Les prisonniers-ères politiques en Algérie en grève de la faim contre la répression croissante

Depuis le 28 janvier, une quarantaine de prisonniers-ères politiques algérien-ne-s ont entamé une grève de la faim pour exiger la libération de leur détention illégale et arbitraire et l’arrêt des poursuites de plus en plus fréquentes à l’encontre des militant-e-s pour la démocratie, accusé-e-s de « terrorisme » en vertu du nouvel article 87bis du code pénal. Des femmes, des jeunes et des membres du syndicat indépendant SNAPAP, affilié à l’UITA, font partie des grévistes de la faim incarcéré-e-s en « détention provisoire », dans l’attente de leur procès et de leur condamnation. Plusieurs dirigeant-e-s du SNAPAP, le Syndicat national autonome des personnels de la fonction publique, affilié à l’UITA, ont rejoint la grève de l’extérieur par solidarité.

La répression en Algérie s’est considérablement intensifiée depuis que le mouvement de masse pour la démocratie, le Hirak, a éclaté en février 2019. La pandémie du COVID-19 a conduit à une suspension temporaire du Hirak en 2020, mais la reprise des grèves et des manifestations de rue au début de l’année dernière a entraîné une répression brutale. Après la libération très médiatisée d’une quarantaine de prisonniers-ères en février 2021, le Comité national pour la libération des détenus (CNLD) comptait environ 70 prisonniers-ères d’opinion. Aujourd’hui, on en compte 330.

Et suite aux modifications apportées au code pénal l’année dernière, ces personnes peuvent être poursuivies – même rétroactivement – pour « terrorisme » pour avoir tenté d’exercer leurs droits fondamentaux.

Dans un rapport daté du 24 juin 2021, Amnesty International a signalé que « depuis avril 2021, les autorités algériennes recourent de façon croissante à des accusations de « terrorisme » ou de « complot contre l’État » pour poursuivre en justice des défenseur-e-s des droits humains et des militant-e-s du Hirak ».

En avril de l’année dernière, Kaddour Chouicha, coordinateur national du Syndicat de l’enseignement supérieur solidaire (SESS) et membre éminent de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme, a été poursuivi avec une douzaine d’autres défenseur-e-s des droits humains pour « adhésion à une organisation terroriste ou subversive active à l’étranger ou en Algérie ».

Ramzi Darder, mécanicien automobile et membre du bureau national de la fédération nationale représentant les travailleurs-euses du secteur informel-le-s, affiliée à la confédération indépendante COSYFOP, a été arrêté le 30 juin 2021 et accusé notamment de « terrorisme », d’atteinte au moral de l’armée et d’atteinte à l’unité nationale par ses publications sur les médias sociaux. En août 2021, Ramzi a été transféré dans une prison réservée aux condamnés à mort et aux accusés de terrorisme, mais aucune date n’a encore été fixée pour son procès.

Entre le 2 et le 11 janvier 2022, quatre dirigeant-e-s de COSYFOP et de SNATEG, syndicat indépendant des travailleurs-euses de la compagnie nationale d’électricité SONELGAZ, affilié à l’UITA, ont été arrêté-e-s et emprisonné-e-s, puis libéré-e-s sous « contrôle judiciaire ». Ils-elles sont accusé-e-s, en vertu de l’article  7bis du code pénal, « d’organisation et de recrutement pour une association terroriste par le biais des médias sociaux et création d’une organisation criminelle nuisible à l’unité nationale ».

Les syndicalistes ne sont pas tous-tes accusé-e-s de « terrorisme », mais tous-tes font l’objet d’interminables persécutions de la part des tribunaux et de la police. La poursuite en série de Dalila Touat, enseignante et militante du SNAPAP, active depuis de nombreuses années dans la défense des droits des chômeurs-euses, en est un exemple typique. Dalila a été arrêtée et emprisonnée le 3 janvier 2021, accusée d’outrage aux institutions publiques, de distribution de tracts préjudiciables au maintien de l’ordre public et d’incitation à un rassemblement illégal – pour avoir appelé au boycott des élections. Reconnue coupable et condamnée à 18 mois de prison le 19 janvier 2021, elle a été libérée provisoirement le 19 février sous « contrôle judiciaire » après deux grèves de la faim dans l’attente de son appel. En novembre 2021, elle est condamnée à 6 mois de prison, toujours pour outrage à une institution publique ; en mars, elle avait dénoncé les conditions abusives de son incarcération et demandé un recours en justice. Le 31 janvier 2022, elle a été arrêtée à Mostanagem, emprisonnée et accusée d’incitation à un rassemblement illégal, de dénigrement d’un organisme public et de distribution de publications portant atteinte à l’intérêt national.

