vieux modèles répétitifs par automatisme, on prête plus attention à « maintenons notre équilibre intérieur » et à « ne nous aventurons pas en terrain difficile » qu’à construire des luttes efficaces et une solidarité effective. Le monde qui se profile exige, lui, une attitude fondamentale comme celle de Marx. Le passage à un « modèle multipolaire », qui repose inévitablement sur des actes de guerre et de concurrence sans pitié d’un nombre élevé de grandes, moyennes et petites puissances de plus en plus décomplexées en interne ou en projections externes, est un moment qui semble ne présenter que des inconvénients évidents pour le mouvement des travailleurs. Depuis 2011 nous avons une vague de mobilisations pour la démocratie sans précédents, par ses dimensions et par sa résilience. Mais ce sont des luttes très fragiles, inaptes à s’organiser adéquatement en établissant la nécessaire solidarité au niveau international. Pour murir et devenir plus fortes, elles ont besoin de temps et de conditions minima adéquates, pour qu’une classe ouvrière affaiblie depuis des décennies prenne conscience d’elle-même comme sujet. Dans ce contexte, le fait d’être rivés au certitudes du passé chez les militants de gauche qui devraient œuvrer en ce sens, et de viser avant tout à leur autoconservation (et pour les plus haut-placés leur autocélébration) est délétère, c’est un cadeau à l’adversaire, OTAN comprise. Cette dernière et les États occidentaux ne peuvent être combattus efficacement avec des slogans qui sont une insulte à nos frères d’Europe de l’Est, mais bien plutôt en pointant l’attention sur le fait que sa nature d’alliance impérialiste la rend incapable, et elle n’en sera jamais capable, de défendre quelque population que ce soit avec efficacité et à fond – comme les faits sont justement en train de le montrer !

Une bonne partie de la gauche qui soutient les slogans traités ici se réfère toujours à Marx. Mais l’approche qu’elle adopte est à l’opposé de l’approche fondamentale de Marx, lequel a clairement pris parti dans le monde dans lequel il vivait, sans faux équilibrismes, affrontant de plein pied chaque développement de la réalité et adoptant des positions dépourvues de préjugés, au meilleur sens du terme : sans jugements préconçus, mettant toujours au centre les intérêts propres des travailleurs à un moment donné, et donc aussi leurs perspectives d’avenir. Voila ce qui manque aujourd’hui, on s’agrippe à de vieux modèles répétitifs par automatisme, on prête plus attention à « maintenons notre équilibre intérieur » et à « ne nous aventurons pas en terrain difficile » qu’à construire des luttes efficaces et une solidarité effective. Le monde qui se profile exige, lui, une attitude fondamentale comme celle de Marx. Le passage à un « modèle multipolaire », qui repose inévitablement sur des actes de guerre et de concurrence sans pitié d’un nombre élevé de grandes, moyennes et petites puissances de plus en plus décomplexées en interne ou en projections externes, est un moment qui semble ne présenter que des inconvénients évidents pour le mouvement des travailleurs. Depuis 2011 nous avons une vague de mobilisations pour la démocratie sans précédents, par ses dimensions et par sa résilience. Mais ce sont des luttes très fragiles, inaptes à s’organiser adéquatement en établissant la nécessaire solidarité au niveau international. Pour murir et devenir plus fortes, elles ont besoin de temps et de conditions minima adéquates, pour qu’une classe ouvrière affaiblie depuis des décennies prenne conscience d’elle-même comme sujet. Dans ce contexte, le fait d’être rivés au certitudes du passé chez les militants de gauche qui devraient œuvrer en ce sens, et de viser avant tout à leur autoconservation (et pour les plus haut-placés leur autocélébration) est délétère, c’est un cadeau à l’adversaire, OTAN comprise. Cette dernière et les États occidentaux ne peuvent être combattus efficacement avec des slogans qui sont une insulte à nos frères d’Europe de l’Est, mais bien plutôt en pointant l’attention sur le fait que sa nature d’alliance impérialiste la rend incapable, et elle n’en sera jamais capable, de défendre quelque population que ce soit avec efficacité et à fond – comme les faits sont justement en train de le montrer !

Andrea Ferrario, 10 mars 2022

(1) NDT : il s’agit du « bataillon Azov ». Je ne pense pas qu’il ait été créé ni fortement soutenu par les États-Unis. C’est un produit local, monté par des nationalistes intégraux à la faveur de l’incapacité de l’État en crise en 2014 à faire face à la première agression massive de la Russie. Un autre bataillon de volontaires, le bataillon Donbass, nullement empreint de la même idéologie, est beaucoup plus monté en première ligne et a été décimé, lui, par l’armée russe et les nervis fascises à Ilovaïsk. En dehors des fakes, très nombreux, l’essentiel de l’imagerie sur les « nazis ukrainiens » s’est servi du décorum d’Azov, qui a dont permis une propagande néfaste à l’Ukraine. VP.

https://aplutsoc.org/2022/03/13/ni-avec-la-russie-ni-avec-lotan-et-pas-darmes-pour-lukraine-deux-slogans-errones-et-contre-productifs-andrea-ferrario/?

Né con la Russia, né con la Nato” e “Niente armi all’Ucraina”: due slogan sbagliati e controproducenti

https://crisiglobale.wordpress.com/2022/03/10/ne-con-la-russia-ne-con-la-nato-e-niente-armi-allucraina-due-slogan-sbagliati-e-controproducenti/

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Ukraine : « L’armée russe est un tigre de papier et le papier est maintenant en feu »

Cette assertion, « L’armée russe est un tigre de papier et le papier est maintenant en feu », formulée par Brett Friedman, officier de réserve du corps des Marines américain et enseignant à l’US Naval War College, ne doit pas être comprise comme la croyance béate que le « rouleau compresseur » n’aurait pas les moyens d’atteindre ses buts de guerre : l’annexion ou le démantèlement de l’Ukraine. « Les lacunes [militaires] de la Russie n’auront probablement pas d’importance à long terme. Ils ont suffisamment de capacité pour forcer brutalement cette chose », prévient Friedman.

Elle nous donne cependant une indication : l’objectif de renversement du gouvernement ukrainien grâce à une guerre éclair, qui aurait conduit l’armée russe à Kiev, n’a pas été atteint.

Si le courage et la détermination des Ukrainien·nes jouent un rôle déterminant, il convient cependant d’examiner – succinctement et avec nos faibles moyens d’analyse, tant la gauche est étrangère à la réflexion militaire depuis des lustres – quelques-uns des éléments qui ont permis cette victoire sur le blitz. Premier grain de sable qui pourrait bien coûter cher à la clique au pouvoir à Moscou.

L’éditorial de présentation du premier volume de ce livre [1] évoquait les grains de sable qui pourraient gripper la machine de guerre russe. Le 28  février, date de l’invasion, quand l’équipe d’animation des éditions Syllepse a commencé à réfléchir à cette publication, le grain de sable semblait n’être qu’une idée. Cette idée deviendrait-elle force matérielle à mesure que l’armée russe fait face à une défense dont il n’est pas inutile d’essayer de discerner comment elle agit ?

Si l’impérialisme russe a subi ce revers, c’est avant tout grâce à l’extraordinaire et inattendue résistance de l’armée ukrainienne et, plus largement, de la population ukrainienne (100 000 personnes se sont enrôlées dans les unités de défense territoriale ; ce qui ne préjuge en rien des autres formes d’implication citoyenne dans la résistance à l’invasion).

Selon le Guardian de Londres, plusieurs analystes militaires suggèrent que, mal renseigné par le FSB (ex-KGB), « le Kremlin avait une idée totalement fantasmagorique de l’accueil que ses armées recevraient » en pénétrant en Ukraine. Il est désormais connu que des prisonniers russes ont déclaré que leurs officiers leur avaient « assuré qu’ils seraient accueillis en libérateurs ». Alors que l’armée russe attendait « des fleurs et des acclamations », elle a été accueillie par « des balles et des bombes » et par des civils « essayant de bloquer les colonnes de chars en chantant l’hymne national », relève Le quotidien britannique.

Le moral bas des troupes d’invasion n’est sans doute pas étranger au relatif enlisement de la guerre éclair voulue par Poutine. Le correspondant du Guardian à Lviv note ainsi que les soldats russes ne disposaient que de trois jours de ration et que le carburant est venu à manquer.

Interrogé par Vox, Henrik Paulson, professeur à l’école de guerre de Stockholm, est persuadé que le Kremlin pensait « atteindre Kiev en 48 heures ». Par conséquent, écrit-il, « la plupart de ses décisions ont été façonnées par ce choix stratégique, lui-même façonné par des préjugés » : l’armée ukrainienne ne combattrait pas et s’effondrerait rapidement. Dans un tel conflit, note le spécialiste suédois, « la doctrine militaire traditionnelle exige l’emploi intensif de ce qu’on appelle les “armes combinées” […] comme les chars, l’infanterie et l’aviation, déployées simultanément et de manière complémentaire ». Cela n’a pas été le cas : c’est « un choix tactique qui a du sens si vous pensez ne rencontrer qu’une résistance symbolique… »

Interrogé par Le Monde, le chef d’état-major de l’armée française confirme les « problèmes de combativité » rencontrés par l’armée d’invasion et indique que la durée imprévue de l’offensive va contraindre le commandement russe à « engager le deuxième échelon » de ses forces, ce qui n’était certainement pas prévu. Ce qui pose, on le sait, d’immenses problèmes de logistiques.

Les commentateurs évoquent désormais un scénario « à la Grozny » : bombardements massifs et siège des grandes villes, avec leurs corollaires : coupure de l’approvisionnement en eau, en électricité, en nourriture, combats de rues. Selon un analyste de l’Institute for the Study of War, Poutine n’a pas souhaité mettre en œuvre d’emblée un tel scénario, car il était en contradiction avec son « récit selon lequel il ne s’agissait pas d’une véritable guerre ».

