« Pourquoi fait-il cela? » Chapitre 2 : Les mythes [1 à 5]

Rappel : Introduction : pourquoi-fait-il-cela-chapitre-2-les-mythes-introduction/

QUESTION No 1

Est-ce parce qu’il a été maltraité dans l’enfance ?

De nombreuses études ont examiné l’hypothèse que les hommes qui maltraitent des femmes ont souvent eux-mêmes été maltraités, et ce lien s’est avéré faible ; d’autres indicateurs concernant quels hommes auront tendance à agresser des femmes se sont révélés beaucoup plus fiables, comme nous le verrons. C’est particulièrement chez les hommes qui sont violents envers d’autres hommes que l’on trouve le plus grand nombre de victimes de maltraitance infantile – mais ce lien est bien moins présent chez les hommes qui agressent des femmes. La seule exception concerne les agresseurs dont la violence physique est particulièrement brutale ou terrorisante pour les femmes ; ceux-là présentent souvent des antécédents de maltraitance subie dans l’enfance. En d’autres termes, une enfance malheureuse ne fait pas d’un homme un agresseur, mais elle peut contribuer à rendre un agresseur particulièrement dangereux.

Si les comportements agressifs étaient le produit de blessures émotionnelles subies dans l’enfance, les agresseurs pourraient résoudre leur problème grâce à la psychothérapie. Hors, il est pratiquement inouï de voir un agresseur modifier de façon véritable et durable son schéma d’agressivité au sortir d’une thérapie. (Au chapitre 14, nous examinerons les différences entre la psychothérapie et un programme spécialisé pour agresseurs, car cette seconde option donne parfois de bons résultats). Un tel programme peut l’amener à résoudre d’autres difficultés affectives; l’agresseur peut y trouver une meilleure connaissance de soi; cependant son comportement demeurera inchangé. En fait, on voit souvent ce comportement s’aggraver puisque l’agresseur trouve dans le programme de nouveaux alibis pour excuser son comportement, avec des arguments plus élaborés pour prouver que sa partenaire souffre d’instabilité mentale et des façons plus créatives de la culpabiliser pour la détresse émotionnelle qu’il dit ressentir. Les hommes agresseurs maîtrisent souvent l’art de se faire plaindre, et savent que des récits d’enfance malheureuse sont une des manières les plus efficaces de susciter la compassion.

Pour certains agresseurs, le fait de blâmer une enfance malheureuse présente un attrait supplémentaire : en ce concentrant sur les mauvais agissements prêtés à sa mère, il arrive à blâmer une femme pour sa propre maltraitance des femmes. Cette approche peut également parler à la victime de violence en « expliquant » les gestes de son agresseur et en lui fournissant quelqu’un contre qui détourner en toute sécurité son ressentiment – puisqu’exprimer sa colère à l’égard de l’agresseur se solde toujours par une répression brutale. Un vaste secteur de la société, dont le champ de la psychologie en particulier, emboîte souvent le pas à cette interprétation, plutôt que de prêter attention aux problèmes ardus que suscite la violence conjugale. La maltraitance de femmes par des hommes est tellement répandue qu’elle suscite une foule de questions gênantes sur les hommes et la masculinité, à moins que l’on puisse blâmer une femme pour ce qui lui arrive. Il semble apparemment plus facile de blâmer la mère de l’agresseur.

Mes clients habitués à suivre des thérapies personnelles ou des programmes de désintoxication parlent parfois comme des thérapeutes – et certains d’entre eux en sont. Ils adoptent des clichés de psychologie populaire ou tiennent des propos théoriques. J’ai eu un client qui essayait de m’attirer dans des débats intellectuels avec des commentaires du genre, « Eh bien, il est clair que votre groupe se conforme un modèle cognitif-comportemental, qui a démontré ses limites en rapport à un problème aussi profond que le mien. » Un agresseur qui maîtrise le vocabulaire des émotions peut amener sa partenaire à avoir l’impression de perdre la carte en faisant de chaque différend entre eux une session de thérapie, où il passe chacune des réactions de sa conjointe sous un microscope et s’approprie le rôle de l’aidant. Il lui explique, par exemple, les problèmes émotionnels qu’elle doit résoudre, ou analyse ses raisons de croire « à tort » qu’il la maltraite.