Depuis 2017, les organes de contrôle de l’OIT confirment régulièrement les violations des droits syndicaux fondamentaux et appellent le gouvernement à garantir les droits des syndicats indépendants de l’État, jusqu’à présent sans résultat.

Les sièges des syndicats indépendants ont été fermés et scellés par la police. La surveillance constante, les poursuites en série contre les militant-e-s et la criminalisation effective de l’activité syndicale, qui inclut désormais la menace de poursuites pour « terrorisme », empêchent les membres des syndicats de communiquer librement et de se réunir publiquement. Les dirigeant-e-s et les membres des syndicats continuent d’être licencié-e-s et mis sur liste noire des emplois du secteur public.

Le gouvernement prépare un programme d’austérité sévère, préparant le terrain pour une explosion sociale, tout en renforçant la répression qui prive les travailleurs-euses de toute représentation indépendante.

Une action immédiate est nécessaire pour garantir la vie et la liberté des Algérien-ne-s qui luttent pour la démocratie. Le moment est venu pour les syndicats à travers le monde de faire preuve d’une solidarité active avec toutes les personnes emprisonnées, persécutées et harcelées pour leur engagement démocratique et leur activité syndicale, ainsi qu’avec nos camarades qui luttent pour la liberté d’association et les droits des travailleurs-euses.

Une action immédiate est nécessaire pour garantir la vie et la liberté des Algérien-ne-s qui luttent pour la démocratie. Le moment est venu pour les syndicats à travers le monde de faire preuve d’une solidarité active avec toutes les personnes emprisonnées, persécutées et harcelées pour leur engagement démocratique et leur activité syndicale, ainsi qu’avec nos camarades qui luttent pour la liberté d’association et les droits des travailleurs-euses.

10/02/2022

https://www.iuf.org/fr/news/editorial-political-prisoners-in-algeria-on-hunger-strike-against-escalating-repression/

Auteur : entreleslignesentrelesmots

notes de lecture

3 réflexions sur « Les prisonniers-ères politiques en Algérie en grève de la faim contre la répression croissante »

  1. Pour la Libération de Fouad Hassam militant des droits humains

    Que cesse la répression des défenseurs des droits de l’homme en Algérie
    Encore une fois, le pouvoir autoritaire algérien ne connaît de langage et d’actes que la répression. Après les arrestations et les condamnations de militants défenseurs des droits de l’homme, de journalistes et blogueurs qui s’ajoutent aux intimidations et pressions exercées contre les journalistes et les associations (dissolution du RAJ), notre camarade et ami Fouad Hassam, membre du Comité de Suivi du Forum Social Maghreb, vient d’être mis sous mandat de dépôt le mardi 29-03-2022 après le procès qui s’est déroulé́ le même jour. Pour rappel Fouad HASSAM est resté en garde à vue plusieurs jours après qu’un mandat d’arrêt ait été lancé contre lui et qu’il soit interpellé́.
    Les dynamiques sociales impliquées dans le Forum Social Maghreb condamnent avec vigueur cette mesure répressive.
    Elles appellent
    · A la libération inconditionnelle de Fouad Hassam
    · A la libération de tous les détenus du Hirak
    · Au respect des droits de l’homme et des libertés publiques conformément aux engagements souscrits à l’international par l’Algérie

    Elles appellent aussi à une large solidarité avec Fouad Hassam ainsi qu’avec l’ensemble des prisonniers politiques et prisonniers d’opinion en Algérie et dans l’ensemble du Maghreb.