Pour nous en tenir à cette première phase de la guerre, le Washington Post estime que les forces armées ukrainiennes sont engagées dans une stratégie « asymétrique » visant à briser les attaques russes. L’armée russe ayant, malgré l’imposante disparité des forces en présence, « de nombreuses cibles statiques », notamment à cause des problèmes logistiques : « C’est de l’or en barre pour une force harcelant l’ennemi », déclare un analyste militaire dans le quotidien de Washington.

« L’attaque des lignes de soutien russes », déclare un ancien ministre de la défense ukrainien, est stratégiquement « importante pour réduire la supériorité de la Russie ». Les convois logistiques russes, relève-t-il, « sont répartis sur une vaste zone sur plusieurs fronts ». De plus, à cause de l’hiver, les moteurs tournent, y compris à l’arrêt ; ainsi ils sont préservés du froid et maintiennent un peu de chaleur pour les soldats. Cela fait des approvisionnements en carburant « un énorme défi ». Consigne a donc été donnée aux unités de l’armée ukrainienne, défense territoriale comprise, de ne pas s’attaquer directement aux blindés – une mission remplie par les drones fournis par la Turquie – mais aux véhicules de transport (essence, ravitaillement, munitions…) non blindés, « et souvent conduits par des soldats russes mal entraînés ».

Selon le président du Center for Defence Strategies, c’est en bloquant les routes et en immobilisant ainsi les chars et l’artillerie motorisée que l’on peut plus facilement les détruire ou les capturer. Des vidéos publiées sur les réseaux sociaux montrent effectivement des amoncellements de véhicules détruits et d’autres abandonnées par leurs conducteurs.

Équipées de missiles antichars relativement légers, des unités ukrainiennes, très mobiles, peuvent ainsi attaquer les convois avant de s’éclipser. Par parenthèse, on retrouve dans cette organisation la mise en œuvre de certaines des thèses défendues, il y a plusieurs décennies, par Guy Brossollet (Essai sur la non-bataille, Belin, 1975) et Horst Afheldt (Pour une défense non suicidaire en Europe, La Découverte, 1985). Ironie de l’histoire, selon le Washinton Post, c’est entre autres à cause de la décentralisation – qualifiée de « lacune » – de son armée que l’Ukraine ne pouvait pas être admise dans l’OTAN… Le spécialiste militaire interrogé enfonce le clou : « [Il y a] des poches de résistance disparates, vous voyez des unités au niveau du bataillon se battre de manière indépendante, ce qui est peut-être une bénédiction déguisée. Cela les aide en fait maintenant parce qu’ils ne dépendent pas de systèmes de commandement et de contrôle centralisés. »

Quant à la puissante mobilisation populaire, souligne Vox, elle s’inspire des leçons pratiques de la révolution de Maïdan en rejoignant la défense territoriale bien sûr, mais elle va bien au-delà : « Les citoyens utilisent leurs compétences et leurs contacts pour combler les lacunes du gouvernement et des forces armées et trouvent des moyens, souvent informels et improvisés, de contribuer à l’effort de guerre. » De son côté, le ministère des affaires étrangères annonce 20 000 enrôlements dans la « brigade internationale » – c’est moi qui donne délibérément ce nom – qui est en train d’être constituée.

Les responsables militaires occidentaux ne s’y trompent pas : « Il reste une inconnue : comment l’opinion russe va-t-elle réagir après dix jours d’une “opération spéciale militaire” qui ne fonctionne pas du tout comme Poutine l’avait envisagée depuis des mois ? », conclut le général Pellistrandi, rédacteur en chef de la revue Défense nationale, dans son éditorial du 5 mars. En effet, chaque jour de combat est un jour de gagné, chaque jour de combat est un grain de sable dans la machine de guerre poutinienne : l’armée russe subit des pertes (on sait le choc psychologique que constitue le rapatriement des « body bags » sur les familles de conscrits tués) et possiblement des défections. Et en s’adressant aux mères de soldats russes faits prisonniers, le gouvernement ukrainien se souvient de la puissante Union des comités de mères de soldats de Russie qui ne manquera pas d’être un grain de sable supplémentaire. Chaque jour qui passe, le régime de Poutine sera confronté à une résistance interne croissante – qu’il s’agisse de manifestations de masse contre la guerre ou d’une crise de confiance au sein de l’élite politique et militaire russe.

7  mars 2022

Patrick Silberstein

[1] https://www.syllepse.net/syllepse_images/articles/liberte—et-de–mocratie-pour-les-peuples-dukraine-1.pdf

Sources : The Guardian, Vox, The Washinton Post, Janes, The Kyiv Independent, Défense nationale, Institute for the Study of War.

http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article61564

The Russian Army is a Paper Tiger–and the Paper is Now on Fire”

http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article61487

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L’heure est à la solidarité internationale contre la guerre

(article antérieur à l’invasion de l’Ukraine par les troupes armées russes)

Le Kremlin a mobilisé l’armée russe à la frontière ukrainienne et menace d’une nouvelle intervention si les États-Unis, l’OTAN et l’Ukraine ne se plient pas à ses exigences. Nous, militants socialistes ukrainiens, lançons un appel à la gauche internationale pour qu’elle condamne les politiques impérialistes du Kremlin et fasse preuve de solidarité envers celles et ceux qui ont souffert d’une guerre qui dure depuis près de huit ans et qui risquent d’en subir une nouvelle.

La renaissance de l’impérialisme russe

Après l’effondrement de l’URSS, le monde ne comptait plus qu’une seule superpuissance : les États-Unis. Mais rien ne dure éternellement et leur hégémonie s’estompe. Les interventions étatsuniennes en Afghanistan et en Irak ont entraîné pour les populations de ces pays des guerres qui ont perduré et qui se sont soldées par la défaite des États-Unis. Malheureusement, le déclin de l’impérialisme américain ne s’est pas accompagné de la montée d’un ordre mondial plus démocratique, mais de la montée d’autres impérialismes, de mouvements fondamentalistes et nationalistes. Pour cette raison, la gauche internationaliste, qui n’a l’habitude de combattre que l’impérialisme occidental, devrait repenser sa stratégie.

L’impérialisme russe a dégénéré au cours des dernières décennies et tente aujourd’hui d’amener les États-Unis à redéfinir les sphères d’influence dans le monde. Les faits montrent que l’engagement de Poutine en faveur de la sphère d’influence de la Russie n’est pas bon pour nos nations. En ce moment, les troupes russes sont déployées au Kazakhstan dans le but d’étrangler la rébellion populaire. Ces actions ont confirmé la nature réactionnaire de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), qui a été créée non pas pour défendre les pays contre une agression extérieure, mais pour accroître l’influence du Kremlin et protéger les régimes anti-populaires des révolutions. Les troupes russes au Kazakhstan protègent également de facto les intérêts des capitalistes américains et britanniques, qui possèdent une part importante de l’industrie pétrolière et gazière au Kazakhstan.

La Russie a joué un rôle similaire contre les protestations en Biélorussie. Le Kremlin y a dépêché ses propagandistes pour remplacer les salariés des médias en grève et a annoncé la formation d’une réserve de forces de sécurité à déployer en Biélorussie. Tout comme l’empire russe était le gendarme de l’Europe au XIXe siècle, le régime de Poutine est désormais le garant de l’absence de changement social et politique dans l’espace post-soviétique – chaque mouvement social sur le territoire est contraint de réfléchir à comment ne pas devenir des subordonnés du Kremlin.

Nous rendons hommage et exprimons notre solidarité aux militants de gauche russes qui s’opposent à la politique impérialiste du Kremlin et luttent pour un changement démocratique et social dans leur pays. Seule une révolution en Russie et le renversement du régime de Poutine peuvent apporter une paix stable et garantir la sécurité à l’espace post-soviétique.

La situation dans le Donbass

Le Kremlin a accusé les autorités ukrainiennes de préparer une offensive militaire dans le Donbass, mais cela est faux. La politique du président Zelensky montre qu’après avoir tenté sans succès d’instaurer la paix après son arrivée au pouvoir, il a abandonné ses plans pour changer les choses dans le Donbass. Nous condamnons la politique néolibérale et nationaliste des autorités ukrainiennes, mais elle ne justifie pas l’agression impérialiste. La Russie accuse constamment l’Ukraine de ne pas avoir respecté la partie politique des accords de Minsk, continue elle-même les violations du volet sécurité de l’accord. Le dernier exemple est le refus de la Russie de prolonger le mandat de l’OSCE pour la mission de surveillance de la frontière russo-ukrainienne, bien que cela soit prévu au paragraphe 4 du Protocole de Minsk. Du côté des républiques autoproclamées contrôlées par le Kremlin, les restrictions à la liberté de mouvement des représentants de la mission de l’OSCE vers la ligne de désengagement ont été systématiquement plus nombreuses, Cependant, malgré les obstacles, l’OSCE a documenté ces dernières années deux fois plus de violations des conditions de retrait des équipements militaires importants des lignes de front par la « république populaire de Donetsk » et la « république populaire de Lougansk » elles-mêmes. Mais le point principal est la clause 10 de Minsk-2, qui n’a jamais été appliquée : « Retrait de toutes les formations militaires étrangères, de tous les équipements militaires et de tous les mercenaires du territoire de l’Ukraine, sous la supervision de l’OSCE. Dissolution de tous les groupes illégaux ».

Contrairement aux mythes populaires de certains partis de gauche occidentaux, le régime de la « république populaire de Donetsk » et de la « république populaire de Lougansk » n’est pas le résultat de la volonté populaire. Les dirigeants de ces « républiques » sont intégrés dans les rangs de l’élite dirigeante de la Russie et sont devenus les porte-paroles des oligarques moscovites les plus agressifs du Kremlin. Dans les « républiques » elles-mêmes, toute activité politique d’opposition, même la plus loyale aux autorités russes, est réprimée.

En ce moment, les territoires de ces « républiques » sont en train de se désindustrialiser rapidement. Les infrastructures s’effondrent, les réseaux de transport public sont démantelés dans les villes. Même pour les entreprises dont les produits sont exportés par le biais de la Fédération de Russie, d’énormes arriérés de salaires sont devenus la norme. Les manifestations ouvrières se sont terminées par l’expulsion des militants et l’introduction dans des dispositifs militarisés.

