Pourquoi la puberté est importante

Le parti « Liberal Democrats » (ou « lib dem »), a reçu en novembre 2019 une grosse donation de la part de Ferring Pharmaceuticals, une entreprise dirigée par le millionnaire suédois Frederik Paulsen, qui développe et commercialise des produits dans les domaines de la gynécologie, de la pédiatrie et de l’endocrinologie. Une information révélée par le journal britannique « The Times » (1), sans que les intéressés ne tentent de nier les faits.

Le parti « Liberal Democrats » est connu outre-Manche pour avoir soutenu la légalisation des bloqueurs de puberté, des médicaments donnés aux petits garçons qui jouent à la poupée et aux petites filles « garçons manqués », pour bloquer leur puberté. Un des plus vendus est la Triptoreline, produit par… Ferring Pharmaceuticals. Cette information qui n’est pas passée inaperçue.

Depuis quelques années déjà de nombreuses féministes s’interrogent : pourquoi est-il devenu interdit de critiquer l’idée qu’il est possible de « choisir son sexe dès l’âge de 8 ans » sous peine de se voir agresser y compris physiquement ?

Pour avoir traduit un documentaire de la BBC sur les bloqueurs de puberté et la médicalisation des enfants non conformes aux stéréotypes de genre, non seulement le militant (français) écologiste et anarchiste Nicolas Casaux s’est vu traité de lgbt-phobe par des militant.e.s s’identifiant queers, mais les autres membres de l’organisation (anarcho-écologiste) qu’il a fondée, « Deep Green Ecology France », ont reçu des pressions pour les obliger à l’exclure de l’organisation. Faire pression sur l’entourage pour « tuer » socialement leurs opposants est la technique préféré de cette mouvance politique.

Je suis une femme adulte homosexuelle non conforme aux stéréotypes de genre mais aussi de sexe (mon corps produit naturellement plus d’hormones que la moyenne), j’ai grandis avec l’homophobie – elle a mangé toute mon adolescence – et j’ai vécu enfant des discriminations en raison de mon androgynie.

Quand j’étais enfant – j’ai grandi dans le monde rural -, les professeurs humiliaient encore les gens comme moi. Des voisins refusaient de me voir jouer avec leurs enfants. Adolescente, certains poussaient des cris d’animaux quand ils me voyaient. Je n’avais pas et n’ai pas besoin de bloqueurs de puberté. J’avais besoin d’acceptation. Il est évidement qu’il est plus facile pour la société hétéro-sexiste d’avoir des petits garçons efféminés qui ressemblent à des fillettes et des petits filles « garçons manqués » qui ressemblent à des petits garçons, même si le prix à payer pour « ressembler » au sexe opposé est terrifiant. Mais qu’importe non puisque ce seront des enfants qui le paieront pas la société.

Je suis heureuse que le féminisme m’ait appris que les femmes étaient aussi des êtres humains, que l’important ce n’étaient pas d’être normal mais d’être bien dans son corps. Les féministes critiques de cette idéologie sont en désaccord sur de nombreux sujets : la prostitution, la laïcité, l’union européenne… certaines sont anarchistes, d’autres marxistes ou conservatrices mais nous sommes d’accord sur une chose : mutiler des enfants pour que des adultes se sentent « progressistes » n’est pas acceptable.

Le film « petite fille » (diffusé récemment sur Arte) est un outil de propagande, il est construit pour que le spectateur adhère au message sans le dire clairement. Or ce message quel est-il ? Que les bloqueurs de puberté sont nécessaires. Et ce alors qu’au Royaume-uni, il est maintenant interdit de prescrire des bloqueurs de puberté aux moins de 16 ans. Les mineurs déjà sous bloqueurs devront demander une autorisation spéciale (délivrée après enquête) et surtout toute nouvelle prescription à des mineurs de moins de 16 ans est interdite. Cette interdiction fait suite à un procès entamé par Keira Bell (2), une jeune femme britannique métis qui a porté plainte pour avoir été mise dès l’âge de 14 ans sous bloqueurs de puberté. Pour Keira, les raisons qui l’ont poussées à vouloir essayer de ressembler physiquement à un homme hétérosexuel relevait du racisme, du sexisme et de l’homophobie intériorisée.