    Maghreb le 31 mars 2021
    Le Comité de Suivi du FSMaghreb

  2. Algérie : 26 février, meeting de solidarité internationale
    Trois ans après le début du processus révolutionnaire, populaire et pacifique, d’émancipation citoyenne, appelé Hirak, l’Algérie connaît aujourd’hui une situation intolérable et inédite de répression et d’atteintes aux libertés :

    • escalade dans les arrestations, procès expéditifs de militants hirakistes, de syndicalistes, de représentants de partis politiques et d’associations, de journalistes, d’avocats, ou, tout simplement, de citoyennes et de citoyens aspirant à un changement démocratique ;

    • des centaines d’entre eux sont en prison – dont quarante ont entamé une grève de la faim depuis le 28 janvier 2022, leur état de santé ne cessant de se détériorer dans l’indifférence des autorités et de leurs relais dans les médias locaux ; des dizaines d’autres sont sous contrôle judiciaire et restrictions administratives, ou en détention provisoire de plus de neuf mois, ou en assignation à résidence ; 

    • un arbitraire policier et judiciaire de tous les instants, menaçant toute personne ayant participé ou contribué au Hirak, et visant à enfermer et à museler les Algériennes et les Algériens.
    Après une succession d’élections – présidentielle, référendum constitutionnel, législatives, municipales, sénatoriale –, massivement rejetées par une population désespérée par un chômage galopant, par une crise économique sans précédent, par la précarité de la vie sociale et par des mesures liberticides, le pouvoir autoritaire, toujours placé sous le contrôle direct du haut commandement militaire, tente de se redéployer par l’arbitraire, au mépris des droits humains les plus élémentaires, bafouant les conventions internationales en la matière ratifiées par l’Etat algérien.
    Plus que jamais, la diaspora est le pivot premier de toute action solidaire et de relais des luttes démocratiques et sociales afin de faire pression sur le pouvoir pour :
    • la libération inconditionnelle de tous les détenu(e)s politiques et d’opinion, et leur réhabilitation ;
    • l’abrogation de toutes les mesures arbitraires et liberticides, dont l’article 87 bis du code pénal ;
    • la liberté d’expression et d’opinion des citoyen(ne)s algérien(ne)s.
    Nous, organisations de l’émigration algérienne en France, appelons toutes celles et tous ceux qui voient dans le Hirak un horizon émancipateur de se mobiliser à l’occasion de la troisième année de processus démocratique en Algérie, et de participer à ce meeting de solidarité internationale qui se tiendra à la Bourse du travail de Paris (salle Hénaff, 29 rue du Temple, 75011), samedi 26 février, de 14 heures à 18 heures.

    Meeting organisé par (premiers signataires) :

    ▪ ACA (Action citoyenne pour l’Algérie)

    ▪ ACDA (Agir pour le changement et la démocratie en Algérie)

    ▪ APEL-Egalité
    
▪ CALM (Coordination des Algériens du monde)

    ▪ CFDA (Collectif de familles de disparus en Algérie)
    
▪ CGADD (Collectif Groupe Algérie droit devant)

    ▪ Citoyens sans organisation
    
▪ Collectif Debout l’Algérie
    
▪ Collectif Libérons l’Algérie

    ▪ Dzayer 2.0

    ▪ Ibtykar

    ▪ PUNA (Pour une nouvelle Algérie)
    
▪ Riposte internationale

    ▪ UPA (Union pour l’Algérie)
    Pour tout contact : meeting.solidarité.2022@gmail.com
    Avec le soutien de (premiers signataires) :

    ▪ ADTF (Association démocratique des Tunisiens en France)

    ▪ AMF (Association des Marocains en France)
    
▪ APVC (Agence de promotion des cultures et du voyage)

    ▪ ASDHOM (Association de défense des droits de l’Homme au Maroc)

    ▪ ATMF (Association des travailleurs maghrébins de France)

    ▪ CCFD-Terre solidaire 

    ▪ CEDETIM (Centre d’études et d’initiatives de solidarité internationale)

    ▪ CGT (Confédération générale du travail)
    
▪ Comité France de soutien à Maâti Monjib, Soulaiman Raissouni, Omar Radi

    ▪ CRLDHT (Comité pour le respect des libertés et des droits de l’Homme en Tunisie)

    ▪ EELV (Europe Ecologie Les Verts)

    ▪ FORSEM (Forum de solidarité euro-méditerranéenne)
    