En outre, le Donbass est déjà devenu une zone de catastrophe écologique. De nombreuses mines ferment sans mesures de conservation appropriées, ce qui entraîne la contamination de l’eau potable. Selon les estimations des Nations unies, le Donbass, qui est la partie la plus peuplée de l’Ukraine, est le territoire le plus sacrifié au monde.

Que faire ?

Le Kremlin nie désormais la participation de l’Ukraine et la possibilité de pourparlers directs entre la Russie et l’Ukraine et veut tout négocier avec les États-Unis. Toutefois, les décisions relatives à la résolution du conflit doivent tenir compte de l’avis des personnes dont la vie sera affectée par le conflit et la manière dont il sera résolu. L’Ukraine ne doit pas devenir une monnaie d’échange dans les relations entre les deux puissances impérialistes.

Nous voulons une Ukraine pacifique et neutre, mais pour cela le Kremlin doit cesser sa politique impérialiste agressive, et l’Ukraine doit recevoir des garanties de sécurité plus sérieuses que le mémorandum de Budapest, qui a été piétiné à la hâte par la Fédération de Russie en 2014.

Si nous ne nous faisons aucune illusion sur les politiques des gouvernements occidentaux, qui servent le grand capital et leurs propres objectifs, nous pensons que les intérêts des travailleurs ukrainiens ne pourront être pris en compte que sous la pression des mouvements progressistes et des communautés de ces pays.

Avant tout, il faut mettre fin immédiatement aux combats dans le Donbass et aux éventuelles provocations sur la ligne de séparation, qui pourraient servir de prétexte à une nouvelle intervention. La première étape devrait donc être le déploiement d’un contingent de maintien de la paix des Nations unies dans le Donbass. Nous sommes conscients des problèmes que posent les missions de maintien de la paix existantes et nous nous souvenons que, dans certains cas, les « casques bleus » n’ont pas empêché les violences de masse. Mais dans les circonstances ukrainiennes actuelles, c’est une étape forcée nécessaire.

Le règlement politique à long terme du conflit pourra se faire après que les questions de sécurité seront réglées. La cessation des hostilités devrait réduire le conflit aigu, et il sera ensuite plus facile de discuter des compromis possibles. Il est également nécessaire de préparer les conditions d’une future réintégration.

Les prochaines étapes devraient être les suivantes :

Retrait des troupes russes du Donbass. L’un des meilleurs moyens de faire pression sur les dirigeants russes serait de saisir les biens et les actifs des oligarques et des hauts fonctionnaires russes à Londres et ailleurs.

Mise en place d’un programme international pour réhabiliter la région touchée par la guerre et aider ses habitants (notamment en confisquant les biens pillés par les oligarques russes et ukrainiens).

Réexamen de la politique sociale et économique proposée à l’Ukraine par l’Occident : au lieu des réformes néolibérales du FMI, la dette extérieure de l’Ukraine est effacée.

Une politique humanitaire plus inclusive et progressiste en Ukraine, mettant fin à l’impunité de l’ultra-droite ukrainienne et abolissant les lois de « décommunisation ».

Assurer la garantie des droits humains pour ceux qui ont vécu en « république populaire de Donetsk » et « république populaire de Lougansk », en adoptant une loi d’amnistie pour ceux qui n’ont pas commis de crimes de guerre.

La guerre dans le Donbass a coûté la vie à des milliers de personnes et en a contraint des millions d’autres à quitter leur foyer. La menace d’une intensification de la guerre pèse sur l’Ukraine comme une épée de Damoclès et sape fortement les possibilités de politique progressiste. L’avenir du mouvement socialiste en Ukraine dépend de la solidarité internationale.

Sotsyalnyï Roukh

Sotsyalnyï Roukh (Mouvement social) est une nouvelle organisation politique des travailleurs en Ukraine, qui regroupe des syndicalistes, des militant∙es issus de diverses anciennes organisations de gauche (Organisation des marxistes, organisation socialiste « Opposition de gauche », syndicat étudiant « Action directe », Alternative sociale, etc.) et d’autres, dont c’est la première expérience de militantisme politique.

https://rev.org.ua/chas-dlya-mizhnarodnoï-antivoyennoï-solidarnosti/

Traduit de l’ukrainien par JM

http://www.inprecor.fr/article-L’heure-est-à-la-solidarité-internationale-contre-la-guerre?id=2525

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Les forces russes se rapprochent de la capitale ukrainienne, après 16 jours de guerre

Les responsables ukrainiens ont déclaré que Kiev était « prête à se battre » alors que les forces russes ont repris leurs bombardements sur la capitale et que les observateurs ont mis en garde contre une « tragédie inimaginable » après plus de deux semaines de guerre.

Samedi matin 12 mars, les sirènes des raids aériens et les bombardements ont retenti au-dessus de Kiev et d’autres grandes villes ukrainiennes, alors que les responsables occidentaux de la défense avertissaient que les Russes commençaient à gagner du terrain autour de la capitale.

De fortes explosions ont été signalées samedi à Dnipro, dans l’est du pays, ainsi qu’à Mykolaiv, Nikolaev et Kropyvnytskyi.

Mais le conseiller présidentiel ukrainien Mykhailo Podolyak a déclaré que la capitale était « prête à se battre ». Il l’a qualifiée de « ville assiégée », avec des postes de contrôle préparés et des lignes d’approvisionnement en place. « Kiev tiendra jusqu’à la fin. »

Samedi, des images satellite de Maxar Technologies ont montré des maisons et des bâtiments en feu et des bataillons d’artillerie russes semblant tirer sur les villes environnantes au nord-ouest de la capitale ukrainienne, alors que les forces avancent. Le Guardian n’a pas vérifié ces images de manière indépendante.

Un haut responsable de la défense des Etats-Unis a déclaré lors d’un briefing du Pentagone vendredi : « Nous estimons que les Russes commencent à progresser sur le terrain en direction de Kiev, en particulier depuis l’est. »

Le ministère britannique de la Défense a déclaré samedi matin que « le gros des forces terrestres russes » se trouvait à environ 25 km du centre de Kiev, tandis que les villes de Kharkiv, Tchernihiv, Soumy et Marioupol restent encerclées et continuent de subir de lourds bombardements.

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Toutefois, l’Institute for the Study of War, un groupe de réflexion étatsunien, a déclaré que les opérations russes autour de Kiev « sont restées largement bloquées au cours des dernières 24 heures » pour « réapprovisionner et rééquiper les unités de la ligne de front » – une évaluation partagée par le conseiller présidentiel ukrainien Oleksiy Arestovych, qui a déclaré vendredi 11 mars que l’avancée russe avait été stoppée au cours de la dernière journée.

Volodymyr Zelensky a appelé les Ukrainiens à poursuivre le combat, mais a déclaré que les conditions de vie dans la région de Kiev s’étaient détériorées jusqu’à devenir une « catastrophe humanitaire », avec des coupures de gaz, de chauffage et d’eau. Le président ukrainien a déclaré que son pays avait atteint un « tournant stratégique » dans le conflit. « Il est impossible de dire combien de jours nous avons encore [devant nous] pour libérer la terre ukrainienne. Mais nous pouvons dire que nous le ferons », a-t-il déclaré. « Nous nous dirigeons déjà vers notre objectif, notre victoire. »

Environ deux millions de personnes   la moitié de la population de l’agglomération – ont quitté la capitale, a indiqué vendredi le maire de Kiev, Vitali Klitschko, et ceux qui restent continuent de se préparer à sa défense. « Chaque rue, chaque maison est en train d’être fortifiée », a-t-il déclaré. « Même les gens qui, dans leur vie, n’ont jamais eu l’intention de changer d’habits, sont maintenant en uniforme avec des fusils à la main. »

Les soldats ukrainiens ont décrit des combats acharnés pour le contrôle de la principale autoroute menant à la capitale, tandis que des frappes de missiles ont été signalées juste à l’extérieur des limites de la ville de Kiev vendredi.

« C’est effrayant, mais que peut-on faire ? », a déclaré Vasil Popov, un homme de 38 ans qui travaille dans le marketing. « Il n’y a pas vraiment d’endroit où courir ou se cacher. Nous vivons ici. »

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La Russie a redéployé des unités près de Kiev et a attaqué de nouveaux objectifs vendredi 11 mars

Vendredi11marsCarte

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La poursuite des bombardements et des attaques russes contre les civils dans les villes d’Ukraine a suscité des mises en garde contre une « tragédie inimaginable » et une multitude mises en garde de l’ONU, qui estime que la Russie commet des crimes de guerre.

« Nous nous dirigeons vraiment vers une tragédie inimaginable », a déclaré Stephen Cornish de Médecins sans frontières à l’Agence France-Presse, insistant sur le fait qu’« il est encore temps de l’éviter, et nous devons tout envisager pour l’éviter ».

Des centaines de milliers de civils restent pris au piège et sous le feu des tirs dans les villes ukrainiennes, mais la situation à Marioupol est particulièrement désastreuse. Dix jours après le début du siège russe, la population n’a pas accès à l’électricité ni aux réseaux de téléphonie mobile, et l’eau et la nourriture viennent à manquer. Vendredi, 7144 personnes ont été évacuées de quatre villes ukrainiennes, a déclaré Volodymyr Zelensky lors d’une allocution télévisée, soit un nombre bien inférieur à celui qui a réussi à partir au cours de chacun des deux jours précédents.

Volodymyr Zelensky a accusé la Russie de refuser de laisser sortir les gens de Marioupol et a déclaré que les institutions ukrainiennes tenteraient à nouveau d’y livrer de la nourriture et des médicaments, ce samedi.

