Colombie : De graves violations des droits humains persistent alors que les élections législatives et présidentielles approchent (+ autre texte)

Les organisations françaises et colombiennes membres du consortium Ensemble pour la Paix expriment leur vive préoccupation face à l’augmentation exponentielle de la violence dans le pays, qui affecte les vies humaines, les processus communautaires et environnementaux, et aggrave la situation sociopolitique du pays.

Entre mars et juin auront lieu les élections parlementaires et présidentielles, avec comme nouveauté l’élection des 16 sièges de paix pour les victimes du conflit armé prévus par l’Accord final de paix de 2016, un événement historique dans le pays puisque les régions les plus touchées par la violence et qui n’ont jamais été représentées au sein du pouvoir législatif joueront un rôle de premier plan dans la vie politique du pays.

Cette situation est précédée d’une année 2021 marquée par la répression des mouvements sociaux, le harcèlement, la criminalisation et la persécution des manifestant.e.s et des défenseur.e.s des droits humains, et une plus grande visibilité du paramilitarisme urbain. Ce dernier phénomène fait référence aux civils situés à proximité des forces de l’ordre qui, en toute impunité, ont tiré à balles réelles sur des manifestant.e.s.

La reconfiguration du conflit, la dispute pour les ressources et les territoires stratégiques entre les groupes armés ont entraîné une augmentation de la violence, des menaces, des assassinats et du recrutement forcé d’enfants et de jeunes, des déplacements forcés et le confinement de communautés entières.

En janvier 2022, la situation dans les territoires est extrêmement grave. Selon la Mission d’observation électorale (MOE), « 58% des municipalités des circonscriptions spéciales de paix transitoire présentent un certain niveau de risque électoral ». Ces phénomènes sont présents dans les trois régions accompagnées par l’initiative Ensemble pour la paix, dans les départements du Chocó et du Cauca, et dans d’autres régions du pays.

Dans la région du Nord du Cauca, le 14 janvier, le jeune défenseur de la nature Breiner Cucuñame, un mineur, et Guillermo Chicame, un leader indigène, ont été assassinés. Dix jours plus tard, Albeiro Camayo, ancien coordinateur régional de la garde indigène dans la municipalité de Buenos Aires, a lui aussi été assassiné . Suite à ces terribles actes de harcèlement, les organisations autochtones du Cauca sont actuellement en état d’alerte.

Sur la côte Pacifique de Cauca, les affrontements se poursuivent entre les groupes armés illégaux, provoquant des déplacements et confinements forcés de communautés.

Dans la sous-région de Medio San Juan, dans le département du Chocó, au moins 1 444 personnes, sur 995 familles, ont été déplacées. D’autre part, à La Unión, San Miguel et Isla de Cruz, quelque 1 391 personnes, sur 446 familles, restent confinées.

D’autres événements inquiétants se produisent également dans le pays, telle que la récente attaque subie par la Mission de vérification des Nations unies à San José del Guaviare le 27 janvier 2022.

Ces situations et bien d’autres qui se produisent quotidiennement dans les territoires nous amènent à mettre en garde une fois de plus contre les risques graves qui pèsent sur la vie digne des Colombien.ne.s, sur le travail des personnes et des organisations qui défendent les droits humains, l’environnement et la paix, et sur les obstacles sérieux à la participation des victimes du conflit armé aux élections actuelles. Ensemble pour la paix est solidaire de la population civile colombienne, en particulier de la population afro-descendante, indigène et paysanne.

Nous exhortons les autorités colombiennes à :

Garantir le droit à la vie des individus et des peuples et prendre les mesures nécessaires à leur protection intégrale.

Donner la priorité à la mise en œuvre de l’Accord final de paix, y compris toutes les mesures envisagées comme garanties pour une sécurité prenant en compte l’approche territoriale, ethnique et de genre.

Garantir les droits démocratiques des citoyens à jouir de la liberté d’élire ou d’être élu dans le cadre d’un processus électoral libre et équitable, sans mettre leur vie en danger.

Enquêter, poursuivre et punir tous les acteurs qui exercent la violence et portent atteinte aux droits humains, en particulier dans les régions liées aux 16 sièges de paix et où l’État est particulièrement absent.

Nous appelons la communauté internationale à :

Continuer à soutenir le travail de la société civile pour les droits humains, la paix et la démocratie en Colombie,

Examiner de près les modalités, l’organisation et le déroulement des différentes élections qui se tiendront en 2022 en Colombie,

Se prononcer publiquement et condamner toute irrégularité qui pourrait être observée dans le processus électoral,

Proposer une assistance, un accompagnement et une surveillance électorale aux autorités colombiennes afin qu’elles puissent garantir le bon déroulement des élections, que ce soit au niveau urbain ou dans les zones rurales du pays.

