Du coté des polars (mai 2024)

Metz, 1812
Victoire Montfort se lance dans une enquête aux résonances actuelles. Comment répandre des « fake news avant les réseaux sociaux » ? En diffusant un mensonge porté par plusieurs personnes obligeant le commissaire Albert Montfort à considérer comme suspect un innocent du crime commis sur un auxiliaire du juge pour faire éclater un trafic de contrebande dans le contexte du blocus du commerce avec la Grande-Bretagne décidé par Napoléon.
Continuer à lire … « Du coté des polars (mai 2024) »

Du coté des polars (avril 2024)

Gênes, ville noire
Antonio Paolacci & Paola Ronco ont décidé de faire de Gênes un personnage de polar pour conter les enquêtes de Paolo Nigra, tout autant Génois d’adoption que les deux auteurs. Le premier, « Nuages baroques », dévoilait une manière particulière de se servir des grands ancêtres du genre agrémentée de la visite des quartiers de Gênes sonnaient comme un vent nouveau. L’ironie de Nigra, homosexuel revendiqué, permettait de faire accepter des personnages par trop stéréotypés notamment ses acolytes de la police.
« Le point de vue de Dieu » tire les mêmes ficelles, avec une intrigue réduite au minimum. Pas besoin d’avoir lu Conan Doyle ou Agatha Christie pour savoir qui a tué. Le comment ne pose pas vraiment de problème même si le pourquoi un peu plus sophistiqué. La fin, digne d’un Hercule Poirot décadent, est décevante. La réunion de tous les protagonistes non seulement n’est pas réaliste mais est téléphonée.
L’amour de Nigra pour Rocco est compliqué et l’insistance sur ces difficultés – réelles – occupe une place disproportionnée. Par contre la visite du centre ville de Gênes est toujours un enchantement.
Les auteurs devraient changer leur référentiel pour aller vers d’autres influences, comme Hammett ou Chandler, parler de corruption, de mafia en donnant plus d’épaisseur aux comparses de Nigra.
Découvrir Gênes reste une bonne idée, même si ce club d’amateur de polars n’est pas vraiment fréquentable.
Antonio Paolacci & Paola Ronco : Le point de vue de Dieu, traduit par Sophie Bajard, Rivages/Noir Continuer à lire … « Du coté des polars (avril 2024) »

Du coté du polar (mars 2024)

Le Royaume de France en 1360
Les livres d’Histoire ont longtemps parlé de la « guerre de 100 ans », manière d’écrire a posteriori pour des guerres continuelles de formation des royaumes, de dessin des frontières et de la création d’Etats centralisés que seront les monarchies absolues. En 1360, la désorganisation est totale. Les luttes internes, les intrigues, les alliances se nouent et se dénouent à la vitesse des tempêtes. L’absence d’armées officielles ouvre grand les portes aux mercenaires qui, faute d’engagements, se livrent à des destructions organisées ou sauvages au détriment de l’ensemble des populations. Continuer à lire … « Du coté du polar (mars 2024) »

Du coté du polar (janvier 2024 – B)

831fd3d33c202afde91cc245cdd2a6f07c337fCVT_Dans-lil-de-la-vengeance_4464.jpg

 

Idiot, idiot à demi
Marto Pariente, pour son premier roman paru dans la Série noire, renouvelle l’art du polar à l’heure des gadgets électroniques, de l’ADN qui parle trop et d’autres expédients pour tuer toute intrigue, objets qui ont du mal à pénétrer dans des petites bourgades apparemment bien tranquilles comme Ascuas. Tony Trinitad – référence sans doute aux westerns spaghettis de la grande époque de Cinecitta – est l’unique policier municipal dont l’emploi est périodiquement remis en cause par le maire ou un de ses adjoints et semble un peu limité, bas de plafond pour tout dire. Mais il faut se méfier et prendre le titre au pied de la lettre : « La sagesse de l’idiot » pour s’interroger. Tout est là. Les thèmes sont traditionnels dans notre monde étrange ou seul compte la richesse accumulée et peu importe les moyens, trafic de drogue, blanchiment, chantage, assassinats pour assurer son pouvoir. Les meurtres peuvent avoir d’autres causes, l’amour par exemple, la vengeance, les traumatismes d’une enfance volée… Habilement, l’auteur entremêle thèmes et raisons pour développer une histoire qui tient en haleine jusque la dernière ligne même si le retournement final a été préparé. La surprise est émoussée. Continuer à lire … « Du coté du polar (janvier 2024 – B) »