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L’Ukraine s’est inquiétée à plusieurs reprises du fait que la Biélorussie, alliée de Moscou, qui a servi de point d’appui aux forces russes, verrait bientôt ses troupes participer à l’invasion. Le centre d’Etat ukrainien pour les communications stratégiques a déclaré que la Biélorussie pourrait lancer une invasion de l’Ukraine aujourd’hui, après une réunion à Moscou entre le président russe, Vladimir Poutine, et le dirigeant de la Biélorussie, Alexandre Loukachenko. L’Ukraine a accusé la Russie de mettre en scène des attaques aériennes « sous faux pavillon » contre la Biélorussie depuis l’Ukraine afin de fournir une excuse pour une offensive.

Vladimir Poutine et Alexandre Loukachenko ont convenu vendredi que Moscou fournirait à son petit voisin des équipements militaires et un soutien mutuel contre les sanctions occidentales, notamment sur les prix de l’énergie, a indiqué l’agence de presse officielle de Biélorussie, BelTA.

Des combattants étrangers sont déjà entrés dans le conflit ukrainien des deux côtés, mais le Kremlin a intensifié ses efforts pour faire venir des renforts de Syrie. L’armée syrienne a commencé à recruter des troupes dans ses propres rangs pour combattre aux côtés des forces russes en Ukraine, promettant des paiements de 3000 dollars par mois – une somme jusqu’à 50 fois supérieure au salaire mensuel d’un soldat syrien. Zelensky, furieux, a accusé la Russie d’engager « des meurtriers de Syrie, un pays où tout a été détruit… comme ils le font ici avec nous ».

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Alors que la guerre se poursuit, la Russie est confrontée à un réseau de sanctions de plus en plus ample. Les gouvernements occidentaux ont annoncé leur intention d’imposer des tarifs douaniers punitifs sur le commerce russe afin d’isoler davantage Moscou de l’économie mondiale. Le G7, groupe de nations riches, a déclaré qu’il retirerait à la Russie son statut de « nation la plus favorisée » en vertu des règles de l’Organisation mondiale du commerce. Le président Joe Biden a annoncé son intention d’interdire l’importation de produits de la mer, de vodka et de diamants en provenance de Russie. Le gouvernement britannique a déclaré qu’il envisageait d’interdire les exportations de produits de luxe vers la Russie.

La Deutsche Bank et Sony Pictures ont rejoint l’exode des entreprises occidentales de Russie. Dans un communiqué publié sur son site web, la Deutsche Bank a déclaré qu’elle était « en train de mettre fin à ses activités restantes en Russie » et qu’il n’y aurait « pas de nouvelles activités en Russie ». La Russie a décidé de bloquer Instagram après que sa société mère, Meta [la firme dirigée par Mark Zuckerberg], a déclaré qu’elle autoriserait les appels à la violence contre Poutine et les soldats russes [selon Reuters] impliqués dans l’invasion de l’Ukraine à apparaître sur la plateforme de médias sociaux. Les procureurs russes ont demandé que l’accès à Instagram soit bloqué et les autorités ont décidé de reconnaître Meta comme une « organisation extrémiste ».

Les Etats-Unis ont également imposé des sanctions à un groupe de l’élite russe, dont le milliardaire Viktor Vekselberg [1], trois membres de la famille du porte-parole de Poutine et des membres du parlement.

[1] Parmi ses investissements internationaux, Viktor Vekselberg était impliqué dans Sulzer, OC Oerlikon et Swiss Steel Group. Il réside à Zoug. Dès 2018, il a dû modifier ses liens avec diverses entreprises. Et se trouve sous l’effet des sanctions codécidées avec l’UE par le gouvernement helvétique. A tel point que Viktor Vekselberg a protesté contre PostFinance qui lui refusait ses services. (Réd. A l’Encontre)

Tess McClure, Peter Beaumont et Luke Harding (Lviv)

http://alencontre.org/ameriques/americnord/usa/ukraine-les-forces-russes-se-rapprochent-de-la-capitale-ukrainienne-apres-16-jours-de-guerre.html

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Une blague circulant à Moscou

Un homme vient au kiosque à journaux, prend un journal, regarde la première page et le remet en place. Le lendemain, il revient, il prend un journal, regarde la première page et le remet en place…

Ça dure pendant plusieurs jours jusqu’au moment où le kiosquier s’énerve :

« Mais pourquoi vous faites ça ? »

« Je cherche juste un avis de décès ».

« Mais la rubrique nécrologique n’est pas en première page ! »

« Oh, celui que je cherche, il y sera. »

Merci à Monolecte sur Seenthis

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L’Université Lomonossov de Moscou : Contre La Guerre

L’université d’Etat de Moscou Lomonossov (MGU) est l’université la plus prestigieuse en Russie – l’équivalent de toutes nos grandes écoles réunies en un établissement.

Rappelons que ceux qui signent cette pétition risquent au minimum l’exclusion – étudiants, enseignants et personnels administratifs. Fin des études pour les uns, chômage pour les autres, prison possible pour tous.

L’université Lomonossov de Moscou (Mgu) : Contre La Guerre

Nous, étudiants, doctorants, professeurs, personnels et diplômés de la plus ancienne université de Russie, l’université Lomonossov de Moscou, dénonçons catégoriquement la guerre que notre pays a lancée contre l’Ukraine.

La Russie et nos parents nous ont donné une éducation solide, dont la véritable valeur est de nous permettre de porter un jugement critique sur ce qui se passe autour de nous, de peser les arguments, d’écouter les opinions des uns et des autres et d’être attachés à la vérité, scientifique et humaine. Nous savons appeler les choses par leur nom et nous ne pouvons pas ne rien faire.

Les actions menées au nom de la Fédération de Russie que ses dirigeants qualifient d’« opération spéciale », c’est une guerre, et dans la situation actuelle il n’y a de place ni pour les euphémismes, ni pour les justifications. La guerre, c’est la violence, la cruauté, des morts, la perte de ses proches, l’impuissance et la peur, qu’aucun but ne justifie. La guerre, c’est la plus cruelle des déshumanisations, qui, comme nous l’avons appris sur les bancs de l’école et de l’université, ne doit pour rien au monde se répéter. Les valeurs absolues que sont la vie humaine, l’humanisme, la diplomatie et la résolution pacifique des conflits, qui nous été inculquées à l’université, ont été foulées au pied et rejetées à l’instant même où la Russie est traitreusement entrée sur le territoire de l’Ukraine. Des millions de vie d’Ukrainiens sont chaque heure en danger depuis que les armées de la Fédération de Russie ont pénétré en Ukraine.

Nous exprimons notre soutien au peuple de l’Ukraine et nous dénonçons catégoriquement la guerre que la Russie a lancée contre les Ukrainiens.

Diplômés de la plus ancienne université de Russie, nous savons que les pertes causées par six jours d’une guerre sanglante, pertes avant tout humaines mais aussi sociales, économiques, culturelles, sont irremplaçables. Nous savons aussi que la guerre est une catastrophe humaine, mais nous ne pouvons pas même imaginer combien profonde est la blessure que nous, peuple de la Russie, sommes en train d’infliger au peuple de l’Ukraine et à nous-mêmes.

Nous exigeons des dirigeants russes qu’ils cessent immédiatement les hostilités, qu’ils quittent le territoire d’un État souverain et qu’ils mettent un terme à cette guerre honteuse.

Nous demandons à tous les citoyens de Russie qui ne sont pas indifférents à son avenir de rejoindre le mouvement des partisans de la paix.

Nous sommes contre la guerre !

https://msualumniagainstwar.notion.site/0378ab0a0719486181781e8e2b360180

http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article61586

Russia: Community of Lomonosov university against the war

http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article61523

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La Russie concentre sa puissance militaire pour l’assaut de Kiev

L’accalmie opérée ces derniers jours dans la bataille pour Kiev semble toucher à sa fin.

De nouvelles indications suggèrent que la Russie se prépare à relancer une offensive massive dans la région, l’objectif principal de la guerre. 

Malgré une situation très compliquée avec plusieurs de ses principaux axes d’attaque à travers l’Ukraine, la Russie continue de lancer davantage de puissance militaire à l’ouest et à l’est de Kiev, dans l’espoir d’encercler et de pénétrer dans la ville.

Les images satellite publiées par la société américaine Maxar révèlent l’activité très récente de la Russie à proximité de l’aérodrome de Hostomel, notamment des unités blindées et de l’artillerie tractée. 

« La Russie cherche probablement à réinitialiser et à repositionner ses forces en vue d’une nouvelle activité offensive dans les jours à venir », comme l’a déclaré le ministère britannique de la Défense dans sa mise à jour des renseignements du 11 mars.

« Cela inclura probablement des opérations contre la capitale, Kiev ».

Comme le pense la communauté des experts, Kiev devrait se préparer à une défense acharnée dans un court délai, potentiellement à des tentatives russes d’imposer un blocus complet et de déclencher une catastrophe humanitaire pour forcer les dirigeants ukrainiens à conclure un accord. 

Néanmoins, comme le suggère la situation, les perspectives russes semblent également de plus en plus sombres.

Avec les tentatives ratées de la Russie de s’emparer de Kiev dans une attaque éclair, ainsi que des efforts de défense constants, la capitale a toutes les chances de broyer et de saigner à blanc les forces d’invasion dans un combat urbain féroce, précipitant effectivement une victoire stratégique sur la Russie.

Les maigres progrès de la Russie

Comme dans toutes les zones clés, telles que Mykolaiv, ou Kharkiv, ou Chernihiv, la Russie a montré très peu de progrès dans la bataille pour Kiev au cours des derniers jours. 

Au terme d’une série d’attaques féroces menées les 8 et 9 mars, la Russie a pris pied au nord-ouest de Kiev, dans les villes satellites d’Irpin, de Bucha et d’Hostomel, un carrefour clé sur la route E373, plus connue sous le nom d’autoroute de Varsovie. 

Avec la route P02 au nord, cette route est devenue la voie de passage vitale pour l’armée russe entre la zone métropolitaine de Kiev et la Biélorussie via la zone d’exclusion de Chornobyl.