▪ Forum Palestine Citoyenneté
    
▪ FreeAlgéria

    ▪ FSU (Fédération syndicale unitaire)

    ▪ FTCR (Fédération des Tunisiens citoyens des deux rives)

    ▪ IPAM (Initiatives pour un autre monde)

    ▪ LDH (Ligue des droits de l’Homme)

    ▪ LFI (La France insoumise)

    ▪ NPA (Nouveau Parti anticapitaliste)

    ▪ PCF (Parti communiste français)

    ▪ PEPS (Pour une écologie populaire et sociale)

    ▪ Réseau féministe « Ruptures »

    ▪ SUD (Union syndicale Solidaires)

    ▪ UJFP (Union juive française pour la paix)


    https://blogs.mediapart.fr/agir-pour-le-changement-et-la-democratie-en-algerie/blog/250222/algerie-26-fevrier-meeting-de-solidarite-internationale

  3. ALGÉRIE
    Meeting de solidarité internationale
    Pour la libération des détenu(e)s politiques et d’opinion,
    contre la répression, pour la défense des libertés et des droits humains

    Bourse du travail de Paris, salle Hénaff
    29, boulevard du Temple, 75011 Paris
    Samedi 26 février 2022,
    14 heures-18 heures

    Trois ans après le début du processus révolutionnaire, populaire et pacifique, d’émancipation citoyenne, appelé Hirak, l’Algérie connaît aujourd’hui une situation intolérable et inédite de répression et d’atteintes aux libertés :
    • escalade dans les arrestations, procès expéditifs de militants hirakistes, de syndicalistes, de représentants de partis politiques et d’associations, de journalistes, d’avocats, ou, tout simplement, de citoyennes et de citoyens aspirant à un changement démocratique ;
    • des centaines d’entre eux sont en prison – dont quarante ont entamé une grève de la faim depuis le 28 janvier 2022, leur état de santé ne cessant de se détériorer dans l’indifférence des autorités et de leurs relais dans les médias locaux ; des dizaines d’autres sont sous contrôle judiciaire et restrictions administratives, en détention provisoire de plus de neuf mois, ou en assignation à résidence ;
    • un arbitraire policier et judiciaire de tous les instants, menaçant toute personne ayant participé ou contribué au Hirak, et visant à enfermer et à museler les Algériennes et les Algériens.

    Après une succession d’élections – présidentielle, référendum constitutionnel, législatives, municipales, sénatoriale –, massivement rejetées par une population désespérée par un chômage galopant, par une crise économique sans précédent, par la précarité de la vie sociale et par des mesures liberticides, le pouvoir autoritaire, toujours placé sous le contrôle direct du haut commandement militaire, tente de se redéployer par l’arbitraire, au mépris des droits humains les plus élémentaires, bafouant les conventions internationales en la matière ratifiées par l’Etat algérien.

    Plus que jamais, la diaspora est le pivot premier de toute action solidaire et de relais des luttes démocratiques et sociales afin de faire pression sur le pouvoir pour :
    • la libération inconditionnelle de tous les détenus politiques et d’opinion, et leur réhabilitation ;
    • l’abrogation de toutes les mesures arbitraires et liberticides, dont l’article 87 bis du code pénal ;
    • la liberté d’expression et d’opinion des citoyen(ne)s algérien(ne)s.

    Nous, organisations de l’émigration algérienne en France, appelons toutes celles et tous ceux qui voient dans le Hirak un horizon émancipateur de se mobiliser à l’occasion de la troisième année de processus démocratique en Algérie, et de participer au meeting de solidarité internationale à la :

    Meeting organisé par (premiers signataires)
    ACA (Action citoyenne pour l’Algérie), ACDA (Agir pour le changement et la démocratie en Algérie), APEL-Egalité, CALM (Coordination des Algériens du monde), CFDA (Collectif de familles de disparus en Algérie), CGADD (Collectif Groupe Algérie droit devant), Citoyens sans organisation, Collectif Debout l’Algérie, Dzayer 2.0, Ibtykar, PUNA (Pour une nouvelle Algérie), Riposte Internationale, UPA (Union pour l’Algérie).

    Avec le soutien de (premiers signataires) :
    CRLDHT, FTCR

    Pout tout contact : meeting.solidarité.2022@gmail.com

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