Du coté du polar (janvier 2024)

Une lecture renouvelée d’un classique
« Rien dans les manches » de William R. Burnett avait déjà été réédité en Folio, traduction de Jacques-Laurent Bost pour la Série Noire en 1952. Pourquoi une nouvelle édition dans Folio Policier ? Une redondance ? Que Nenni ! Un nouvel éclairage pour apprécier le talent de Burnett. La révision effectuée par Marie-Caroline Aubert donne une plus grande plasticité au texte et rajoute quelques scènes coupées faute de place. Marcel Duhamel imposait le respect des 128 pages maximum.
Continuer à lire … « Du coté du polar (janvier 2024) »

Du coté du polar (octobre 2023)

Polar politique
« Les morts de Beauraing » est en prise avec les réalités déformées qui nous servent d’environnement. Un attentat a eu lieu dans cette agglomération bruxelloise. Il a visé la communauté catholique et le banc des accusé.e.s est rempli de jeunes belges attirés par le djihad. Un choc. Yves Demeulemeester et Leopold Verbist, associés dans une petite agence de presse, décident d’enquêter. Et la vision simpliste d’un ministre de l’intérieur perd de sa netteté. Se mêlent à eux, une militaire d’active, Ingrid Mertens, qui veut venger la mort de son fils adoptif pour faire imploser toutes les données et faire jaillir d’autres pistes, d’autres intérêts de groupes qui n’ont aucun respect pour la vie humaine et veulent servir Dieu, le grand diviseur de notre temps. Les responsables ne sont pas là où tout le monde regarde.
Continuer à lire … « Du coté du polar (octobre 2023) »

Du coté du polar (aout 2023)

Histoire et mémoire mêlées en une fiction réelle
Une adolescence dans le Texas du début des années 1950.
James Lee Burke fait une nouvelle fois la preuve qu’il est un des grands écrivains du Sud des Etats-Unis, un Faulkner contaminé par le polar pour faire éclater la réalité du monde. « Les jaloux » pose un adolescent, Aaron Holland Broussard, dans l’environnement du boom du pétrole – le film « Geant » avec James Dean et Rock Hudson le décrit aussi – qui a généré d’énormes fortunes, de la mafia toute puissante, la surexploitation des Mexicains et une police qui semble impuissante comme un racisme endémique. Les souvenirs des deux guerres sont encore présents pour le père du jeune homme qui noie sa mélancolie dans l’alcool alors que la mère se réfugie dans une dépression endémique. En arrière fond, comme toujours chez Burke, s’agitent les fantômes de la guerre de Sécession (1861-1865). Le magnat du pétrole est lié à la fois à la mafia et aux groupes néo-nazis qui fleurissent à cette époque, celle de la « chasse aux sorcières ». Le père du grand amour de Aaron – Valérie Epstein – est vraisemblablement de gauche, « Communiste » disait-on pour dénoncer, habité par un code moral sans faille. Continuer à lire … « Du coté du polar (aout 2023) »

Où est passée Ariane ?