Un homme violent peut plaider une enfance malheureuse quand il découvre qu’elle peut l’aider à échapper à ses responsabilités. Le bulletin de l’Association nationale des procureurs généraux étasuniens a publié une étude révélatrice au sujet d’un autre groupe d’hommes au comportement destructeur : les pédocriminels. Cette étude a demandé à chaque sujet s’il avait subi des agressions sexuelles durant son enfance ; 67% ont répondu par l’affirmative. Le chercheur leur indiqua alors qu’il allait les brancher sur un appareil détecteur de mensonge et leur poser de nouveau la question. Les réponses affirmatives tombèrent subitement à 29%. En d’autres mots, les agresseurs de tout genre sont habituellement conscients de l’avantage qu’ils peuvent tirer en déclarant « J’agresse car j’ai moi-même été agressé ».

Bien que l’agresseur typique travaille à conserver une image publique positive, certaines femmes sont aux prises avec des agresseurs désagréables et menaçants envers tout le monde. Qu’en est-il de ces hommes ? Leurs problèmes tiennent-ils à une maltraitance subie chez leurs parents ? La réponse est à la fois oui et non; cela dépend de quel problème on parle exactement. L’hostilité d’un tel homme à l’égard du genre humain en général peut venir d’une cruauté subie dans l’enfance, mais il maltraite les femmes à cause de son problème personnel d’agression. Les deux problèmes sont liés mais distincts.

Je ne dis pas que la souffrance liée à une enfance malheureuse ne doit pas susciter votre empathie. Un agresseur mérite la même compassion qu’un homme non violent. Mais un homme non violent n’utilise pas son passé comme une excuse pour vous maltraiter. Ressentir de l’empathie pour votre partenaire peut s’avérer un piège, destiné à vous culpabiliser de résister à ses mauvais traitements.

Il m’est arrivé de répondre à un client, « Si vous êtes si conscient des émotions liées à votre enfance malheureuse, vous devriez savoir comment on ressent la violence. Vous devriez vous souvenir à quel point il était blessant de vous sentir rabaissé, terrifié, de vous faire dire que vous étiez responsable de la violence que vous subissiez. Après avoir vécu cela, vous devriez être moins porté à maltraiter votre partenaire. » Une fois cet argument entendu, l’homme arrête généralement de mentionner son enfance effroyable; il n’utilise cet argument que si c’est une excuse pour rester tel qu’il est, pas si cela devient une raison de changer.

MYTHE No 2

Sa partenaire précédente l’a terriblement maltraité, et aujourd’hui il a un problème avec les femmes. LUI est un homme très bien ; c’est cette salope qui l’a rendu comme ça.

Comme nous l’avons vu avec Fran à la fin du chapitre 1, les récits de destruction émotionnelle par une ancienne épouse ou copine ont un puissant impact sur leur partenaire actuelle. Dans la version la plus courante, l’homme raconte comment son ex lui a brisé le cœur en le trompant, parfois avec plusieurs hommes. Si vous lui demandez comment il s’en est rendu compte, il dira que tout le monde le savait ou qu’un ami l’a prévenu. Il pourrait aussi dire « je l’ai prise sur le fait » mais si vous insistez pour savoir ce qu’il a vu réellement, il apparaît qu’il n’a rien vu du tout, ou simplement qu’il l’a vue parler à un type ou partager sa voiture un soir, « alors j’ai tout compris ».

Il peut décrire d’autres blessures reçues d’une partenaire précédente : elle essayait de le contrôler, elle ne lui laissait pas de liberté, elle voulait l’avoir à son service, elle a tourné leurs enfants contre lui ; elle l’a même « fait arrêter » pour se venger. Ce qu’il décrit ainsi est souvent son propre comportement, mais il l’attribue à sa conjointe afin d’apparaître comme la victime. Il gagne ainsi la sympathie de sa nouvelle partenaire, d’autant plus que beaucoup de femmes, sachant malheureusement ce que c’est d’être violentée, se reconnaissent dans cette détresse.

L’homme violent ou dominateur peut ainsi tirer une large palette d’excuses de ses relations passées. Cela lui permet de contrôler les amitiés de sa partenaire actuelle, ou de l’accuser d’infidélité : « Mon ex m’a tellement fait souffrir en me trompant constamment que c’est pour ça que je suis jaloux et que je ne te fais pas confiance ». Il se permet d’exploser de colère lorsqu’elle lui demande de nettoyer derrière lui : « Mon ex contrôlait chacun de mes mouvements, du coup ça me rend furieux quand j’ai l’impression que tu me dis ce que je dois faire. » Il peut aussi voir d’autres femmes ou entretenir d’autres liaisons : « J’ai tellement souffert la dernière fois que j’ai maintenant peur de m’engager; c’est pourquoi je préfère continuer à voir d’autres partenaires. » Il peut ainsi trouver une excuse pour n’importe quelle conduite dominatrice.