Au prix d’énormes dépenses, la Russie a officiellement sécurisé ce passage pour le ravitaillement et les nouvelles troupes.

Cependant, comme le suggèrent de nombreux témoignages, l’étroit corridor est toujours sujet à des problèmes logistiques extrêmes, qui finissent par provoquer des pénuries de carburant et de nourriture parmi les forces russes qui avancent vers Kiev.

La situation du convoi militaire russe malheureux qui s’est étiré sur 64 kilomètres le long de l’autoroute au nord-ouest de Kiev est très illustrative. 

Pendant plusieurs jours, de nombreuses images satellites ont montré le convoi, essentiellement un gigantesque embouteillage, à l’arrêt, très probablement en raison d’une pénurie de carburant et du mauvais état technique des véhicules qui ont effectivement bloqué le mouvement.

Mais selon les dernières observations, le convoi géant s’est largement dispersé, probablement redistribué entre plusieurs unités russes dans la région. 

Après avoir pris pied dans certaines parties d’Hostomel, de Bucha et d’Irpin, la Russie a également fait preuve d’un succès très limité en essayant de progresser plus au sud jusqu’à la défunte route E40 reliant Kiev et Jitomyr.

Selon l’état-major ukrainien, ce groupe de forces russes est très probablement prêt à encercler partiellement Kiev par l’ouest et à couper la capitale de tout approvisionnement. 

Le 8 mars, l’Institute For the Study of War (ISW), un groupe de réflexion basé à Washington D.C., a déclaré que les forces russes se concentraient sur un éventuel assaut contre la capitale dans les 24 à 96 heures à venir.

Néanmoins, face à des progrès extrêmement lents dus à des problèmes logistiques et à une forte défense ukrainienne, la Russie a probablement décidé de faire une pause dans les opérations et a convenu de l’évacuation des civils de Bucha, Irpin, Hostomel et Borodyanka, les villes qui ont été largement ruinées.

Comme le suggère l’armée ukrainienne, les forces russes ont, à bien des égards, profité de cette accalmie pour tenter de se réarmer à l’ouest de Kiev et peut-être résoudre ses problèmes logistiques pour lancer une attaque efficace. 

Les derniers jours dans la région ont été relativement calmes, bien que les parties belligérantes aient eu des affrontements sporadiques.

La Russie investit également beaucoup d’efforts pour tenter de prendre pied à l’est de Kiev, notamment dans la région de Brovary. Mais cet axe s’est avéré encore moins fructueux.

Comme sur la rive ouest du Dnipro, la Russie est également confinée à quelques autoroutes clés menant au nord-est de la Russie et du Belarus, notamment les routes E-95, M-02 et H-07. 

Le problème pour la Russie est qu’elle n’a pas réussi jusqu’à présent à s’emparer ou à bloquer efficacement deux villes clés sur son chemin vers Kiev, à savoir Tchernihiv et Sumy, qui continuent toutes deux à opposer une résistance farouche depuis le premier jour de l’invasion et à infliger de lourdes pertes à l’ennemi. 

Sans le contrôle rigoureux de l’une ou l’autre de ces deux villes, et sans la garantie de communications sûres le long des autoroutes, gagner du terrain à l’est de Kiev est également extrêmement problématique.

En conséquence, la Russie n’a aucun contrôle effectif sur les vastes territoires situés entre Kiev et Tchernihiv ou Sumy, où les forces militaires régulières et les forces de défense territoriale ukrainiennes pratiquent la tactique du « hit-and-run ». 

« Envoyer d’importantes forces militaires à Kiev depuis le nord implique de longs convois se déplaçant le long de routes dans la forêt », explique Andriy Zagorodnyuk, ancien ministre de la défense ukrainien et président du Centre pour les stratégies de défense basé à Kiev. 

« Les convois sont très vulnérables sur un tel terrain. Il suffit de viser la tête du convoi pour que l’ensemble du convoi s’arrête. Et il est alors décimé. Et c’est ce que nous voyons en permanence. La géographie locale n’est pas du côté de l’envahisseur. »

Jour après jour, l’armée ukrainienne et les utilisateurs locaux des médias sociaux indiquent de multiples preuves de la perte massive d’effectifs et de matériel de la Russie au combat, notamment dans les régions de Tchernihiv, Sumy et Kiev. 

Parmi les derniers développements, un groupe tactique de bataillons russes, faisant partie du 6e régiment de la 90e division blindée, a subi des pertes sévères près de Brovary le 10 mars.

Selon les déclarations ukrainiennes, la plupart des membres du régiment, ainsi que le commandant, le colonel Andrey Zakharov, ont été tués au combat. Les groupes de la division qui avançaient ont dû battre en retraite et rester sur la défensive. 

La victoire ukrainienne a probablement perturbé davantage les efforts russes visant à mettre en place des conditions pour des opérations offensives à l’est de Kiev, comme l’a commenté l’Institute For the Study of War à propos de l’engagement. 

« Les opérations offensives russes épisodiques, limitées et largement infructueuses autour de Kiev confirment de plus en plus les évaluations répétées de l’état-major ukrainien selon lesquelles la Russie n’a pas la puissance de combat nécessaire près de la capitale pour lancer des opérations offensives réussies à grande échelle », a déclaré le groupe de réflexion le 10 mars.

En outre, ajoute l’ISW, les opérations de l’armée de l’air et de la défense aérienne ukrainiennes continuent d’entraver les manœuvres russes sur le terrain en limitant probablement l’appui aérien rapproché russe et en exposant également les forces mécanisées russes aux attaques aériennes et d’artillerie ukrainiennes. 

Cette suggestion a été clairement illustrée par l’engagement du 10 mars à Brovary, où le convoi blindé russe qui avançait en se concentrant sur une autoroute a été repéré puis décimé par des frappes intenses et denses de l’artillerie et des chars ukrainiens.

En outre, selon les conclusions de l’ISW, il est de plus en plus probable que les forces ukrainiennes puissent combattre les forces russes qui avancent pour prendre Kiev, jusqu’à ce qu’elles soient finalement immobilisées. 

Des problèmes de logistique et d’organisation, ainsi qu’un mauvais moral et une planification inadéquate, lui ont déjà coûté la victoire rapide qu’elle avait manifestement espérée le 24 février.

« Rien n’indique pour l’instant que l’armée russe soit en train de se réorganiser, de se réformer, de tirer des leçons ou de prendre d’autres mesures qui conduiraient à un changement soudain du rythme ou du succès de ses opérations », a également déclaré l’ISW le 10 mars.

« Bien que les disparités numériques entre la Russie et l’Ukraine laissent ouverte la possibilité que Moscou soit capable de restaurer une mobilité rapide ou une guerre urbaine efficace sur le champ de bataille. »

Succès improbable de la Russie

La communauté des experts s’accorde à dire que les chances de la Russie de s’emparer de Kiev sont pour le moins douteuses, compte tenu des résultats généraux obtenus jusqu’à présent. 

Le plan de guerre éclair qui prévoyait la capture des dirigeants ukrainiens à Kiev et la conclusion d’un accord en quelques jours a finalement échoué. La guerre se prolonge de plus en plus pour la Russie, qui a déjà utilisé près de 95% de sa puissance militaire déployée contre l’Ukraine, selon les renseignements ukrainiens et occidentaux, sans qu’aucun objectif clé ne soit atteint à ce jour.

En outre, de nombreux éléments de preuve suggèrent que les forces russes s’épuisent et épuisent leurs réserves en raison de problèmes d’organisation systémiques et de taux de pertes élevés. 

Au 11 mars, l’armée ukrainienne faisait état d’un total de plus de 12 000 morts russes depuis le 24 février, ainsi que de 353 chars, 1 165 véhicules blindés légers, 125 pièces d’artillerie, 58 systèmes de roquettes à lancement multiple, 57 avions et 83 hélicoptères. 

S’exprimant tard le 11 mars, le chef du renseignement militaire ukrainien, le général de brigade Kyrylo Budanov, a déclaré que depuis le 24 février, la Russie avait rendu 18 groupes tactiques de bataillons (BTG) inefficaces au combat lors d’affrontements avec l’armée ukrainienne. Treize autres BTG ont été complètement détruits au combat, selon l’officiel. 

Budanov a qualifié ces pertes d’ « horribles que la Russie n’a jamais connues ». 

En général, selon les renseignements ukrainiens et occidentaux, la Russie aurait concentré un total de 120 à 125 BTG pour son action militaire de grande envergure contre l’Ukraine. 

M. Zagorodnyuk, du Center for Defense Strategies, estime que, bien que peu précis, les chiffres officiels de l’Ukraine concernant le nombre de morts russes pourraient être proches de la réalité.

Selon les estimations du groupe de réflexion, jusqu’à 45 000 militaires russes au total pourraient avoir été mis hors de combat, tués, blessés, faits prisonniers ou démoralisés, après deux semaines de combats acharnés. 

Selon l’expert, cela pourrait correspondre à un tiers du contingent militaire russe total déployé contre l’Ukraine. 

Néanmoins, toutes les sources suggèrent une concentration des forces russes près de Kiev, malgré des conditions apparemment défavorables sur le terrain. 

« L’axe de Kiev figure parmi leurs principales priorités », déclare Ruslan Leviev de la Conflict Intelligence Team, un groupe d’investigation en ligne qui vérifie l’activité militaire de la Russie. 

« Comme nous le pensons, les Russes peuvent reconnaître le fait qu’à un moment donné, ils devront chercher à discuter et proposer un accord. Ils ont donc besoin de l’effet de levier le plus fort qu’ils puissent obtenir pour les pourparlers, à savoir le siège de Kiev et une catastrophe humanitaire dans la ville. »

Selon les estimations du groupe, la Russie pourrait tenter de concentrer un total de près de 21-22 groupes tactiques de bataillons contre Kiev, dont près de 15 venant du nord-ouest. 

La force russe venant de l’est aurait pu être beaucoup plus puissante, selon le CIT, mais la résistance ukrainienne dans les régions du nord, notamment à Tchernihiv, a détourné une partie importante de la force ennemie de la capitale.