Les féministes « historiques » ont théorisé la différence entre le genre, qui est un construit social, (masculin/féminin..) et le sexe biologique ». Pour elles la société assignait un genre (rose, bleu…) en raison d’un sexe biologique et elles pensaient que le genre n’était pas « naturel ».

Dans les années 90 et 2000, une tendance se revendiquant « queer » s’est mise à considérer que la différence sexuelle était une construction sociale. Aujourd’hui certain.ne.s théoricien.ne.s queers ont évolué au point maintenant de considérer que le sexe est une construction sociale et le genre une donnée naturelle. Presque comme si la société assignait des sexes à des âmes immortelles. C’est même ce que pense une des figures les plus en vues de ce mouvement : Martine Rothblatt.

Rothblatt qui a vécu les quarante premières années de sa vie en étant perçue homme a fondé en 1996 la compagnie de biotechnologie United Therapeutics Corp, dont la vente l’a rendue millionnaire. Rothblatt pense que certaines personnes auraient une identité de genre innée qui pourrait se déclarer à n’importe quel âge de la vie : dans un entretien donné au journaliste radio Howard Stern, Rothblatt a ainsi déclaré avoir commencé à se visualiser femme à 15 ans (et pas avant) (3).

La principale pierre de l’argument queer pour justifier la non existence du sexe biologique est l’existence de personnes intersexué.e.s. Les personnes intersexué.e.s sont des personnes nées avec des caractéristiques sexuelles qui ne correspondent pas aux définitions typiques de « mâle » et « femelle . Certain.e.s militant.e.s intersexué.e.s, comme Alice Dreger, considèrent que l’instrumentalisation des personnes interexué.e.s pour justifier la « non existence du sexe biologique » contribue à les invisibiliser.

Ainsi, le grand public ne sait pas que le mot « intersexuation » regroupe plusieurs dizaines de situations différentes. Ni que beaucoup de personnes dites intersexuées naissent sans ambiguïtés génitales, et que leur intersexuation (pourtant présente à la naissance) ne devient visible qu’à la puberté, un moment clé dans la vie humaine.

Même les personnes intersexué.e.s qui naissent avec une ambiguïté génitale visible ne sont pas des hermaphrodites de la mythologie grecque qui seraient capables de se féconder eux même.

Si toutes les variations du développement sexuel incluses dans le concept parapluie d’« intersexuation » n’impliquent pas la stérilité, il existe des gens qui naissent sans aucune gonades, c’est à dire sans aucun organe sexuel producteur de gamètes. Elles et ils – en plus d’être infertiles – ont souvent besoin de traitements hormonaux de substitution (à vie) pour ne pas mourir très jeunes de maladies osseuses, puisque les gonades produisent des hormones responsables des caractéristiques sexuelles secondaires qui codent aussi le système osseux.

Seule une personne sur 100 000 naît avec un ovotestis, une gonade ayant des caractéristiques partielles à la fois d’un ovaire et d’un testicule qui ne produit pas de gamètes reproductives fonctionnelles. Bien que infertile cette gonade est utile à la personne concernée : en cas d’ablation celle ci se verra imposer une hormonothérapie substitutive à vie.

La tendance néo-queer parle de personnes à utérus comme si celui ci n’avait aucune influence sur le reste du corps. Or des recherches ont montrées (4) que les femmes qui subissaient une ablation de l’utérus avaient – même sans ablation des ovaires – un risque accru de démence, si cette ablation avait lieu avant la ménopause dite « naturelle ». Il ne s’agit pas de dire que le fait d’avoir un utérus rend « douce » mais que les organes producteurs d’hormones sexuelles ont une influence sur l’ensemble du corps (et notamment sur les os) et que la puberté – le moment où la majorité d’entre nous devient biologiquement (mais pas socialement) fertile constitue un moment clé de notre biologie. Sauf que dire cela est aujourd’hui considéré comme un acte de haine à censurer via le chantage identitaire et l’ultra-violence.

Dans les milieux féministes, des femmes se pensant « alliées » sont éduquées -des brochures existent même sur le sujet (5) – à traquer les « pensées » « lgbt-phobes » (du type « bloquer la puberté peut présenter des risques » ou « les lesbiennes ont le droit de ne pas coucher avec des personnes à pénis ») et à exclure de tous les milieux militants et culturels, les personnes qui ne sont pas éducables.

Les raisons qui poussent les adeptes de cette mouvance à défendre avec autant d’agressivité la non existence du sexe biologique ne sont pas à chercher dans la logique, mais dans la psychologie sociale. Au Canada, cette tendance soutient un projet de loi (dit « amendement C-6 (6) ») qui vise à rendre illégal tout accompagnement médical de personnes detransitioneur.se.s (des personnes ayant réalisé – souvent jeunes voir mineurs – ce que le grand public appelle un « changement de sexe » avant de le regretter) au motif que cela pourrait en inciter d’autres à détransitionner, à « revenir en arrière ».

Ce mouvement vise aussi maintenant à étendre l’usage – déjà légal mais marginal – des bloqueurs de puberté dans l’état français et le film « petite fille » rentre dans cet objectif. Qu’importe si toutes les études montrent que la grande majorité de ces enfants voulant « changer de sexe » cessent de se sentir « de l’autre sexe » à la puberté, mais qu’en bloquant leur puberté et en les « incitant » à changer, la majorité le feront. Une étude de la sexologue canadienne Debra Soh montre ainsi (7) que la majorité des enfants qui veulent « changer de sexe » – pas tou.te.s mais assez quand même pour que ça saute aux yeux – sont aussi amoureux d’enfants de même sexe. C’est moins le cas pour les adultes : Martine Rothblatt se définit ainsi « lesbienne heureuse de son pénis ».

Pour Debra Soh si certains enfants disent qu’ils « sont » du sexe opposé, c’est parce que c’est la seule façon qu’ils ont de faire comprendre à des adultes qu’ils veulent faire des choses que l’autre sexe fait (aimer les autres garçons ou être efféminés pour les garçons, être sportive ou ne pas être sociable pour les filles..).

Soh estime que « considérer que l’homosexualité (ou la non conformité aux stéréotypes de genre) est préférable à une vie de supplémentation hormonale, d’opérations chirurgicales et de risques de stérilité ne devrait rien avoir de polémique ».

La chercheuse en santé publique Lisa Littman (8) a montré que des phénomènes de pressions via les réseaux sociaux peuvent inciter des adolescent.e.s à se sentir « du sexe opposé », sans avoir connu cette sensation dans l’enfance. Il existe déjà dans le monde francophobe des vidéos youtube ou des comptes Instagram incitant les enfants à s’interroger sur leur genre réel. Ou était-ce sur leur sexe réel ?

L’ingénierie linguistique précède toujours l’ingénierie sociale. Le fait que les mots « sexe » et « genre » soient de plus en plus interchangeables participent d’une forme de confusionnisme.

On sait qu’il y a en ce moment même dans les pays occidentaux une explosion d’enfants, d’adolescent.e.s et de très jeunes adultes souhaitant changer d’apparence physique pour changer de genre social. On sait aussi qu’il y a une corrélation statistique forte entre le fait d’avoir un diagnostique d’autisme asperger et le fait pour une fillette de vouloir devenir un homme.Une étude réalisée dans une clinique de « changement de sexe » pour enfants à Amsterdam (la Gender Identity Clinic of the VU University Medical Centre of Amsterdam) a ainsi montré que 7,8% de ces enfants avaient aussi un diagnostique d’autisme asperger (9). Il est difficile d’évaluer le nombre de personnes ayant un trouble du spectre autistique, mais l’estimation la plus large fait état de 1% de la population.

Pour la tendance néo-queer cela viendrait du fait que les fillettes autistes asperger auraient des « cerveaux masculins ».

Dans les années 90 des études post-mortem (des études réalisées sur des cadavres) réalisées par le neurobiologiste hollandais Dick Swaab ont montré que les personnes trans de l’étude avaient des cerveaux qui semblaient être à mi chemin entre la « moyenne » masculine et la « moyenne » féminine, comme si leur cerveau était intersexué (sans toutefois spécifier le pourcentage de sujets sous hormones artificielles et/ou durant combien de temps) (10). Ce sont ces études qui ont été utilisées pour dire que le cerveau avait un sexe inné.

D’autres neurobiologistes comme Catherine Vidal récusent la thèse des « cerveaux masculin et féminin ». Pour elles et eux les différences d’aptitudes entre les sexes seraient uniquement le produits d’un environnement social qui influence le développement du cerveau grâce à la plasticité neuronale. Si la possibilité qu’il existe des différences partiellement innées entre les cerveaux des hommes et des femmes fait encore débat dans la communauté scientifique, personne ne remet en cause la plasticité neuronale ni le fait que la puberté constitue un moment clé du développement osseux, hormonal et cérébral (11).

Quand bien bien même il existerait des cerveaux genrés, ne pourrait-on pas juste accepter – sans qu’on ait à en connaître les raisons – que certains petits garçons aiment mettre des robes, jouer à la poupée et/ou aiment les autres garçons.

Pour l’extrême droite traditionnelle ces enfants doivent être corrigés psychiquement (avec la violence que l’on sait). Pour cette nouvelle tendance néo-queer, ces enfants doivent être corrigés physiquement, avec des effets secondaires encore inconnus. Reste maintenant à savoir comment les expérimentations sur les enfants sont devenus fun. Mais la réponse à cette question nécessiterait un autre article.

J. Go


(1) https://www.thetimes.co.uk/article/puberty-blocker-drug-firm-donated-cash-to-lib-dems-cf3x77nh3

(2) https://www.theguardian.com/world/2020/dec/01/children-who-want-puberty-blockers-must-understand-effects-high-court-rules

(3) https://nymag.com/news/features/martine-rothblatt-transgender-ceo/index2.html#print

(4) https://www.santemagazine.fr/actualites/lablation-de-luterus-ou-hysterectomie-aurait-des-consequences-cognitives-335400

(5) https://www.youtube.com/watch?v=H3cTgnpru1I&list=PLRdayXEOwuMHu0D7kRVpNd4tCv12aEAls une vidéo d’un youtubeur américain révèle l’existence de telles brochures sur les campus américains.

(6) https://www.lapresse.ca/debats/opinions/2020-11-19/identites-de-genre/des-projets-de-loi-aux-enjeux-cruciaux-pour-nos-enfants.php

(7) https://www.lepoint.fr/debats/transsexualite-les-motifs-inavouables-des-therapies-de-conversion-precoces-24-11-2018-2274130_2.php

(8) https://www.lepoint.fr/debats/etats-unis-l-ideologie-du-genre-a-encore-frappe-15-09-2018-2251450_2.php

(9) https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2904453/

(10) https://www.the-scientist.com/features/are-the-brains-of-transgender-people-different-from-those-of-cisgender-people-30027

(11) http://www.enfant-encyclopedie.com/cerveau/selon-experts/maturation-du-cerveau-adolescent

Auteur : entreleslignesentrelesmots

notes de lecture

Une réflexion sur « Pourquoi la puberté est importante »

  1. Merci beaucoup pour votre article.
    J’y ai lu que l’ablation de l’utérus prédisposait à la démence. Une personne de ma famille quelques années après avoir subi cette opération s’est retrouvée progressivement en démence sénile.
    L’ablation récente de la prostate chez une autre personne de ma famille me paraît avoir des conséquences identiques mais beaucoup plus rapide..
    Ça semble assez logique, la prostate correspond à l’utérus.

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