Signataires du communiqué (3 février 2022) :

en Colombie : CENSAT- Agua viva, CINEP-PPP, Corporación CIASE ; Coalition Colombienne pour le Droit à l’Éducation – CCDE ; Commission Inter ecclésiale de Justice et Paix – CIJP ; Colombia Nuestra ; Instituto Latinoamericano para una Sociedad y un Derecho Alternativos – ILSA ; Amis de la UNESCO ; Enfances 2/32 France-Colombie ; Association- MINGA ; Secretariado Nacional de la Pastoral Social – Caritas Colombia ; Taller Abierto et Vamos Mujer.

en France : les membres du Réseau France Colombie Solidarités (RFCS) : Action des chrétiens pour l’abolition de la torture – ACAT ; Agir Ensemble pour les Droits Humains – AEDH ; Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement – CCFD – Terre Solidaire ; Ecole de la Paix ; Entre Todos France ; France Amérique Latine – FAL ; Travailler Ensemble Jeunes et Engagés – TEJE ; Peace Brigades International PBI – France ; Secours Catholique – Caritas France – SCCF et Solidarité Laïque.


https://www.franceameriquelatine.org/colombie-graves-violations-droits-humains-elections-legislatives-presidentielles-approchent-communique-reseau-france-colombie/

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Colombie : la paix ne doit pas nous coûter la vie !

Communiqué de presse de l’association municipale des travailleur·euses paysan·nes de Piamonte Cauca(ASIMTRACAMPIC) publié le 1 mars 2022. 

Depuis notre émergence en 2012, l’un de nos slogans et bannières de lutte en tant qu’organisation paysanne victime du conflit politique, social et armé en Colombie, a toujours été « la lutte pour la paix avec la justice sociale ». Pas la paix des tombeaux que l’État colombien, à travers ses différents gouvernements, nous a toujours imposée. Aujourd’hui, alors que l’actuel gouvernement s’est conformé à ce qu’il avait dit à l’époque, à savoir « déchirer l’Accord de paix », laissant place à une escalade du conflit armé, nous voulons demander à la communauté internationale et aux organisations internationales en charge des droits humains d’intervenir pour mettre un terme à cette barbarie contre le peuple colombien et en particulier la paysannerie. Parce que nous nous sentons complètement impuissant·es et non protégé·es par les institutions de l’État qui sont censées protéger nos vies.

Notre profond rejet des nouvelles menaces proférées à l’encontre de notre camarade Maydany Salcedo, par des acteurs armés présents sur nos territoires, événements qui se sont produits vendredi dernier, le 11 février de cette année, lors d’une réunion avec la communauté, où des hommes armés ont proféré des menaces de mort à l’encontre de notre présidente.

De l’Association municipale des travailleur·euses paysan·nes de Piamonte Cauca, nous exprimons nos plus sincères sentiments de solidarité avec la famille du leader en processus de réincorporation Jorge Santofimio, lâchement assassiné devant sa famille et ses collègues de la Coopérative (COMUCCON), et nous prions pour le prompt et complet rétablissement de son fils. De même, nous exprimons notre solidarité avec la famille de Lorenzo Hidalgo, également une personne en voie de réincorporation assassinée dans un village du Corregimiento Cofania Jardines de Sucumbíos. Ces assassinats qui ont eu lieu dans l’un des départements les plus militarisés du pays, laissent beaucoup à dire sur une force publique plus soucieuse de protéger les entreprises transnationales qui pillent et détruisent la vie de notre Terre Mère au lieu de sauvegarder et protéger la vie et l’honneur des personnes qui habitent ce merveilleux territoire amazonien.

Nous rejetons catégoriquement la violence qui est en train de se produire dans la région de Putumayo, Baja Bota Caucana et Cofanía Jardines de Sucumbíos, et nous plaidons pour une solution politique et basée sur le dialogue à toute cette crise humanitaire que nous vivons dans nos territoires. Il est urgent de consolider un accord humanitaire, un cessez-le-feu et une cessation des hostilités, pour sortir une fois pour toutes la population civile de cette guerre sanglante et fratricide.

https://viacampesina.org/fr/colombie-la-paix-ne-doit-pas-nous-couter-la-vie/

Auteur : entreleslignesentrelesmots

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