« NOUS DETRUISONS LA PLANETE ? » Les mensonges de l’écologie patriarcale

Voici une traduction cursive d’un extrait d’un des livres d’une de mes radfems américaines préférées, Sonia Johnson (1). Sonia connait le patriarcat comme sa poche : elle est tombée dedans en naissant, puisqu’elle a été élevée dans un des groupes religieux les plus phallocratiques du monde : les Mormons. Secte contre laquelle est s’est rebellée, ce qui lui a valu d’être stigmatisée et « excommuniée » comme femme perdue et dangereuse hérétique par la hiérarchie exclusivement mâle de son église. Voici ce qu’elle dit sur l’écologie telle que définie par les hommes patriarcaux :

« Dans leur guerre incessante contre les femmes, une des manipulations les plus diaboliques des hommes (car une des plus efficaces) pour détourner notre attention de la vérité est de toujours blâmer les femmes – pas seulement de les rendre responsables des viols qu’ils commettent mais aussi de toutes leurs autres formes de destructivité. Ajoutant ainsi à notre fardeau déjà écrasant de culpabilité, de manque d’estime de soi et de haine de soi.

Durant les deux dernières décennies, j’ai entendu d’innombrables femmes déplorer par exemple que « nous détruisons la couche d’ozone » ou « nous détruisons la planète ! » Surprise, je leur ai demandé comment elles s’y prenaient pour faire ça. Est-ce qu’elles et leurs amies se réunissent et planifient comment produire davantage de voitures qui polluent l’atmosphère ? Est ce qu’elles se mettent en bandes pour massacrer davantage de forêts, de rivières et d’océans ? Non. Alors pourquoi le « nous » ? Pourquoi sont-elles si désireuses de s’impliquer dans ces accusations ?

Parce que ça exonère les hommes en tant qu’espèce. La plupart des femmes, stockholmées au point d’avoir perdu leur faculté de réflexion, croient tout ce que les hommes leur disent. Les hommes le savent, et ils en profitent. Par exemple, pour conditionner les femmes à partager la responsabilité de leurs actes, les savants et les journalistes de sexe masculin et les auteurs de livres déclarent invariablement que « nous sommes en train de tuer les océans », et « nous détruisons l’environnement », l’emploi de « nous » plaçant la responsabilité de ces destructions également sur les hommes et sur les femmes. Les hommes n’envisagent absolument pas de dire la vérité : « nous les hommes, et nous seulement sommes coupables de la destruction de la planète ».

Les femmes acceptent d’être blâmées, pas seulement parce que c’est les hommes qui le disent mais parce que ça leur évite de regarder la vérité en face. De cette façon, elles gardent leurs illusions et continuent à croire qu’elles vivent dans un monde secure habité par des « hommes bien », des personnes juste comme elles, mais avec un pénis.

Comment pourraient-elles regarder en face cette simple vérité : que toutes les destructions du monde naturel sont conçues et exécutées par des hommes ? Leurs fils, leurs frères, leurs pères, leurs maris, leurs amis.

Les implications de cette constatation pourraient bouleverser leur vie, comme les vagues sur un étang quand on y jette une pierre…

Plutôt que de prendre le risque de faire écrouler le monde fragile qu’elles s’efforcent de préserver si soigneusement, elles préfèrent accepter cette responsabilité pour elles-mêmes.

Elles acceptent cette responsabilité parce qu’elles pensent réellement qu’elles sont coupables. Les mensonges du patriarcat les ont conditionnées à croire que, si les hommes font ce qu’ils font, c’est parce qu’elles n’ont pas fait ce qu’il fallait – en particulier, que c’est parce que les mères n’ont pas su enseigner à leurs fils à être des « hommes bien ». Ainsi, les hommes ne peuvent être blâmés pour rien, tout est de la faute de leurs mères pas assez aimantes ou négligentes. Alors qu’elles étaient, il y a très longtemps, les plus honorées de tous les êtres humains, les mères sont devenues maintenant les dernières des dernières, responsables pour tout le mal qui existe – parce qu’elles ne peuvent pas empêcher les hommes de faire le mal.

Ce principe patriarcal de base qui consiste à blâmer les femmes pour tout le mal que font les hommes est parole d’évangile pour des milliards d’êtres humains, y compris pour la plupart des femmes. Ironiquement, l’universalité de ce principe est la preuve la plus révélatrice qu’il s’agit de conditionnement et non de vérité : tout ce que la majorité des gens croient n’est presque jamais la vérité, et presque toujours du conditionnement ».

Francine Sporenda

https://sporenda.wordpress.com/2020/04/10/nous-detruisons-la-planete-les-mensonges-de-lecologie-patriarcale/

(1) « The SisterWitch Conspiracy », Sonia Johnson

Auteur : entreleslignesentrelesmots

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