Andrée Michel : cent-un ans de résistance et une mort

Andrée Michel, féministe universitaire et militante, résistante à tous les conflits, est morte le 8 février 2022 à l’âge de 101 ans. Cette fervente activiste antimilitariste et anticolonialiste, a, jusqu’à encore peu de temps, consacré sa vie au combat pour la justice et la liberté, à la lutte contre toutes les formes d’oppression et contre les impacts du système militaro-industriel sur les dominations de classe, de race, de sexe. Elle a traversé ce siècle et le monde en scientifique précurseuse et humble, à l’affût de la moindre injustice, dans le but de mieux l’analyser et la combattre.  

Ma tristesse est grande. Je lui avais consacré un hommage publié avec son accord en novembre 2013 intitulé « Andrée Michel, ou la passion de résister », à retrouver dans son intégralité ci-dessous. Ses archives personnelles, professionnelles et militantes, sont en cours de classement aux Archives nationales. Longue vie à sa mémoire!

Joelle Palmieri, 9 février 2022

https://joellepalmieri.org/2022/02/09/andree-michel-cent-un-ans-de-resistance-et-une-mort/


Ben Cramer : Andrée Michel : 101 ans le 22 septembre

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2021/09/28/andree-michel-101-ans-le-22-septembre/

Joelle Palmieri : Andrée Michel, ou la passion de résister (100 ans le 22 septembre)

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2020/09/21/andree-michel-ou-la-passion-de-resister-2/

Andrée Michel : Féminisme et antimilitarisme

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2012/11/29/le-systeme-militaro-industriel-pratique-une-politique-de-genre-dynamique/

Auteur : entreleslignesentrelesmots

notes de lecture

2 réflexions sur « Andrée Michel : cent-un ans de résistance et une mort »

  1. Andrée Michel, une féministe avant-gardiste

    Le 16 mars 2022, l’émission Femmes libres sur Radio libertaire rendait un femmage à Andrée Michel, disparue le 8 février. Hélène Hernandez m’avait invitée aux côtés de Jules Falquet et de Catherine Morin Le Sech’ pour témoigner. L’ambiance et le contenu de ce moment émouvant ont reflété l’image et les luttes de la militante et chercheuse : vifs, joviaux, curieux. Nos mots ont croisé ceux d’Andrée (une archive de vingt ans) : féminisme, résistance, liberté, mémoire, antimilitarisme, anticolonialisme, combat, engagement, humilité… Des liens se sont exprimés : entre les guerres, l’intolérance et l’économie mondialisée ; entre l’injustice et l’impunité ; entre les discriminations de classe, race, sexe et le racisme, l’impérialisme, la culture des violences… La volonté jusqu’au bout de la vie de cette féministe indomptable a été soulignée : précurseuse, tenace, elle est restée à l’avant-garde de nombreuses luttes, pour la paix, contre la militarisation des sociétés, pour la mort dans la dignité…

    Écouter l’émission :

    https://www.facebook.com/EmissionFemmesLibres

    https://emission-femmeslibres.blogspot.com/2022/03/femmage-andree-michel-emission-du-16.html

    Joelle Palmieri
    20 mars 2022

    ****
    Quelques mots sur mon témoignage
    Andrée Michel habitait dans la même ville que moi, Montreuil-sous-Bois, à deux pas. Je la connaissais pour ses positions féministes internationalistes, anticolonialistes et contre la guerre (antimilitaristes). En 1996, avec quelques copines féministes nous avions créé une agence de presse féministe internationale, les Pénélopes. En juin 1998, nous organisions à l’École des Beaux-arts de Paris un débat sur les impacts de la mondialisation libérale sur les femmes et sur les formes de militantisme féministe à créer. Nous l’avions invitée. Elle est venue sans hésiter et a participé avec beaucoup d’entrain et de curiosité. Elle a alors confirmé son credo et a affirmé que la mondialisation s’articule autour de la militarisation et de l’intégrisme. Puis elle a très vite accepté d’écrire pour l’agence, notamment lors de la célébration du cinquantenaire du Deuxième sexe de Simone de Beauvoir. Elle est restée une fervente alliée des Pénélopes.
    Malgré un écart générationnel important, quarante ans, et notre différence de classe (sociale), notre féminisme, notre beauvoirisme (construction sans fin de mémoires de femmes) puis nos soifs de liberté, de résistance, notre révolte contre l’injustice, contre l’intolérance, contre la militarisation des sociétés… nous a rapprochées sérieusement.
    À partir de 2000, nous nous voyons toutes les semaines, elle m’adopte en tant que ce qu’elle nommera « sa professeure d’informatique ». Je lui apprends à se dépatouiller avec les logiciels, les systèmes d’exploitation, afin de ne pas freiner son insatiable écriture. Nous évoquons le rôle des entreprises de TIC (les Gafams) sur l’accélération des violences réelles : physiques, psychologiques ou épistémiques. Leurs logiciels et autres algorithmes orientent la pensée en renforçant les divisions sexuelle, raciale, de classe, Occident/autres pays du monde. On échange aussi sur les Balkans que je connais un peu et où je fréquente des organisations féministes locales au moment-même de la sortie de son livre « Justice et vérité pour la Bosnie-Herzégovine ». Nous profitons également de ce moment pour discuter actualités internationales mais aussi engagements et interrogations personnelles. Nous échangeons aves plaisir sur le rôle de la psychanalyse, sur les tours de passe-passe de nos inconscients respectifs sur nos choix politiques. Nous discutons également beaucoup des impasses de l’université, du milieu de la recherche, un lieu hiérarchisé, un « entre-soi » dans lequel il est difficile d’être admise en tant que « rebelle ». Andrée qui se dit « atypique » m’explique toutes les ficelles pour y rester libre. Elle me convainc d’y entrer.
    En 2009, je quitte l’Ile-de-France pour la région PACA. Nous continuons à échanger par téléphone, par mèl et de vive voix lors de mes passages à Paris. Je lui ai préalablement présenté des amies qui pourraient l’aider dans la gestion administrative qui lui pèse de plus en plus, en informatique – elle ne réussit pas à suivre les mises à jour constantes et s’énerve contre l’obsolescence programmée – et pour le tri de ses archives dont elle a tant besoin pour écrire son dernier ouvrage, une autobiographie qu’elle a entamée en 2007.
    Au même moment, s’est également dessiné le projet d’un essai écrit à quatre mains sur le « sadomasochisme » français. Nous voulons régler nos comptes avec les années Mitterrand qui n’ont en rien rompu avec les cultures de la guerre et de la soumission. Nous démarrons. Son autobiographie commence à prendre beaucoup de place en plus du projet de création en 2013 d’un Tribunal pénal international pour la République démocratique du Congo dont elle est l’une des premières marraines. Nous en resterons là avec ce qu’on a titré « On ne naît pas français, on le devient ».
    Mi 2018, Andrée est épuisée. Elle a presque cent ans. Ses archives en parties classées et regroupées dans une pièce de son appartement à Montreuil déménagent comme elle en Seine-et-Marne. Avec son accord et avec le conseil d’amies féministes, dont Geneviève Fraisse, j’entreprends de les faire entrer aux Archives nationales. En mars 2019 j’obtiens l’accord de la directrice de l’institution. En novembre, démarrent un grand chantier et… l’épidémie du Covid19. La machine ralentit. Le reconditionnement (cartons et départ de la cave de Citry à Pierrefitte) aura finalement lieu en juin 2021. Depuis, leur traitement est en cours. Il devrait s’achever fin 2022.

    https://joellepalmieri.org/2022/03/20/andree-michel-une-feministe-avant-gardiste/

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