Alternatives émancipatrices, économie sociale, travail décent

Un partenariat pour des alternatives solidaires

Issu d’un mouvement de solidarité avec les combattants républicains espagnols et leurs familles, lors de la Guerre d’Espagne (1936-1939), 80 ans plus tard, l’Organisation Non Gouvernementale (ONG) Solsoc poursuit son action et sa réflexion pour la défense des droits économiques, sociaux, culturels et politiques. Pour ce faire, en partenariat avec les organisations qui représentent et font entendre les voix des populations les plus vulnérables, privées de leurs droits au Sud, mais aussi au Nord, elle met en œuvre des programmes qui luttent contre les exclusions et améliorent l’accès aux services sociaux de base.

Solsoc soutient des luttes pour le respect des droits humains et du droit international, mais également des initiatives en faveur de la réduction des inégalités sociales, économiques, environnementales et de genre. Son action s’organise autour de l’agenda du « Travail Décent » de l’Organisation Internationale du Travail (OIT). Celui-ci s’articule autour de 4 piliers : promouvoir l’emploi, garantir les droits au travail, étendre la protection sociale et encourager le dialogue social. Ils s’inscrivent dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations unies.

« L’éducation populaire, le partenariat en réseau et le renforcement des capacités sont au cœur de la stratégie de Solsoc et de ses partenaires »

En Belgique, Solsoc, mène un travail d’interpellation des décideurs politiques et de mobilisation de la base sociale de l’action commune socialiste. Elle bénéficie de l’appui financier, technique et politique du syndicat FGTB (Fédération générale du travail de Belgique) et des mutuelles socialistes UNMS (Union Nationale des Mutualités Socialistes). De concert avec deux organisations enracinées comme elle dans l’action commune socialiste belge, FOS (Fonds voor Ontwikkelings- Samenwerking) et IFSI/ISVI (Institut de Formation Syndicale Internationale de la FGTB), elle a participé à la création du Cadre Stratégique Commun pour le Travail Décent.

La collaboration entre ces trois organisations s’appuie sur un socle de valeurs communes : le combat pour de meilleures conditions de travail et de salaires pour les travailleurs et travailleuses, ainsi que de meilleures conditions de vie et des services sociaux à travers la solidarité internationaleEnsemble, elles ont élaboré un programme d’action permettant de valoriser la complémentarité des expériences et expertises, avec pour ambition de construire des alternatives solidaires, politiques, sociales et économiques, viables et durables à la mondialisation du modèle de compétition économique, en renforçant les mouvements sociaux.

L’éducation populaire, le partenariat en réseau et le renforcement des capacités sont au cœur de la stratégie de Solsoc et de ses partenaires. Encouragés à tous les niveaux, ils permettent, l’émancipation et l’action individuelle et collective ainsi que la participation des acteurs et populations aux décisions qui les concernent. Le programme de Solsoc est ainsi largement l’expression de l’action de ses partenaires. Il fait le lien entre la défense de la reconnaissance de la protection sociale et du Travail Décent, en tant que droits universels, la mise en place de mutuelles de santé pour assurer la couverture santé universelle, et, enfin, l’extension de l’économie sociale et solidaire comme alternative économique au modèle de l’économie conventionnelle.

C’est parce qu’elle croit à son pouvoir de transformation plus profonde de l’économie, et de donner un sens émancipateur à la dimension « travail », que Solsoc a mis l’économie sociale et solidaire au cœur de ses stratégies d’intervention et de sa conception du Travail Décent. Cette publication, en donnant la parole à des acteurs au quotidien de cette transformation, se veut une plaidoirie en ce sens. Nous espérons qu’elle vous convaincra !

Veronique Wemaere, directrice de Solsoc

 