La perspective russe d’encercler Kiev ne semble pas prometteuse, étant donné la complexité de la mission, estime le groupe. Mais même en cas de succès inégal, il est peu probable que la Russie se résolve à essayer de percer les défenses de la ville. 

« Bien qu’ils aient fait de nombreuses erreurs en termes de stratégie militaire et de leadership, je pense qu’ils comprennent qu’avec leur force disponible, donner l’assaut à Kiev n’a aucun sens », déclare Leviev. 

« Cela ne sera pas couronné de succès », a-t-il ajouté. 

Il est beaucoup plus probable que les Russes tentent d’établir un blocus au milieu de bombardements incessants et de frappes aériennes. Ces tactiques visant à forcer les villes à se rendre par la terreur totale ont jusqu’à présent à peine fonctionné contre Mariopol, Sumy et surtout Kharkiv, qui poursuivent leur résistance acharnée malgré les destructions massives et les pertes de vies humaines. 

Kiev, qui est une ville très grande et bien fortifiée, est une cible incomparablement plus difficile pour un blocus russe, sans parler d’un assaut total, comme le pensent les experts. 

« Prendre Kiev d’assaut dans cette situation serait une chose stupide à faire », déclare Zagorodnyuk. 

« Mais nous les avons déjà vus faire des choses stupides – il ne faut donc pas exclure cette possibilité ».

le 12 mars 2022

Illia Ponomarenko, correspondant du Kyiv Independant

Traduction Patrick Silberstein (membre des brigades éditoriales de solidarité, éditions Syllepse).

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Liens avec d’autres textes

L’accueil citoyen des réfugié·es d’Ukraine à la gare de Berlin

https://visionscarto.net/accueil-refugies-ukraine

Alexey Sakhnin : « La victoire sur Poutine viendra de l’intérieur »

https://www.revue-ballast.fr/alexey-sakhnin-la-victoire-sur-poutine-viendra-de-linterieur/

Déclarations d’organisations ukrainiennes, russes et d’autres organisations de base sur l’invasion russe en Ukraine (en anglais)

https://newpol.org/compilation-of-statements-on-the-ukraine-crisis/

Patrick Silberstein : Nation, peuple, des questions…

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2018/07/10/nation-peuple-des-questions/

Peter Beinart : Les États-Unis soutiennent les annexions illégales par Israël et le Maroc. Pourquoi cette hypocrisie ?

https://www.aurdip.org/les-etats-unis-soutiennent-les.html

Ukraine : la France a livré des armes à la Russie jusqu’en 2020

https://disclose.ngo/fr/article/ukraine-france-a-livre-armes-russie

Nils Andersson : Il n’y a pas de bons impérialistes, il y a des impérialistes

https://blogs.mediapart.fr/nils-andersson/blog/130322/il-ny-pas-de-bons-imperialistes-il-y-des-imperialistes#_ftnref1

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Contre les mensonges de Poutine et de ses soutiens

Que s’est-il passé sur Maïdan ?

Ce qui se passe en Ukraine et particulièrement en Crimée est sans aucun doute un évènement majeur qui bouleverse la donne géo politique. Pour autant c’est une autre question qui nous intéresse ici : que s’est-il passé sur Maïdan ?

Remontons dans l’histoire afin de mieux comprendre. Avant l’an 1000, Kiev dépendait des Khasars de Crimée et au 11e siècle elle se confond avec la Russ (le pays des Ruthènes) qui deviendra la Russie. Mais l’Ukraine se revendique dans toute son l’histoire comme différente avec une langue différente (aussi différente que le français peut l’être vis-à-vis de l’italien) et, pour une bonne partie des Ukrainiens, une religion différente de l’orthodoxie : le catholicisme Uniate.

Du 14e aux 17e siècle, Kiev fait partie de l’Union de Pologne-Lituanie. Après le traité de Brest (1596), Kiev devient l’un des lieux de l’affrontement entre uniates et orthodoxes. À la suite de la révolte des Cosaques de 1648, l’Ukraine devient indépendante. La guerre avec la puissante armée polonaise devenant très difficile en 1667, les Cosaques se tournent vers une « alliance » avec le tsar et l’Ukraine sera incorporée par la suite dans l’Empire russe sous le règne de Catherine II et y restera jusqu’à la révolution d’octobre 1917. L’antisémitisme que le Tsar favorise y est forcené et souvent mené par les cosaques avec des dizaines de milliers de morts.

La guerre de 14-18 est meurtrière. Après le traité de Brest-Litovsk les allemands donnent l’indépendance au pays. Avec la révolution soviétique, les choses changent positivement pendant trois ans, ce qui a permis un développement intellectuel et culturel important. Cependant, l’URSS confisquera cette indépendance. Cette histoire est longue et complexe, en particulier avec le rôle du libertaire Nestor Makno qui a créé des zones autogérées et mériterait une étude plus serrée que le cadre de cet article. Dans les années 1930, la dékoulakisation, la collectivisation forcée et la « terreur stalinienne » se sont soldées par des millions de morts (de six à dix selon les historiens). L’invasion hitlérienne en a rajouté et le bilan est très lourd. Au lendemain de la guerre, Staline fait déporter plus de 400 000 Tatars de Crimée.

L’identité Ukrainienne s’est constituée au travers de ces luttes séculaires

La guerre de 14-18 est meurtrière. Après le traité de Brest-Litovsk les allemands donnent l’indépendance au pays. Avec la révolution soviétique, les choses changent positivement pendant trois ans, ce qui a permis un développement intellectuel et culturel important. Cependant, l’URSS confisquera cette indépendance. Cette histoire est longue et complexe, en particulier avec le rôle du libertaire Nestor Makno qui a créé des zones autogérées et mériterait une étude plus serrée que le cadre de cet article. Dans les années 1930, la dékoulakisation, la collectivisation forcée et la « terreur stalinienne » se sont soldées par des millions de morts (de six à dix selon les historiens). L’invasion hitlérienne en a rajouté et le bilan est très lourd. Au lendemain de la guerre, Staline fait déporter plus de 400 000 Tatars de Crimée.

Ce détour trop succinct par l’histoire explique une bonne part des luttes de Maïdan depuis novembre 2013. La défiance vis à vis de la Russie est patente et les pratiques politiques à base de corruption forcenée et de clientélisme sont rejetées (le mot est faible). Pour la quasi-totalité des ukrainiens, Ianoukovitch est perçu comme un véritable mafieux ce qu’il est de fait.

Fin 2013, alors qu’un accord d’association doit être signé entre l’UE et l’Ukraine, la Russie fait pression sur Kiev pour la faire changer d’avis, notamment en restreignant certains produits, en revoyant les prix du gaz et en envisageant d’imposer aux citoyens ukrainiens un passeport étranger.

En novembre 2013, Ianoukovytch décide finalement, sous la pression des russes, de refuser l’accord avec l’Union européenne et « relance un dialogue actif avec Moscou ». Ce revirement entraine d’importantes manifestations pro-européennes à Kiev rassemblant au moins 100 000 personnes, l’occupation de la place Maïdan et de la mairie, avec comme mot d’ordre la démission du président Ianoukovytch.

De novembre à mars, Maïdan est occupée et une vie s’organise.

Dans une Interview réalisée le 6 mars 2014 par Nicola Bullard et Christophe Aguiton pour le site d’Ensemble, Vasyl Cherepanin qui dirige le centre de recherche « Culture Visuelle » de Kiev et édite la version ukrainienne du magazine « Krytika politiczna » (Critiques Politiques) donne des informations qui éclairent sur la réalité de Maïdan durant cette période. Ces analyses de la société de Maïdan sont corroborées par d’autres points de vue. En particulier par celui de « Chair of Ukrainian Studies, U of Ottawa www.ukrainianstudies.uottawa.ca ».

Vasyl Cherepanin : « Culture Visuelle » a participé à Maïdan depuis décembre 2013. Nous avons aidé à organiser un programme d’éducation dans le cadre de l’université ouverte de Maïdan pour ceux qui étaient sur la place appelé « Global Protests » qui a cherché à situer l’insurrection ukrainienne dans un contexte plus large, celui des insurrections du printemps arabe, des mouvements Occupy et Indignados et des différents mouvements sociaux que le monde a connu en 2013. 

Nous avons participé également au réseau de protection des militants blessés qui étaient dans les hôpitaux et qui risquaient d’être enlevés par la police. Les groupes de gauche et les activistes ont été impliqués dans beaucoup d’activités, en particulier « SOS Maïdan », une sorte de média alternatif et d’aide juridique pour le mouvement Maïdan.

Qu’en est-il des fascistes et des néonazis Maïden et dans l’insurrection ?

VC : C’est de l’aveuglement sur ce qu’est la réalité du mouvement en Ukraine. Bien sûr, l’extrême droite était dans la mobilisation, mais c’était une vraie révolution et, dans une vraie révolution toutes les forces d’opposition sont présentes. Tout le monde était là, sauf bien sur les oligarques et la petite élite des super riches.

Il faut rappeler la séquence des évènements. « Euromaïdan » a commencé le 24 novembre 2013. Le prétexte à la mobilisation a été le refus du président de la république de signer l’accord commercial avec l’Union européenne et dans les premiers jours le mouvement était formé de journalistes et d’étudiants, ainsi que l’extrême droite qui les a rejoints dans un esprit de parasitisme.

Le parti néonazi Svoboda a été le premier parti parlementaire à rejoindre le mouvement, ce qui leur a donné une certaine visibilité. Puis, le 29 novembre, il y eu l’intervention des forces de l’ordre sur la place. Cela a élargi le mouvement et à partir de là tous les secteurs sociaux et toutes les forces politiques d’opposition ont été là. L’Euromaidan est devenu Maïdan et plus le mouvement grandissait, plus le rôle et l’influence de l’extrême droite se réduisaient. Je sais que pour certains, à gauche, il est impossible de participer à un mouvement si l’extrême droite est également présente. Mais la réalité n’est pas aussi pure que la théorie politique et, à mon avis, le rôle de la gauche est de s’engager et de participer au mouvement. Un dernier détail à propos de l’extrême droite, il y a maintenant une lutte entre le parti Svoboda et le « Secteur de Droite », un nouveau groupe politique formé par des organisations nationalistes et une partie des houligans du monde du football. L’aspect le plus important est que le moteur de Maïdan était le peuple et pas les partis ou les organisations politiques : des gens ordinaires qui sont venus sur la place et qui sont restés jusqu’à la victoire. Certains l’ont payé de leurs vies.