Je recommande en général d’appliquer le principe suivant à tout ce que peut dire un homme violent sur les femmes de son passé :

Si c’est une excuse pour vous maltraiter, c’est du bidon.

Un homme qui a réellement été maltraité dans une précédente relation avec une femme n’utilise pas cette expérience pour se déresponsabiliser des blessures qu’il cause à une autre.

Envisagez l’inverse : avez-vous déjà entendu une femme déclarer que la raison pour laquelle elle maltraite son conjoint est qu’elle a elle-même été maltraitée par un homme ? Je n’ai jamais entendu cette excuse en 15 ans de travail sur les violences conjugales. Bien sûr, j’ai rencontré des femmes ayant des difficultés à retrouver confiance après avoir quitté un agresseur, mais la distinction est ici cruciale : leur vécu expliquait ce qu’elles ressentaient, mais ne constituait pas une excuse. Ce principe vaut également pour les hommes.

Lorsqu’un de mes clients se plaint d’une relation précédente pour justifier son comportement cruel ou contrôlant, je rétorque avec plusieurs questions : « Votre ex a-t-elle déjà exprimé qu’elle se sentait contrôlée ou intimidée par vous ? Qu’elle est sa version de l’histoire ? Avez-vous déjà porté la main sur elle dans un accès de colère, ou a-t-elle déjà requis des mesures d’éloignement ? » Une fois qu’il a répondu à ces questions, je peux généralement déterminer qu’il a également maltraité la femme dont il parle.

Il est normal de compatir avec un homme qui a connu une mauvaise expérience dans une relation précédente, mais dès l’instant où il utilise ce vécu pour excuser ses sévices à votre endroit, vous pouvez cesser de croire tout ce qu’il raconte sur son passé, et y voir plutôt un signe qu’il a des problèmes dans ses relations avec les femmes. Même si vous la détestez déjà, essayer de contacter son ex et de lui parler dès que possible. Un agresseur peut maltraiter ses partenaires l’une après l’autre, en amenant chacune à croire qu’elle est responsable des problèmes et que c’est lui la victime.

Qu’il se décrive comme la victime d’une ex ou de ses parents, le but de l’agresseur est, consciemment ou non, de jouer sur l’empathie qu’il va susciter chez vous, et ainsi éviter de se faire face à son problème.

MYTHE No 3

Il est violent parce qu’il tient beaucoup à moi. Il maltraite les personnes qu’il aime le plus.

Ce genre d’excuses revient souvent dans mes groupes pour agresseurs. Mes clients me disent : « Personne ne m’énerve autant qu’elle. Il m’arrive de péter les plombs tellement je tiens à elle. Ce qu’elle fait me blesse vraiment, et personne n’arrive à me faire souffrir autant qu’elle ». Les agresseurs peuvent exploiter cette rationalisation auprès de leurs partenaires, des leurs amis et de leurs familles. Leur attitude comporte une part de vérité : les gens qu’on aime peuvent causer une douleur plus grande que n’importe qui. Mais comment cela peut-il justifier de la maltraitance ?

L’agresseur aimerait nous convaincre d’accepter le postulat suivant, simple mais erroné :

« Les émotions sont à la base des comportements. »

« Quand les gens ont mal, ils s’en prennent à quelqu’un d’autre en représailles. Quand ils sont jaloux, ils deviennent possessifs et suspicieux. Quand il se sentent contrôlés, ils crient et menacent ». N’est-ce pas toujours le cas ? Non. Chaque être humain a sa façon de vivre et gérer la douleur ou le ressentiment. Si vous avez l’impression qu’on vous diminue ou qu’on vous harcèle, vous pourriez trouver du réconfort à manger une barre de chocolat. Dans la même situation, il se peut que je fonde en larmes. D’autres personnes pourraient rapidement mettre des mots sur ce qu’ils ressentent, en réaction directe à la maltraitance. Bien que nos émotions puissent influencer la manière dont nous aimerions agir, nos choix en matière de comportement sont finalement déterminés par notre mentalité ou nos habitudes. Nous répondons à nos blessures affectives en nous basant sur ce que nous pensons de nous-mêmes, de la personne qui nous a blessé, et du monde en général. Les seules personnes dont le comportement est dicté par des émotions sont celles qui sont sévèrement traumatisées ou qui souffrent de graves troubles mentaux. Et très peu de conjoints agresseurs présentent de tels états psychologiques graves.