CVT_Qui-a-tue-le-Minotaure_385.jpg

Le Paris des années folles cache mal la mort omniprésente combattue à grands coups de jazz, de comédies musicales, de fêtes et de nuits illuminées. En mars 1926, Carnavals. Une troupe de théâtre se produit. A leur tête une figure de Minotaure sollicitée bientôt par un masque d’Ariane. Le fil se tord, introduit un doute et la mort se trompe de cible abusée par le masque. Jeremy Nelson en quête, aidée par Camille et Victor Legris en forme de retour et de legs. Continuer à lire … « Où est passée Ariane ? »

Du coté du polar (juillet 2023 – B)

Rêves de souvenirs
« Viper’s Dream » et le titre dévoile le récit qui baigne dans cette fumée qui envahit souvent les loges des musicien.ne.s, un rêve qui repose sur des histoires racontées par les fantômes qui s’agitent à New York, ville qui sait habilement mêler le passé, le présent et l’avenir dans ces fumées sortant de terre. Les légendes, les faits se sont tellement pénétrés qu’il est difficile et même inutile de les démêler. Jake Lamar, né dans le Bronx mais vivant en France depuis 1993 raconte l’arrivée de son Alabama natal d’un apprenti trompettiste qui, dans les années 1930, voudrait devenir musicien à Harlem. Faute de talent minimum, il devient homme de main d’un trafiquant de marijuana juif et devient un des caïds de Harlem. Continuer à lire … « Du coté du polar (juillet 2023 – B) »

Du coté du polar (mai 2023)

Colères ouvrières

CVT_1886_430.jpg

Pascal Dessaint, auteur de romans « noirs », a voulu comprendre une image récente de deux cadres d’Air France qui, lors d’une occupation des salarié.e.s du siège de l’entreprise avait perdu leur chemise restée dans les bureaux. Image commentée forcément défavorablement, fustigeant comme il se doit la violence sauvage de ces contestataires. Etait-ce, se demanda l’auteur, la première fois que ces débordements de colère désespérée contre la morgue patronale de droit divin avaient lieu ? Continuer à lire … « Du coté du polar (mai 2023) »

Du coté du polar (avril 2023)

La solitude du tueur de fond
« L’agent seventeen », un titre qui ne laisse pas planer de doute sur le héros, ou plus exactement sur le personnage central qui ne nous laissera rien ignorer de ses doutes, de ses questionnements divers concernant tous les aspects de sa vie qu’elle soit professionnelle ou privée. A proprement parler, il envahit toutes les pages. Le thème est connu depuis Freud : tuer le père pour exister. Ici, 17 doit tuer 16 sur ordre de son supérieur à la CIA. Pourquoi ce meurtre ? Le tueur à gage s’interroge, nous pas tellement. On voit venir le coup. Pourtant là n’est pas l’intérêt de cette chronique violente. Il se trouve dans les glissements, dans les clins d’œil, dans les fausses références mais aussi dans les héros des films et romans d’espionnage, à commencer par Jason Bourne citée par l’auteur plus que James Bond. Continuer à lire … « Du coté du polar (avril 2023) »

Bulgarie, Corée, Afrique du Sud… trois livres

Comment peut-on être écrivain et musicien bulgare ?

Viktor Paskov est un des représentants de la littérature bulgare, qui a fait beaucoup d’émules, littérature qui reste à découvrir. « Allemagne conte obscène » baigne dans la désillusion combattue par une ironie grinçante et un humour triste et combatif, celui des exilés déçus par un pays d’accueil vu comme un Eden au départ. Continuer à lire … « Bulgarie, Corée, Afrique du Sud… trois livres »

Du coté des polars (novembre 2022)

Des histoires au coin du feu
Le temps de cet automne ne dit rien sur l’hiver qui vient. Une saison propice aux contes, aux histoires qu’on se raconte pour se rapprocher d’un feu qui s’éteint. « De la jalousie », de Jo Nesbo, fait partie de cette panoplie. Des nouvelles qui se veulent révélatrices de notre monde, de nos comportements assez semblables finalement malgré les frontières.
Continuer à lire … « Du coté des polars (novembre 2022) »