Et pour la gauche en Ukraine ?

VC : Il y a maintenant un nouvel espace politique dans lequel la gauche peut être plus visible et plus influente. Auparavant la vie politique était monopolisée par les néonazis et les oligarques. Cela a en partie changé. Maintenant la force active, c’est le peuple ukrainien. Maïdan a été la preuve que les masses étaient le vrai moteur du progrès et de la révolution. La gauche ne peut pas être comme elle l’était : élitiste et sectaire. Nous devons maintenant être plus inclusifs et travailler avec les larges masses. Nous avons à ouvrir nos perspectives, de les maintenir dans la réalité et nous engager dans toutes les questions sociales possibles. Plus que le contenu, la forme de notre activité est vraiment importante. Bien sûr nous devons construire de nouvelles plateformes comme des centres sociaux, et institutionnaliser quelques initiatives issues de Maïdan. Mais plus que tout, la gauche doit sortir et écouter le peuple. Toute défaite de la gauche serait une victoire pour l’extrême droite. Nous devons écouter ce que veut le peuple dit et ne pas seulement prêter attention aux idoles du passé. L’absence de pratique politique peut créer des hallucinations théoriques… »

Selon Vladimir Fišera, docteur de troisième cycle, chargé de recherche au C.N.R.S. et chargé de conférences à l’École pratique des hautes études :

« À Kiev c’est la leçon des trois mois de lutte, les gens se connaissent désormais, savent s’organiser dans l’urgence et la clandestinité et avec Internet.

Le mouvement civique ukrainien inclut une partie importante des russophones natifs. Il ne cesse de se renforcer depuis 1991 visant l’indépendance nationale et tout autant le pluralisme. 

C’est l’affirmation de valeurs d’auto expression, indépendante de l’obéissance à un État-Empire qui veut limiter la culture politique à des valeurs de survie. Y contribuent la nature pluraliste du gouvernement provisoire et en parallèle le maintien du mouvement de la Place Maïdan organisé de manière autonome et sur la base d’AG et de comités révocables, dont sont issus trois ministres. Ses diverses composantes – sociale, linguistique, religieuse, laïque – sont cimentées par l’expérience de ces 3 mois. S’y ajoutent la coordination des assemblées du peuple en province, la mobilisation d’une armée d’appelés et de volontaires, et la retenue non violente mais ferme face à l’occupation de la Crimée.

La tradition de Nestor Makhno et de son Armée Révolutionnaire des Insurgés de l’Ukraine 1918-21 qui affronta les Blancs et empêcha l’intervention étrangère et l’expansion des Bolcheviks russes, est réhabilitée. En effet cet allié de toujours de l’Armée rouge russe et libérateur de la Crimée en 1920 a vu sa commune ukrainienne anarchiste paysanne écrasée dans le sang quelques semaines plus tard par l’État bolchevik russe.

Or aujourd’hui Makhno, enterré au Père Lachaise en 1934, a en Ukraine ses statues et ses plaques, ses partisans paysans et étudiants ; ses œuvres écrites en russe sont enfin publiées en ukrainien. Son destin est bien décrit par l’historien russe Vassili Golobanov dans le premier livre qui lui soit consacré à Moscou (2013) : « il ne voulait pas être l’exécutant servile d’une volonté étrangère… Il insistait sur le principe de l’auto-organisation spontanée de la société. »

Si on fait le bilan on constate qu’au fur et à mesure des trois mois, Maïdan a « réinventé » bon nombre de structures qui étaient propres à la Commune de Paris en réussissant malgré des idéologies diverses et contradictoires (Svoboda et Démocratie) à choisir de manière autonome et sur la base d’AG et de comités révocables pour les diverses fonctions dont il avait besoin. De même les délégations qui ont eu à négocier. Tous ces choix ont été publics et quand un nouveau gouvernement a été désigné par la RADA ils ont imposé leur droit à avaliser (ou pas) les choix.

Et il est de notoriété publique qu’ils n’ont pas l’intention de changer de méthode.

https://autogestion.asso.fr/que-sest-il-passe-sur-maidan/

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En complément possible

Guerre en Ukraine : contribution SUD-Rail

Francine Sporenda : L’Ukraine sur les réseaux sociaux : EXCUSER UN AGRESSEUR

Déclaration des Zapatistes (Mexique) : Il n’y aura aucun paysage après la bataille (à propos de l’invasion de l’armée russe en Ukraine)

Rassemblements inter-associatifs sur toutes les places de France #SolidaritéUkraine

Russie. « Nous entrons dans une nouvelle réalité politique ». Entretien avec Ilya Budraitskis conduit par Amy Goodman

Nik Afanasiev : Ukraine-Pologne. Des initiatives bénévoles solidaires effectives. L’Etat : gardien de nuit estompé

Bernard Ravenel : Arrêter la guerre avec les armes de la politique

Michel Capron : Quelques éclairages historiques sur la Russie de Poutine

Pas de démocratie sans droits des peuples à disposer d’eux-mêmes

Les peuples du monde entier demandent au Fonds Monétaire International (FMI) d’annuler la dette injuste de l’Ukraine

Le Comité National de « Résister Aujourd’hui » : Le chant des partisans

FBU (syndicat des pompiers britanniques) : Invasion et guerre en Ukraine

Pour la paix en Ukraine, les raisons de se mobiliser

Ben Cramer : L’Ukraine en manque d’Europe

Réunion Solidarité Ukraine

Liens avec d’autres textes

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/03/12/ukraine-russie-mais-pas-que-13/

Pour le droit à l’autodéfense par tous les moyens nécessaires

Les Cahiers de l’antidote : Liberté et démocratie pour les peuples d’Ukraine (Volume 2)

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/03/11/pour-le-droit-a-lautodefense-par-tous-les-moyens-necessaires/

Denis Sieffert : Donner aux Ukrainiens ce qu’ils demandent

« Bilan » des manifestations en Russie

Michel Roche : La Russie de Vladimir Poutine : un régime bonapartiste

Mike Davis : Poutine, Biden, Xi… « Thanatos triomphant »

L’observatoire de la liberté de création s’oppose au boycott des artistes russes

Solidarité de la gauche avec l’Ukraine

Karine Clément : L’opposition à la guerre en Russie

Guerre en Ukraine : dix leçons de la Syrie. Exilés syriens sur la façon dont leur expérience peut éclairer la résistance à l’invasion

Gilbert Achcar : L’anti-impérialisme aujourd’hui et la guerre en Ukraine. Réponse à Stathis Kouvélakis

La Syrie, est le laboratoire de la barbarie guerrière que Vladimir Poutine perpétue aujourd’hui en Ukraine

La guerre en Ukraine vue depuis le terrain. Entretien avec Oksana Dutchak

Interview de Slavoj Žižek : « Quelle idéologie se cache derrière l’expansionnisme de Poutine ? »

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https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/03/10/ukraine-russie-mais-pas-que-12/

Étienne Balibar : « Le pacifisme n’est pas une option »

Valerie Hopkins (LVIV, Ukraine) : « Des Ukrainiens constatent que des membres de leur famille en Russie ne croient pas que c’est une guerre »

Razem quitte Progressive International et DiEM25

La Cimade : Protégeons le peuple ukrainien, défendons les droits de toutes les personnes exilées

Yassin al-Haj Saleh : Pourquoi l’Ukraine est une cause syrienne

Pavlo Lodyn : L’agression de Poutine et la menace d’une catastrophe environnementale en Europe

Amélie Poinssot : L’agression russe sur l’Ukraine, un cauchemar pour l’écologie

UPJB : Sur la guerre en Ukraine

Mouvement socialiste de Russie : Le pouvoir russe se prépare à combattre jusqu’au dernier soldat

Déclaration intersyndicale de soutien à l’Ukraine (Québec)

Sudfa : Les Soudanais-e-s dénoncent la collaboration entre Hemetti et Poutine

Collectif Pour une Syrie Libre et Démocratique : De Grozny à Kiev en passant par Alep, allons nous indéfiniment laisser Vladimir Poutine terroriser les populations qui revendiquent la liberté et la justice ?

Siné mensuel

Solidarité avec les ukrainiens et ukrainiennes

Yorgos Mitralias : Poutine : « Lénine est l’auteur de l’Ukraine d’aujourd’hui » ou comment tout ça est la faute à… Lénine et aux bolcheviks !

Crimes contre l’humanité et CPI

Liens avec autres textes

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/03/09/ukraine-russie-mais-pas-que-11/

Déclaration de fondation du Comité de solidarité avec le peuple ukrainien et avec les opposant·e·s russes à la guerre (Suisse)

Viktoriia Pihul : Les gens du monde entier demandent au FMI d’annuler la dette injuste de l’Ukraine

6 grandes ONG s’unissent face à l’ampleur des besoins humanitaires : c’est l’alliance urgences

Timothy Snyder : « Comment parler de la guerre ? » Histoire et mythe dans les écoles russes, selon « Novaya Gazeta »

Entretien avec Denys Pankratov, organisateur de l’Union des grutiers de la région de Lviv – Ukraine

L’université Lomonossov de Moscou (MGU) contre la guerre

Agression russe en Ukraine : Communiqué de l’assemblée européenne des citoyens

UJFP : Le droit international pour tous et partout, sans exception !