Il existe d’autres raisons de refuser l’excuse qui associe la violence à un « trop-plein d’amour ». Tout d’abord, la plupart des gens réservent le meilleur d’eux-mêmes et leurs traitements les plus affectueux aux personnes qu’ils aiment, y compris leur partenaire. Devrait-on accepter l’idée que ces personnes ressentent un amour moins fort et des sentiments moins passionnés que ceux d’un agresseur ? Cela n’a pas de sens. En dehors de ma vie professionnelle, j’ai connu de nombreux couples au fil des années, qui sont demeurés passionnément attachés l’un à l’autre, tout en se traitant avec respect. Malheureusement, notre société accepte facilement l’idée d’un lien néfaste entre la passion et l’agression, qui serait imbriquées. Beaucoup croient que des propos cruels et des crises de colère sont le prix à payer pour une relation passionnée, sensuelle et profonde. De nombreux films et séries télé dites romantiques renforcent cette idée.

Or, la plupart des conjoints violents ont des amitiés intenses avec des personnes autres que leur épouse ou leur copine. Mes clients peuvent éprouver une affection profonde pour l’un de leurs parents ou les deux, un frère ou une sœur, un.e ami.e, une tante ou un oncle. Sont-ils violents envers ces personnes ? Très rarement. Ce n’est donc pas l’amour ou l’affection profonde qui entraîne la violence.

MYTHE No 4

Il retient beaucoup trop ses émotions, jusqu’au moment où il craque. Il faut qu’il apprenne à reconnaître ses émotions et à les exprimer pour prévenir ces épisodes explosifs.

Mes collègues et moi-même appelons cette croyance la « théorie de la cocotte-minute », comme si les gens ne pouvaient tolérer qu’un certain niveau de douleur et de frustration accumulée. Si ces émotions ne sont pas évacuées périodiquement – un peu comme dans une bouilloire – on court le risque d’un grave accident. Ce mythe a une apparence de vérité parce que nous savons bien que beaucoup d’hommes n’expriment pas suffisamment leurs émotions. Comme la plupart des agresseurs sont des hommes, ça semble logique.

Mais ça ne l’est pas, et voici pourquoi : la plupart de mes clients tendent à exprimer leurs émotions, souvent bien plus que des non-agresseurs. Plutôt que de tout garder à l’intérieur, ils ont même tendance à faire l’inverse : ils accordent une importance exagérée à leurs émotions, ils en parlent et les expriment – à vrai dire, ils en parlent à tel point que leur partenaire et enfant(s) n’en peuvent plus d’en entendre parler. Les émotions d’un agresseur sont aussi susceptibles de prendre trop de place que d’être réprimées. Elles peuvent occuper tout l’espace de leur maisonnée. Lorsqu’un tel homme se sent mal, il pense que le monde doit s’arrêter de tourner pour tous les membres de la famille jusqu’à ce que quelqu’un prenne soin de lui. Les crises que vit sa partenaire, les maladies des enfants, les repas, les anniversaires – rien n’est aussi important que ses émotions.

En fait, ce n’est pas de ses propres émotions dont l’agresseur est déconnecté, mais de celles de sa conjointe et de ses enfants. Ce sont ces émotions qu’il connaît très peu et dont il gagnerait à se rapprocher. Mon travail en tant que conseiller en violence conjugale implique souvent de détourner la discussion de leur émotions pour les amener à comprendre la façon dont ils pensent (y compris leurs attitudes envers les émotions de leur conjointe). Mes clients tentent systématiquement de ramener le sujet à des thèmes commodes et habituels pour eux, c’est-à-dire où leur monde intérieur est la seule chose qui compte.

On a vu durant des décennies plusieurs thérapeutes essayer d’aider des agresseurs à changer en les guidant dans la compréhension et l’expression de leurs émotions. Malheureusement, cette approche bien intentionnée mais erronée se révèle néfaste : elle alimente le besoin égoïste de l’agresseur de demeurer au centre de l’attention, ce qui constitue un moteur important de son comportement violent.