Du coté du polar, de l’espionnage, de l’amour et de la politique

Visions de morts et d’amour
Retrouver le commissaire Ricciardi et Naples qui s’apprête à fêter les 10 ans de la marche sur Rome et l’arrivée au pouvoir du Duce, de Mussolini – le 29 octobre 1922 – est un plaisir presque coupable. Le polar se fait poésie pour conter l’amour qui traverse les océans sous la forme d’un boxeur célèbre et célébré, d’un crime crapuleux au nom d’un amour égaré dans les plis de la folie et du commissaire lui-même incapable de répondre à l’être aimée, secoué par les souvenirs de sa mère et de sa propre maladie, héréditaire comme il se doit. Continuer à lire … « Du coté du polar, de l’espionnage, de l’amour et de la politique »

Une adolescence à Southampton

41dl6ZgJ81S._SX195_

M.J. Arlidge en une série qui met en scène Helen Grace, cheffe d’une escouade de la police de Southampton. La solidarité de son équipe a été mise à mal. Helen a été accusée à tort et sort juste de 9 mois de prison. Les traces sont sensibles. Faisant office de commissaire, elle est confrontée à une série de meurtres apparemment sans lien entre eux.

L’enquête se transforme vite en un portrait d’adolescentes en butte, à cause de son père alcoolique, au harcèlement de ses camarades. C’est aussi une immersion dans cette classe moyenne déclassée qui ne sait plus quelle est sa place dans cette société fortement marquée par les effets des politiques néo libérales, de baisse des dépenses sociale. Continuer à lire … « Une adolescence à Southampton »

Du coté des polars (septembre 2022)

1974, une année noire
La mémoire de ce temps se trouve ravivée par Xavier Boissel qui place ses personnages dans ce moment, politiquement, de transition. Pompidou avait déjà largement rompu les amarres avec les « services spéciaux » du gaullisme, le SAC – Service Action Civique, pas mal comme intitulé pour des basses œuvres – notamment. Il leur avait coupé les subventions. Il fallait bien qu’il trouve d’autres sources de financement en s’acoquinant avec les anciens de l’OAS – ils s’étaient pourtant combattus – et la pègre. L’hypothèse, crédible, formulée par l’auteur pour trouver de l’argent, le trafic de drogue. Continuer à lire … « Du coté des polars (septembre 2022) »

Du coté du polar (aout 2022)

Le polar croate de Jurica Pavičić
« L’eau rouge », publié l’an dernier, réussissait un tour de force, évoquer la guerre qui a déchiré l’ex-Yougoslavie sans jamais la mettre en scène, obscurcie qu’elle était par un drame familial : la disparition de Sylva, 17 ans, qui déchirera la famille et donnera au frère la possibilité de poursuivre le Graal, retrouver sa sœur. Il parcourra une partie du monde alors que son pays se déchire. Une quête sans fin qui se terminera par la découverte policière attendue et étrange tout à la fois. La découverte en France d’un auteur déjà reconnu dans son pays.
« La femme du deuxième étage », pour cette année, creuse un autre filon de la littérature policière, le thriller, l’étude de caractère, le portrait d’une femme empoisonneuse, en prison au moment où le fil de cette vie commence. Les personnages évoluent un peu trop en huis-clos. En dehors des deux appartements et la prison, l’auteur, là, donne l’impression que le reste du monde n’existe sauf dans le rejet de la condamnée et de sa famille, sa mère en l’occurrence qui fuit la ville de Split, décrite à deux moments dans ses changements et ses constantes. L’auteur veut donner cette sensation d’enfermement et c’est un peu trop réussi. Il arrive que l’ennui gagne à force de lassitude qui semble habiter Bruna empêchée de prendre son destin en mains. La pression de l’entourage est pesante et empêche tout développement personnel. La prison est ressentie comme une libération par son rythme régulier, prévisible.
Portrait d’une petite ville plus que d’une femme. Les voies de la libération ne sont qu’esquissées.
Jurica Pavičić : L’eau rouge & La femme du deuxième étage, traduit par Olivier Lannuzel, Éditions Agullo
Continuer à lire … « Du coté du polar (aout 2022) »