Liens d’initiatives de soutien à la population ukrainienne

Liens vers d’autres textes publiés dans la presse

En débat : Campisme ou anti-impérialisme. Quelques textes

Deux livres de Svetlana Alexievitch

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/03/07/ukraine-russie-mais-pas-que-10/

CGT : Douze questions sur la guerre en Ukraine Paix en Ukraine – Liberté en Russie

Maxime Combes, Amélie Canonne, Nicolas Haeringer : Quels sont les intérêts de TotalEnergies en Russie ?

Appel à l’action de la Confédération européenne des syndicats (CES) – La guerre en Ukraine doit cesser maintenant !

Roger Martelli : Dans la guerre ukrainienne, la gauche joue une part de sa survie

Lettre ouverte de géographes russes à Vladimir Poutine : « Nous voulons vivre sous un ciel pacifique »

Luke Harding (Lviv) : Des soldats russes démoralisés expriment leur colère d’avoir été « trompés » dans la guerre

Réseau des GLI : déclaration de solidarité avec le peuple ukrainien et ses organisations syndicales et contre la guerre menée par un régime autoritaire

Union Syndicale Solidaires : Stop au tri raciste des réfugié-es qui fuient les guerres !

Marc Bonhomme : Ukraine : la guerre de tous les risques de plus en plus cruelle

Israéliens solidaires de l’opposition russe à la guerre d’Ukraine

Volodymyr Artiukh : L’Ukraine – à la gauche occidentale, sur vos et sur nos erreurs

Michael Shank : Nous nous soucions davantage de l’Ukraine parce que les victimes sont blanches

Association France Palestine Solidarité : Non à l’agression de la Russie contre l’Ukraine, il faut faire respecter le droit… partout dans le monde

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/03/05/ukraine-russie-mais-pas-que-9/

Dockers néo-zélandais solidaires avec l’Ukraine

Pierre Baudet : La guerre en Ukraine menace la paix dans le monde…

L’édito de PEPS : L’Ukraine, une guerre aux multiples enjeux écologiques

Francine Sporenda : Poutinophilie : « c’est l’Otan le problème »

Richard Abernethy : Arrêtez la guerre impérialiste de la Russie contre l’Ukraine ! Solidarité avec la résistance du peuple ukrainien !

Ecrivains du monde entier solidaires avec l’Ukraine

Igor Ilyash : Quels sont la place et le rôle de la Biélorussie dans l’invasion de l’Ukraine par la Russie ?

Un appel d’un socialiste russe : Poutine intensifie la répression

Non à la guerre en Ukraine. Non à l’Otan. Contre les guerres impérialistes, femmes des peuples du monde entier Solidarité

Akram Belkaïd : Le pas de côté : Non au campisme

Québec : Déclaration intersyndicale de soutien à l’Ukraine

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/03/04/ukraine-russie-8/

Les Cahiers de l’antidote n°1 « Spécial Ukraine » : Liberté et démocratie pour les peuples d’Ukraine !

Lettre ouverte des travailleurs russes des arts et de la culture contre la guerre avec l’Ukraine

Pascal Boniface : Poutine attaque l’Ukraine et fait perdre la Russie

Yorgos Mitralias : Нет войне! Non à la guerre ! Нет войне!

Izabella Marengo et Pierre Jasmin : NON à l’invasion de l’Ukraine ! NON à l’expansion de l’OTAN

Message du président de la confédération syndicale indépendante bélarusse devant le pire

Les Russes veulent-ielles la guerre ? Réflexions depuis Moscou, le 1er jour de l’invasion de l’Ukraine

Tentons d’être à la hauteur de la résistance ukrainienne

Stefan Bekier : « Démilitariser » et «dénazifier » l’Ukraine ?!

Manifeste de la plate-forme « Arrêtons la guerre »

Déclaration intersyndicale : Non à la guerre : retrait immédiat des troupes russes, solidarité avec le peuple ukrainien

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/03/03/ukraine-russie-7/

Interview de Witalij Machinko, Syndicat de solidarité des travailleurs (Trudowa Solidarnist, Kiev)

Appel du « Center for civil liberties » Ukraine

Roane Carey : Comment la gauche devrait réagir à l’invasion de l’Ukraine par la Russie

MMF France : Non à la guerre en Ukraine, Non à Poutine ! Soutien à la démocratie ukrainienne, soutien au peuple ukrainien !

Leyla Binici, Jérôme Gleizes, Abdessalam Kleiche, Myriam Laïdouni-Denis, Didier Claude Rod : Réflexions écologistes sur l’agression de Vladimir Poutine contre l’Ukraine.

La Cimade demande une protection pour toutes les personnes qui quittent l’Ukraine

Amb el poble d’Ucraïna!

Nous, Européen·ne·s de l’Est…

Patrick Cockburn : La Blitzkrieg pré-annoncée de Poutine en échec. Un danger encore plus grand (…)

NON à la guerre en Ukraine !

Des militant·es pour la démocratie au Myanmar organisent des rassemblements pour soutenir l’Ukraine

Razem : « Chère gauche occidentale, on ne vous demande pas d’aimer l’OTAN… »

Fondation Frantz Fanon : Guerre d’agression contre l’Ukraine : qui a mis K.O le droit international ?

William Bourdon et Véronique Nahoum-Grappe : Poutine et ses sbires : un jour dans le box de la Cour Pénale Internationale ?

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/03/02/ukraine-russie-6/

Hugues Le Paige : Ukraine : pour la solidarité, contre la chasse aux sorcières

Lettre de l’Union syndicale Solidaires et de la fédération Sud-Rail

Les experts de l’ONU appellent à la fin de l’agression russe contre l’Ukraine et à la protection urgente des droits de l’homme

Russie : Contre l’impérialisme russe, ne touchez pas à l’Ukraine !

Lettre ouverte de scientifiques et journalistes scientifiques russes contre la guerre

María R. Sahuquillo : Des milliers de volontaires civils rejoignent la résistance pour repousser l’avancée des troupes de Poutine

Pierre Khalfa : De la difficulté d’une politique internationale altermondialiste

En Russie, les féministes descendent dans la rue contre la guerre de Vladimir Poutine

Mario Kessler : Les fantasmes antibolcheviques de Poutine pourraient causer sa perte

Zbigniew Marcin Kowalewski : Impérialisme russe

Solidarité avec les réfugiés ukrainiens

Nicole Roelens : La lutte internationale des femmes contre le meurtre de masse utilisé comme outil de pouvoir

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/03/01/ukraine-russie-5/

Gilbert Achcar : Invasion russe de l’Ukraine : Vladimir Poutine dans les pas de Saddam Hussein ?

Bernard Dréano : La guerre de Poutine en Ukraine, des questions et quelques réponses

David Broder : Cessez de prétendre que la gauche serait du côté de Poutine

Gilbert Achcar :Mémorandum sur une position anti-impérialiste radicale concernant la guerre en Ukraine

Déclaration commune de syndicats ukrainiens

Mykhailo Volynets : La Russie a attaqué et commencé l’invasion de l’Ukraine

Contre la guerre impériale de Poutine en Ukraine, une prise de position de la revue LeftEast

À quoi pense Vladimir Poutine ? Entretien avec Ilya Boudraitskis

Invasion russe de l’Ukraine : Vladimir Poutine dans les pas de Saddam Hussein ?

Solidarité de la communauté scientifique avec l’Ukraine

Esprit : Pour une Ukraine libre !

MAN : Pour une résistance civile non-violente en Ukraine

Attac Espagne : Non à la guerre !

Halya Coynash : Le grand rabbin d’Ukraine démolit l’excuse de Poutine pour l’invasion de la Russie  

Edo Konrad : L’invasion de la Russie devrait être un miroir pour la société israélienne

Professeurs chinois : notre attitude face à l’invasion russe de l’Ukraine

Déclaration des étudiant·es des universités de Hong Kong sur la guerre d’invasion menée par la Russie contre l’Ukraine

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/02/28/ukraine-russie-4/

Non à l’agression impérialiste de la Russie contre l’Ukraine

Déclaration du Comité exécutif du Congrès des syndicats démocratiques de Biélorussie

Danya P. :Pour le défaitisme révolutionnaire

Sotsialnyi Ruh : Arrêtez Immédiatement L’agression De Poutine !

Une déclaration du Comité national de l’OZZ Inicjatywa Pracownicza (Syndicat d’initiative des travailleurs) sur l’agression russe contre l’Ukraine

Communiqué de la Confédération du travail de Russie (KTR)

Les femmes l’exigent : Non à la guerre en Ukraine, Non à l’OTAN !

Taras Bilous :« Une lettre de Kiev à une gauche occidentale »

Stop à l’agression russe en Ukraine ! Pour une Ukraine libre et souveraine pour les travailleurs et travailleuses !

Santiago Alba Rico :« Non à la guerre ». Le sens de certains slogans face à l’invasion de l’Ukraine par le régime de Poutine ?

Vanesa Jiménez : Comme c’est triste de regarder la guerre

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/02/26/textes-sur-lukraine-3/

Déclaration commune de syndicats ukrainiens

Mykhailo Volynets : La Russie a attaqué et commencé l’invasion de l’Ukraine

Vicken Cheterian :Le long hiver qui s’annonce : la Russie envahit l’Ukraine

Plate-forme TSS : Non à la Guerre. Pour une Politique Transnationale de la Paix

Communiqué LDH : Solidarité avec le peuple ukrainien

Pjort Sauer et Andrew Roth :L’opposition s’exprime en Russie contre l’invasion de l’Ukraine. La répression poutinienne la combat

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/02/25/invasion-de-lukraine-quelques-textes/

Les dirigeants des grandes puissances jouent avec le feu

Renaud Duterme : Les leçons géopolitiques de la crise ukrainienne

Appel : Non à la guerre – Russie, bas les pattes devant l’Ukraine !

Russie-Ukraine : « Une situation pire que durant la guerre froide ». Entretien avec Ilya Boudraitskis

Ilya Matveev, Ilya Budraitskis : Les Russes ordinaires ne veulent pas de cette guerre

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/02/04/les-dirigeants-des-grandes-puissances-jouent-avec-le-feu/

Auteur : entreleslignesentrelesmots

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