Une raison pour laquelle vous pourriez être tentée d’accepter la « théorie de la cocotte-minute masculine » peut être l’observation chez votre partenaire d’un schéma où il devient d’avantage renfermé, parle de moins en moins, passe graduellement du frémissement à l’ébullition, et finit par une éruption de cris, d’insultes et de violence. Comme cela ressemble à une explosion d’émotions, vous pensez que c’en est une. Mais cette montée de tension, cette accumulation d’émotions dans sa bouilloire personnelle reflète en fait son manque d’empathie pour vos émotions à vous, ainsi qu’une palette de comportements que nous examinerons plus loin. Et quand il explose, c’est qu’il se donne la permission de le faire.

MYTHE No 5

Il a une personnalité violente, explosive. Il doit apprendre à être moins agressif.

Votre partenaire a-t-il tendance à se comporter de façon raisonnablement correcte avec tous les autres, mais pas avec vous ? Est-ce inhabituel pour lui d’insulter ou de se battre avec d’autres hommes ? S’il devient agressif avec un homme, est-ce habituellement à votre sujet – par exemple, s’en prendre à un homme qu’il croit intéressé à vous ? La vaste majorité des agresseurs se montrent tout à fait calmes et raisonnables dans la plupart des interactions qui ne sont pas liées à leur partenaire. En fait, les conjointes de mes clients me demandent souvent : « Comment peut-il être si aimable avec tout le monde et me traiter, moi, comme un chien ? » S’il était vrai que cet homme souffrait d’une « personnalité agressive », il ne serait pas capable de réserver juste pour vous cet aspect de lui-même. De nombreux thérapeutes ont essayé pendant des années de guider les conjoints agresseurs vers leur côté le plus sensible, le plus vulnérable. Mais la triste réalité est qu’un tas d’homme gentils et sensibles sont sournoisement – et parfois violemment – violents envers leurs conjointes. La dualité de leur nature est un élément central du mystère qu’ils entretiennent.

Le stéréotype sociétal voulant qu’un agresseur soit généralement peu éduqué et issu du monde ouvrier ajoute à la confusion. Ainsi va la fausse équation : « Agresseur = homme des cavernes musclé = homme de classe inférieure ». En plus d’être un stéréotype injustifié des hommes de classe ouvrière, ce cliché efface également le fait qu’un professionnel ou un homme instruit risque tout autant d’agresser sa conjointe. Un entrepreneur qui a réussi, un professeur d’université, ou un moniteur de voile est moins susceptible d’adopter une image de gros bras tatoué, mais il peut néanmoins être un partenaire tout aussi cauchemardesque.

Les stéréotypes de classe et de race permettent aux plus privilégiés d’écarter la problématique de la violence en se prétendant non concernés. Pour eux, les agresseurs sont « ces ouvriers de la construction qui n’ont jamais été à l’université, ce sont ces Latinos ou les résidents des quartiers défavorisés. Ce sont eux les agresseurs. Ici, dans notre ville ou notre quartier, les choses sont différentes. On n’est pas des machos, nous. »

Pourtant les femmes qui ont un vécu de violence savent que les agresseurs viennent de tous les milieux et empruntent toutes les apparences. Parfois, plus un agresseur est éduqué, plus il noue de nœuds dans la tête de sa conjointe et plus il est habile à l’amener à se culpabiliser et à convaincre son entourage que c’est une folle. L’emprise d’un agresseur est d’autant plus forte qu’il jouit d’un statut social enviable, et cela peut être encore plus difficile d’y échapper. Deux de mes premiers clients étaient professeurs à l’université Harvard.

Certaines femmes sont attirées par le stéréotype du « dur », d’autres, pas du tout. Certains indices peuvent nous alerter au risque qu’un homme se montre violent, comme nous le verrons au chapitre 5, mais qu’il soit gentleman ou macho n’est pas un de ces indices. (Toutefois, si un homme a tendance à intimider les gens, restez sur vos gardes. Tôt ou tard, son attitude trouvera une nouvelle cible : vous. Être avec un homme capable d’en effrayer d’autres peut sembler attirant, jusqu’au moment où il se tourne contre vous.

Lundy Bancroft 

Traduction : Collective TRADFEM

https://tradfem.wordpress.com/2021/01/04/7843/

Version originale : Why Does He Do That?, chapitre 2 :

https://www.docdroid.net/py03/why-does-he-do-that-pdf

Tous droits réservés à Lundy Bancroft et TRADFEM. 

Ce livre sera bientôt publié en français.

Auteur : entreleslignesentrelesmots

notes de lecture

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