Dans son article, « Emancipatrice, l’économie sociale et solidaire ? », Aurélie Leroy aborde, entre autres, la prétendue indépendance de l’économie, la nécessité de la « ré-encastrer » dans l’ensemble des relations  sociales et politiques, les dynamique de l’économie sociale et solidaire (ESS), « En réalité, l’ESS participe à la fois d’une dynamique de résilience, d’adaptation et de transformation, et se confronte au dilemme autonomie-instrumentalisation », la division sexuelle du travail, « L’ESS dispose indéniablement d’un potentiel émancipateur, mais les pratiques de ce secteur ne sont pas « neutres » au regard de la division sexuelle du travail, de la valorisation différenciée du travail féminin et masculin, et de l’essentialisation de certaines valeurs, comme la solidarité, l’empathie ou le don de soi, socialement attribuées aux femmes », les revenus, « L’augmentation des revenus ou de la production est au cœur de l’implication des femmes dans ces projets collectifs », la notion d’empowerment comme processus d’acquisition de pouvoirs à deux niveaux : les niveaux individuel et collectif, « En se focalisant exclusivement sur la responsabilisation libératrice personnelle et la seule capacité d’agir des actrices, ces initiatives risquent de mobiliser au final les mêmes principes économiques que le marché. Et donc de déresponsabiliser les acteurs économiques et politiques, tout en reproduisant des logiques patriarcales et inégalitaires », la prise en charge des activités domestiques et de soins aux enfants, « L’investissement supplémentaire dans des activités économiques (productives) ne se traduit en effet que trop peu dans une prise en charge équivalente des hommes dans des activités domestiques et de soins aux enfants (activités reproductives), mettant en péril le potentiel transformateur – tout autant que la pérennité – de ces initiatives », la promotion de l’égalité, la visibilité des femmes et de leur travail, « La visibilisation dans la sphère « publique » d’expériences et de savoirs traditionnellement détenus par les femmes dans la sphère « privée » permet également un décloisonnement, une requalification, dans le sens d’une revalorisation de « leurs » espaces et de « leurs » rôles », les pratiques et l’ouverture d’autres possibles, « Les pratiques de résistance élaborées à travers ces espaces (contre des politiques néolibérales, des normes patriarcales, des discriminations raciales, etc.) leur ont permis – plus que dans d’autres lieux publics, officiels, masculinisés – d’augmenter leur capacité d’initiatives, leur pouvoir d’action et de décision »…

Tangui Cornu parle de l’engagement syndical de la FGTB, de création de rapport de force, du périmètre des combats, « Le combat, ce n’est pas seulement celui qui se fait dans une entreprise ; le combat syndical, c’est d’abord et avant tout un combat pour un type de société qui n’exploite pas l’homme par l’homme où que ce soit dans le monde », du travail informel et des modalités d’organisation des travailleurs et travailleuses de ces secteurs, de la sécurité sociale, « Or, la solution que les travailleurs ont trouvé pour ça, c’est la sécurité sociale, c’est se mettre ensemble, entrer dans une dynamique collective, créer des mouvements sociaux ; c’est de créer un rapport de force »…

Isabelle Guérin discute, entre autres, de l’« économie féministe » définie comme « comme l’ensemble des activités nécessaires au maintien de la vie, à commencer par les activités de soin et de lien » (cette définition me semble trop réduite. Je préfère la notion, développée par Danièle Kergoat, de « production du vivre » plus englobante), du biais « productif » et de la réduction de la notion de richesse, « Cette vision a des conséquences dramatiques. Elle invisibilise les activités de soin et de lien, pourtant absolument essentielles aux activités dites productives (les travailleurs ne viennent pas au monde « tout faits », comme disait Marx), et ce faisant elle dénigre le rôle essentiel des femmes, puisque ce sont elles qui, quels que soient les pays, sont majoritairement en charge des activités de soin », des salariées de l’ESS (les deux tiers sont des femmes en France), du dépassement de « la fausse distinction entre « production » et « reproduction » », de la mutualisation des tâches et de leur reconnaissance à leur juste valeur sociale, de la redéfinition des richesses, des initiatives participant d’« un vaste combat de redéfinition de la richesse, de l’économique et du politique »…

Quentin Mortier et Frédérique Konstantanos abordent l’économie sociale comme « vecteur de transformation sociale », comme idéal utopique « d’une société à venir, fondée sur des pratiques et des dispositifs déjà là » et comme mouvement citoyen en constitution, de commun, « Trois dimensions nous semblent particulièrement importantes : donner du sens au travail ; démocratiser l’entreprise et l’économie; produire et consommer autrement. La première ressort avec d’autant plus de force au regard du développement, ces dernières décennies, de la souffrance au travail. Il s’agit d’interroger le sens du travail, ce qui renvoie aux questions de droits : droit au travail, à la sécurité sociale, à l’alimentation, etc. », de territorialisation de l’économie sociale, de fissurer le capitalisme et non de le domestiquer…

Je me suis attardé sur les textes d’introduction. Les « Paroles du Sud » sont au cœur de cette brochure. Les auteurs et autrices fournissent de multiples exemples et analyses des pratiques, des difficultés, des contradictions et des possibles émancipateurs.

Contextes, histoire, inscriptions territoriales, prisme du genre, travail…

Les auteurs et autrices abordent des situations et des expériences en Bolivie, au Burkina Faso, au Burundi, en Colombie, au Maroc, en Palestine, en République démocratique du Congo, au Sénégal.

Des analyses à diffuser très largement.


Pour découvrir cette publication, entièrement accessible en ligne, cliquez ici

Disponible en françaisanglaisespagnol


Cetri – Solsoc : L’économie sociale et solidaire

A l’heure du travail décent

Bruxelles 2019, 76 pages

Didier Epsztajn

Auteur : entreleslignesentrelesmots

notes de lecture

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

En savoir plus sur Entre les lignes entre les mots

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture